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Recours à l’assistance administrative internationale : Précisions sur le délai spécial de reprise

Photo d'Eric Lesprit et Marie-Charlotte Mahieu

La CAA de Lyon précise les conditions d’application du délai spécial de reprise dont dispose l’Administration en cas de recours à l’assistance administrative internationale.

Rappel

Lorsque, dans le délai initial de reprise, l’administration fiscale a demandé des renseignements concernant un contribuable auprès d’une autorité étrangère dans le cadre de l’assistance administrative internationale, les omissions ou erreurs d’imposition afférentes à cette demande peuvent être réparées, même si le délai initial est expiré, jusqu’à la fin de l’année qui suit celle de la réception de la réponse et, au plus tard, jusqu’au 31 décembre de la 3e année suivant celle au titre de laquelle le délai initial est expiré (LPF, art. L. 188 A dans sa rédaction issue de l’article 59 de la loi 2013-1117 du 6 décembre 2013 – et applicable aux demandes formulées dans les délais de reprise venant à expiration à compter du 8 décembre 2013).

Cette prolongation du délai de reprise est subordonnée à la condition que le contribuable ait été informé (i) de la demande de renseignements dans le délai de 60 jours suivant son envoi, ainsi que (ii) de l’éventuelle réponse de l’autorité sollicitée dans le délai de 60 jours suivant sa réception par l’administration fiscale.

Selon les commentaires administratifs relatifs à ces dispositions :

Sous l’empire de la législation antérieure à la loi du 6 décembre 2013, aucun délai n’était imposé à l’Administration pour informer le contribuable de l’engagement d’une demande d’assistance administrative et de la réponse qui y était apportée (i.e. pas le délai actuel de 60 jours). Il avait été jugé que l’administration fiscale devait informer le contribuable dans un « délai raisonnable » (CE 5 juillet 2010 n°305563, Sté Dariosecq ; CAA Marseille 2 décembre 2010 n°08-1913, Berkani née Boubakri, arrêt définitif : un délai de 49 jours n’a pas été jugé raisonnable).

L’histoire

En 2008, deux associés à parts égales d’une holding française détenant des participations dans 3 sociétés, créent une société de droit luxembourgeois ayant pour objet la prise de participation dans toutes ces sociétés. En mars 2009, les associés apportent l’intégralité des parts qu’ils détenaient dans la holding française à la société de droit luxembourgeois.

Au cours des années 2009 à 2011, la société française distribue des dividendes à la société de droit luxembourgeois.

L’un des associés et son épouse font l’objet d’un examen de situation fiscale personnelle (ESFP) portant sur les années 2010, 2011 et 2012 et d’un contrôle sur pièce pour l’année 2009.

A l’issue de ces contrôles, l’Administration a estimé que le couple devait être considéré comme résident fiscal en France au titre des années 2009 à 2012, et non pas comme ayant une résidence fiscale suisse ainsi que revendiquée par les contribuables.

La décision de la CAA de Lyon

Pour les années 2009 et 2010, l’administration fiscale française a adressé dans le délai initial de reprise, expirant respectivement les 31 décembre 2012 et 31 décembre 2013, une demande d’assistance administrative internationale aux autorités fiscales luxembourgeoises.

Deux jours après sa transmission, soit le 20 décembre 2012, le requérant a été informé de l’envoi de cette demande, puis :

La CAA de Lyon conclut qu’en l’espèce les délais d’information du contribuable (« raisonnable » pour l’année 2009 et de 60 jours pour 2010 et 2011) n’ont pas été respectés.

Elle rejette ainsi les arguments mis en avant par l’Administration selon lesquels elle n’était pas tenue d’informer le contribuable des réponses des autorités fiscales luxembourgeoises – lesquelles consistaient essentiellement en l’envoi des déclarations souscrites tardivement par la holding luxembourgeoise – tant que celles-ci n’étaient pas complètes, d’autant que ces autorités n’avaient pas répondu à l’ensemble des questions listées dans le formulaire-type e-form « Request for exchange of information ».

A cet égard elle précise que, non seulement le texte de l’article L. 188 A du LPF ne limite pas l’information du contribuable à une réponse des autorités fiscales étrangères regardée comme complète par l’Administration [ce qui ne semble pas aller dans le sens des commentaires administratifs précités BOI-CF-PGR-10-60 n°130], mais qu’il résulte de plus de l’instruction qu’en l’espèce, les réponses apportées par les autorités fiscales luxembourgeoises devaient être regardées comme complètes pour les années 2009 à 2011.

Par conséquent, la Cour confirme la décharge des impositions prononcées par les juges en 1re instance.

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