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APA : Qualification de branche complète d’activité (donnée préalablement en location-gérance) et transfert de salariés

La CAA de Bordeaux juge que la qualification de branche complète d’activité ne peut être retenue au titre de l’activité préalablement donnée en location-gérance en l’absence de transfert de personnel affecté.

Pour mémoire, afin de bénéficier de plein droit du régime spécial des fusions, un apport partiel d’actif doit concerner une branche complète d’activité (CGI, art. 210 B).

Selon la doctrine administrative, la branche complète d’activité se définit comme l’ensemble des éléments d’actif et de passif d’une division d’une société qui constituent, du point de vue de l’organisation, une exploitation autonome, c’est-à-dire un ensemble capable de fonctionner par ses propres moyens. La qualification d’une branche complète d’activité relève donc de l’appréciation concrète des faits de l’espèce, renvoyant aux conditions d’exploitation de la société apporteuse et non, après réalisation de l’apport, à l’organisation de la société bénéficiaire de l’apport. (BOI-IS-FUS-20-20 n°10 et 20 du 3 octobre 2018 et confirmé par CE, 27 juillet 2005, n°259052, Sté B.L.).

L’histoire

En 1998, une société confie à une autre l’exploitation de son fonds de commerce de distillation de vins dans le cadre d’un contrat de location-gérance. A cette occasion, le locataire-gérant est devenu l’employeur des salariés affectés à cette activité.

En 2013, la société bailleresse transfère son fonds de commerce, les installations techniques, matériel et outillage, ainsi qu’une quote-part de son passif à la société locataire-gérante dans le cadre d’un apport partiel d’actifs. Elle conserve en revanche les locaux dans lesquels l’activité est exercée. La société bailleresse considère cet apport éligible au régime de faveur de l’article 210 B du CGI et transfère les titres ainsi reçus à son actionnaire dans le cadre d’une réduction de son capital et d’un acompte sur dividendes.

Dans le cadre d’une vérification de comptabilité portant sur les résultats de la société actionnaire, l’administration fiscale considère que cette attribution de titres devait s’analyser en une distribution de revenus mobiliers imposable et refuse l’application de l’article 115 du CGI, dans sa rédaction applicable au litige, selon lequel « 1. En cas de fusion ou de scission de sociétés, l’attribution de titres, sommes ou valeurs aux membres de la société apporteuse en contrepartie de l’annulation des titres de cette société n’est pas considérée comme une distribution de revenus mobiliers (…) 2. Les dispositions du 1 s’appliquent également sur agrément délivré à la société apporteuse (…) ».

Le TA de Poitiers rejette la demande en décharge principale et fait seulement droit aux conclusions subsidiaires de la société requérante visant à l’application du régime des sociétés mères prévu à l’article 216 du CGI. La société relève donc appel de la décision devant la CAA de Bordeaux.

La décision

Au cas d’espèce, la Cour relève que l’opération d’apport du fonds de commerce est venue mettre fin à la location gérance. Dans cette logique, elle considère que les contrats de travail des salariés ne peuvent être regardés comme ayant été transférés à la société bailleresse apporteuse préalablement, ne serait-ce qu’un instant de raison, à l’opération d’apport pour être ensuite transférés de nouveau à la société d’exploitation bénéficiaire.

Elle en déduit que, compte tenu de la nature de l’activité et de la spécificité des emplois requis, en l’absence à cette date de transfert effectif du personnel nécessaire, l’apport réalisé en 2013 ne saurait être regardé comme portant sur une branche complète et autonome d’activité.

La Cour conclut que la plus-value réalisée à cette occasion par la société apporteuse ne pouvait donc bénéficier du régime de faveur prévu par l’article 210 B, 1 du CGI. A fortiori, l’attribution de titres à son actionnaire n’entrait pas dans le champ des dispositions de l’article 115 du CGI.

Selon la doctrine administrative, la qualification de branche complète d’activité nécessite que l’activité apportée soit réellement exercée à la date de réalisation de l’apport (BOI-IS-FUS-20-20 n°40 du 3 octobre 2018). En pratique, selon l’administration fiscale, cette définition a pour effet d’exclure les activités préalablement données en location-gérance (voir CAA Bordeaux, 20 mars 2003, n°98-1690, Congrégation des sœurs hospitalières et institutrices de la Salle de Vihiers). Cette décision semble néanmoins d’interprétation stricte en considération des faits de l’espèce.

Selon les membres de l’IACF « La lecture de l’arrêt laisse entendre que la société aurait satisfait aux exigences posées par l’article 210 B si, immédiatement avant l’apport, elle avait résilié le contrat de location-gérance, redevenant ainsi l’employeur du personnel en cause pour un court instant et retrouvant par là-même la faculté de le transférer à la société bénéficiaire de l’apport. »(cf. Commentaires relatifs à la décision dans le compte rendu de la commission fiscalité des entreprises de l’IACF du 29 septembre 2020, p.7).

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