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Imposition en France d’une société étrangère à raison de ses revenus immobiliers par recours à la méthode de l’assimilation

La CAA de Marseille juge qu’une société de droit britannique, assimilable à une SARL, est imposable en France au titre de la renonciation à recettes correspondant à la mise à la disposition gratuite auprès de ses associés de biens immobiliers qu’elle détient en France.

L’histoire

Une société de droit britannique (« private company limited by shares ») est propriétaire de biens immobiliers dans le Sud de la France, qu’elle met à la disposition gratuite de ses associés.

A l’issue d’une vérification portant sur les exercices 2016 à 2018, l’Administration a considéré que cette société britannique était passible de l’IS en France, à raison des recettes locatives qu’elle avait renoncé à percevoir de ses associés (renonciation constitutive d’un acte anormal de gestion).

La décision de la CAA de Marseille

Pour mémoire, le juge de l’impôt a dégagé une grille d’analyse applicable aux personnes morales étrangères propriétaires d’immeubles en France, pour l’application des dispositions de l’article 206 du CGI.

Il examine, en premier lieu, si les caractéristiques de cette personne morale permettent de l’assimiler à une société française de capitaux, qui serait passible de l’IS à raison de sa seule forme. Si tel n’est pas le cas, alors l’assujettissement à l’IS n’est possible que si la société étrangère se livre à une exploitation lucrative (voir notamment, CE, 24 mai 2006, n°278737, Sté Immobilière Saint-Charles, CE, 27 janvier 2013, n°354994, Ets Poudix, plus récemment, CE, 2 avril 2021, n°427880, Sté World Investment Corporation).

Dans ce cadre, la CAA de Marseille rappelle d’abord que, saisi d’un litige portant sur le traitement fiscal d’une opération impliquant une société de droit étranger, le juge de l’impôt doit identifier au regard de l’ensemble des caractéristiques de cette société et du droit qui en régit la constitution et le fonctionnement, le type de société de droit français auquel la société de droit étranger est assimilable, afin de déterminer le régime applicable à l’opération par la loi fiscale française (méthode dite de « l’assimilation », élaborée par le Conseil d’État dans sa décision du 24 novembre 2014, n°363556, Sté Artémis, assimilation d’un « General Partnership » constitué au Delaware à une société de personnes française).

La Cour se livre ensuite à cet exercice d’assimilation.

Elle relève que la société britannique, constituée sous la forme d’une « private company limited by shares », inscrite au RCS, est une société dans laquelle la responsabilité des associés est limitée au montant de leurs apports, assimilable à une SARL de droit français.

Aussi, et en l’absence d’option pour le régime des sociétés de personnes, la société britannique doit être regardée comme une société passible de l’IS à raison de sa forme sociale en application du 1 de l’article 206 du CGI, sans qu’il soit donc nécessaire d’examiner le critère tenant au caractère lucratif de son activité.

La CAA de Marseille prend également le soin de rappeler que la circonstance que le droit étranger en cause ne prévoirait pas de structure comparable aux types de sociétés de droit français mentionnés à l’article 8 du CGI est sans incidence (solution dégagée par le Conseil d’Etat dans une décision relative à une société de droit suisse, CE, 22 juillet 2022, n°444942, Sté Phoenix Union Co).

Elle confirme donc la taxation à l’IS en France de la société britannique à raison des revenus locatifs qu’elle aurait pu tirer des biens immobiliers durant la période d’occupation gratuite par ses associés, après avoir rappelé que la circonstance qu’une renonciation à recettes par une société de capitaux au bénéfice de ses associés serait conforme à son objet social n’est pas, à elle seule, de nature à faire regarder cette renonciation comme étant dans l’intérêt propre de cette entreprise.

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