Pour la CAA de Lyon, le juge de l’impôt ne peut pas substituer d’office la majoration pour manquement délibéré (CGI, art. 1729, a)) à la majoration pour défaut de production dans les délais prescrits d’une déclaration (CGI, art. 1728, 1, b)).
Rappel
Pénalités en cas de déclaration incomplète : les omissions ou les inexactitudes relevées dans des déclarations entraînent l’application d’une majoration de 40 % lorsque le caractère délibéré de l’infraction est établi (CGI, art. 1729, a)), portée à 80 % en cas de manœuvres frauduleuses ou d’abus de droit (CGI, art. 1729, b) et c)).
Pénalités en cas de retard ou absence de déclaration : les infractions concernant le défaut ou le retard de production de déclarations ou actes comportant l’indication d’éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt entraînent, elles, l’application d’une majoration de :
- 10 % en l’absence de mise en demeure de l’Administration de procéder à ladite déclaration, ou en cas de dépôt de la déclaration dans les 30 jours suivant la réception d’une mise en demeure (CGI, 1728, 1, a))
- 40 % lorsque la déclaration n’a pas été déposée dans les 30 jours suivant la réception d’une mise en demeure (CGI, 1728, 1, b))
- et 80 % en cas de découverte d’une activité occulte (CGI, 1728, 1, c)).
L’articulation de ces 2 « familles » de pénalités est régie par l’article 1729 A du CGI.
Ainsi, lorsque des insuffisances sont constatées dans une déclaration tardive, ce sont les majorations pour retard de déclaration visées à l’article 1728 du CGI qui s’appliquent à l’intégralité des droits. Les majorations pour omissions/inexactitudes prévues à l’article 1729 du CGI ne sont pas applicables, sauf si leur taux est supérieur à la majoration pour retard, dans ce cas, elles s’y substituent sur la fraction des droits résultant des rehaussements.
L’Administration dans sa doctrine, comme le juge de l’impôt, ont précisé, à cet égard, que les majorations pour insuffisance de déclaration n’étaient pas applicables à un contribuable n’ayant pas souscrit de déclaration, et ce, y compris lorsque les circonstances de ce défaut de déclaration révèlent le caractère délibéré du manquement (BOI-CF-INF-10-20-30-10-15/04/2013, §20 ; CE, 10 mars 1999, n°152008, SARL Lupi).
L’histoire
Une société exerçant une activité de location de locaux nus, a raison de laquelle elle a opté pour son assujettissement à la TVA a omis, pour les mois de janvier à décembre 2013, de déposer ses déclarations de TVA dans les délais prescrits.
A l’issue d’une vérification de comptabilité, la société s’est notamment vu appliquer, en sus de rappels de TVA, des majorations :
- de 40 % pour défaut de déclaration dans les 30 jours d’une mise en demeure (fondée sur le b) du 1 de l’article 1728 du CGI) au titre des mois de janvier à mai 2013 ;
- et de 40 % pour manquement délibéré (fondée sur le a) de l’article 1729 du CGI) pour le mois de novembre 2013.
Après avoir constaté que pour les mois de janvier à mai 2013, la société, bien qu’ayant reçu une mise en demeure de l’Administration, n’avait pas procédé aux déclarations requises dans le délai de 30 jours suivant sa réception, le TA de Dijon a considéré que cette absence de déclaration caractérisait l’intention délibérée de la société d’éluder la TVA.
Il a donc substitué d’office à la majoration de 40 % appliquée en cas de défaut de production de la déclaration dans les 30 jours suivant la réception d’une mise en demeure, la majoration de 40 % prévue en cas de manquement délibéré.
La décision
La CAA de Lyon juge, de manière semble-t-il inédite, qu’il n’appartient pas au juge de l’impôt, lorsqu’il n’y est pas invité par l’Administration, de substituer à la majoration du b) de l’article 1728 du CGI (défaut de production dans les délais prescrits d’une déclaration ou d’un acte) la majoration pour manquement délibéré prévue au a) de l’article 1729 du CGI (souscription délibérée d’une déclaration entachée d’insuffisances ou d’inexactitudes ou présentant un caractère incomplet).
Notons qu’à l’inverse, le juge de l’impôt a, par le passé, admis la substitution d’office de la majoration de 40 % pour manquement délibéré à la majoration de 80 % pour manœuvres frauduleuses (CGI, art. 1729, voir CE, 10 décembre 2020, n°428059), ou encore la substitution de la majoration de 40 % pour retard de déclaration à la majoration de 80 % applicable en cas de découverte d’une activité occulte (CGI, art. 1728, voir CAA Lyon 20 décembre 2018, n°17LY02597). Mais il s’agissait, dans les 2 cas, de modulation entre des pénalités appartenant à la même « famille ».