Revenant sur la définition retenue par la CAA de Paris, le Conseil d’Etat juge que doit être regardée comme une subvention publique au regard du CIR « toute aide versée à raison d’opérations ouvrant droit au CIR par une personne morale de droit public ».
Cette définition très claire est bienvenue, et permettra aux entreprises de recentrer l’analyse des subventions et avances remboursables à déduire du CIR aux seules subventions versées par des personnes morales de droit public.
Rappel
Les subventions publiques reçues par les entreprises à raison des opérations ouvrant droit au CIR viennent en déduction des bases de calcul de celui-ci, qu’elles soient définitivement acquises par elles ou remboursables (CGI, art. 244 quater B, III).
La notion de subvention publique au regard du CIR n’est toutefois définie ni par la loi, ni par la doctrine administrative.
Quelques décisions des juges du fond se sont prononcées sur certaines aides :
- qualification de subventions publiques du prêt à taux zéro innovation (PTZI) octroyé par Oséo – CAA Marseille, 17 janvier 2019, n°17MA00208
- des subventions versées par l’ANRT au titre de l’emploi des doctorants « CIFRE » – CAA Versailles, 6 novembre 2014, n°13VE01842, Sté Microelectronics
- une aide à la recherche accordée par la Direction des études et recherches d’EDF avant sa privatisation – CAA Nantes 4 décembre 2006, n°04-1271, SA Delta Dore
Mais rien qui ne donne une définition claire et commune des subventions publiques au regard du CIR.
L’histoire
L’Institut technologique Forêt Cellulose Bois – Construction Ameublement (FCBA), organisme privé chargé d’une mission de service public en qualité de centre technique industriel en charge des secteurs de la forêt, du bois, de la cellulose et de l’ameublement, a pour mission de promouvoir le progrès technique et de participer à l’amélioration du rendement et à la garantie de la qualité du bois dans l’industrie.
Un litige s’est noué devant l’Administration, puis devant le juge de l’impôt, portant sur le point de savoir si les aides que l’Institut avait reçues (i) du Comité professionnel de Développement des Industries Françaises de l’Ameublement du Bois (CODIFAB) et (ii) de l’interprofession nationale France Bois Forêt (FBF) présentaient le caractère de subventions publiques devant être déduites de l’assiette du CIR de l’Institut.
La CAA de Paris a, à cette occasion, précisé la notion de « subvention publique » au regard du CIR (CAA Paris 8 février, n°19PA01989, Institut Forêt Cellulose Bois-Construction Ameublement).
Elle a ainsi jugé qu’en l’absence de définition légale, doit être regardée comme constituant une subvention publique « toute aide, versée en vue ou en contrepartie d’un projet de recherche, provenant de l’utilisation de ressources perçues à titre obligatoire et sans contrepartie, que ces aides soient versées par une autorité administrative ou un organisme privé investi d’une mission de service public ».
Dans ses conclusions sous la décision, le rapporteur public indiquait que le critère fondamental de la subvention publique au regard du CIR n’était pas la nature publique ou privée de l’entité qui accorde la subvention, mais la nature publique ou privée des fonds alimentant la subvention ainsi accordée.
La CAA de Paris a ensuite conclu que présentaient cette nature :
- l’aide versée par le CODIFAB, organisme de statut privé placé sous le contrôle de l’Etat et investi d’une mission de service public, qui recouvre et gère de manière autonome des fonds collectés au titre d’une taxe parafiscale auprès des fabricants établis en France et des importateurs des produits du secteur de l’ameublement, dès lors que cette taxe présente un caractère obligatoire et sans contrepartie pour ces acteurs du secteur qui en sont les redevables ;
- la contribution volontaire obligatoire collectée par l’interprofession nationale FBF auprès de ses membres, sans contrepartie pour ceux-ci qui en sont les redevables, la charge étant supportée par les clients de la filière.
L’Institut a formé un pourvoi contre cette décision.
La décision du Conseil d’Etat
Précisons, à titre liminaire, que le pourvoi n’a été admis que s’agissant de la qualification des aides versées par l’interprofession nationale FBF (Conseil d’Etat, 20 février 2023, n°463363). Divers organismes interprofessionnels effectuant ou finançant des opérations de recherche grâce aux produits des contributions volontaires obligatoires qu’ils perçoivent, notamment l’interprofession nationale FBF, ont formulé des demandes d’intervention qui ont été admises.
Le Conseil d’Etat revient, en premier lieu, sur la définition de « subvention publique » au regard du CIR retenue par la CAA de Paris, pour lui substituer une définition plus claire, à savoir « toute aide versée à raison d’opérations ouvrant droit au CIR par une personne morale de droit public ».
Il juge ensuite que tel n’était pas le cas des aides versées par l’organisation interprofessionnelle FBF, association à but non lucratif régie par la loi du 1er juillet 1901 – de sorte que les aides litigieuses n’avaient pas à être déduites par le requérant pour la détermination de son CIR.