Rappel
On sait que, dans le cadre des opérations de restructuration soumises au régime de faveur, le transfert des déficits de la société absorbée, scindée ou apporteuse est possible, sous réserve que la société bénéficiaire des apports obtienne un agrément, délivré sous certaines conditions : l’opération est placée sous le régime de faveur, elle répond à une justification économique et à des motivations principales autres que fiscales, il n’y a pas eu de changement significatif d’activité, l’activité est poursuivie, les déficits ne proviennent ni de la gestion d’un patrimoine mobilier par des sociétés holding, ni de la gestion d’un patrimoine immobilier (CGI, art. 209, II et 1649 nonies).
La LF 2020 est toutefois venue instaurer une dispense de cet agrément préalable dans certaines hypothèses.
Ainsi, sont transférables de plein droit les déficits, charges financières et la capacité de déduction inemployée de la société absorbée :
- lorsque leur montant cumulé n’excède pas 200 k€,
- sous réserve que la société absorbée n’ait pas cédé ou cessé l’exploitation d’un fonds de commerce ou d’un établissement,
- l’opération est placée sous le régime de faveur (à l’exclusion donc des opérations considérées comme abusives au sens de l’article 210-0 A du CGI, ainsi que des déficits provenant de la gestion de certains patrimoines mobiliers ou immobiliers).
Cette dispense d’agrément est applicable strictement aux opérations de fusions, à l’exclusion donc des opérations de scissions ou d’apports partiels d’actifs.
Elle est également déclinée aux hypothèses d’absorption de la société mère d’un groupe intégré, sous réserve du respect des mêmes conditions. Il faut en outre que les déficits, charges financières nettes non déduites et la capacité de déduction inemployée proviennent de la société absorbée ou des sociétés membres du groupe auquel il a été mis fin qui font partie du nouveau groupe et pour lesquelles le bénéfice du mécanisme d’imputation sur base élargie a été demandé.
Précisions administratives nouvelles
Champ d’application (BOI-IS-FUS-10-60-10, 13 avril 2022)
Dans ses commentaires au BOFiP, l’Administration confirme, en premier lieu, que la dispense d’agrément ne concerne ni les opérations de scissions, ni les opérations d’apports partiels d’actifs – dans ce cas, il est bien entendu toujours possible de solliciter un agrément (n°20).
L’Administration indique qu’il en va de même en cas de d’opération de scission ou de scission partielle affectant la société mère d’un groupe intégré – ce que le texte n’excluait pas tout à fait expressément (n°60).
En revanche, la dispense d’agrément est susceptible de s’appliquer aux opérations de fusion sans échange de titres, de dissolution sans liquidation (n°20), ainsi que dans certaines conditions aux opérations transfrontalières ou étrangères (n°70).
Le dispositif s’applique aux opérations réalisées à compter du 1er janvier 2020, étant précisé que la date de réalisation correspond à celle de l’effet juridique, et non à l’effet fiscal rétroactif conféré par les parties à l’opération (n°100).
Modalités de mise en œuvre (BOI-IS-FUS-10-60-20, 13 avril 2022)
L’Administration rappelle que le transfert sans agrément des déficits, charges financières nettes et capacité de déduction n’emporte pas approbation :
- de la régularité juridique de l’opération au titre de laquelle le transfert est opéré ;
- de ses modalités juridiques, comptables et financières ;
- du montant des déficits, des charges financières et de la capacité de déduction inemployée de charges financières.
Le montant de déficits, charges financières et capacité de déduction transférés de plein droit demeure soumis au droit de contrôle de l’Administration dans les conditions de droit commun (n°10).
Elle précise ensuite que le transfert des déficits, des charges financières nettes et de capacité de déduction de charges financières inemployée ne peut pas, au titre d’une même opération, être réalisé pour une partie en dispense d’agrément et pour une autre partie dans le cadre de la procédure d’agrément (n°40).
Autrement dit, si l’on prend le cas d’une société absorbée disposant de 300 000 € de reports déficitaires, la société absorbante ne pourra pas prétendre au transfert de plein droit de 199 999 € et déposer une demande d’agrément pour le reliquat. En revanche, libre à elle, si elle le souhaite, de transférer de plein droit les 199 999 €, renonçant alors au surplus qui sera définitivement perdu (n°50).
Enfin, on rappelle que le transfert des déficits, charges financières nettes et capacité de déduction inemployée de la société absorbée ou confondue n’est pas possible en dispense d’agrément si, au cours de la période déficitaire (c’est-à-dire la période comprise entre le 1er exercice constatant des déficits, charges financières nettes ou capacité de déduction inemployée à transférer et la réalisation de la fusion ou de la TUP), cette société a cédé ou cessé l’exploitation d’un fonds de commerce ou d’un établissement.
L’Administration indique que cette condition s’applique même si la société estime être en mesure de démontrer que ce fonds de commerce ou cet établissement n’a pas contribué aux déficits, charges financières nettes ou capacité de déduction inemployée de la société absorbée ou confondue (n°70).
Dans l’hypothèse où une cession ou cessation a été réalisée au cours de la période en cause, la société absorbante ou confondante doit ainsi déposer une demande d’agrément si elle souhaite transférer à son profit des déficits, charges financières nettes et capacité de déduction de charges financières inemployée de la société absorbée (n°80).