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Crédit d’impôt recherche : quel quantum retenir pour la déduction des subventions ?

La Cour administrative d’appel de Lyon juge qu’une subvention doit être déduite intégralement de l’assiette du CIR lorsque le projet financé est éligible au CIR, peu important que certains coûts financés par cette subvention ne soient pas éligibles au CIR. Cette solution, qui peut conduire à générer un CIR négatif, est selon nous en contradiction avec le dispositif et la jurisprudence du Conseil d’Etat. 

Cet article est une synthèse de notre analyse parue dans la Revue de Droit Fiscal, n° 11 du 14 mars 2024. N’hésitez pas à consulter l’article complet ou nous contacter pour plus d’informations.

Rappel des principes

Le Crédit d’Impôt Recherche (CIR) est encadré par des mécanismes visant à empêcher un double financement des mêmes dépenses de R&D (CGI, art. 244 quater B, III).

En particulier, les subventions publiques doivent être déduites des dépenses éligibles au CIR :

« Les subventions publiques reçues par les entreprises à raison des opérations ouvrant droit au crédit d’impôt sont déduites des bases de calcul de ce crédit, qu’elles soient définitivement acquises par elles ou remboursables. »

Cette déduction ne doit cependant pas être totale. Seules les subventions publiques reçues « à raison des opérations ouvrant droit au CIR » doivent être déduites. Mais les textes ne détaillent ni le sens de cette expression, ni la méthode de calcul du ratio de subvention à déduire.

L’histoire

La société MGDC avait reçu une subvention dans le cadre du programme Nano 2012. La subvention finançait à la fois des coûts éligibles au CIR (coûts des chercheurs) et non éligibles (frais de gestion, sous-traitance). La société n’avait déduit que la partie de la subvention correspondant aux coûts éligibles au CIR.

La Cour administrative d’appel de Lyon a jugé que la subvention devait être intégralement déduite de la base de calcul du CIR, même si toutes les dépenses couvertes n’étaient pas éligibles au CIR.

En d’autres termes, la Cour juge qu’une opération ouvrant droit au CIR doit être entendue comme une opération de recherche éligible scientifiquement au CIR, peu important l’ouverture de droits financiers au CIR.

Commentaire

L’interprétation de la Cour administrative d’appel de Lyon ouvre, selon nous, la voie à un risque de CIR négatif (en cas de subvention à déduire supérieure aux coûts éligibles au CIR) ce qui serait non seulement contraire à l’esprit du dispositif, mais également à la jurisprudence du Conseil d’État. En effet, dans son arrêt du 9 septembre 2020 (CE, 8e et 3e ch., 9 sept. 2020, n° 440523, S Takima), le Conseil d’État a jugé, dans le cadre du second mécanisme empêchant la double prise en compte des mêmes dépenses de recherche prévu par l’article 244 quater B, III du CGI, qu’il ne pouvait pas être généré de CIR négatif.

L’approche retenue par la Cour administrative d’appel de Lyon annulerait l’incitatif fiscal et pourrait entraîner un remboursement d’un crédit d’impôt non perçu !

L’éligibilité partielle d’un projet de recherche devrait conduire à une déduction partielle de la subvention afférente

À supposer que la notion de subvention reçue à raison d’opérations ouvrant droit au CIR doive s’analyser exclusivement à l’aune des opérations de R&D financées, l’analyse des subventions reçues devrait être positionnée au même niveau que celle de l’éligibilité CIR, en d’autres termes au niveau des opérations de recherche financées et non pas au niveau global du projet subventionné.

Si la subvention finance un projet comprenant plusieurs lots, opérations, et que seuls certains sont éligibles scientifiquement, alors l’entreprise devrait pouvoir exclure la part de la subvention finançant les lots non éligibles. Corrélativement les travaux sur ces lots ne devraient pas être retenus au CIR.

En prenant l’hypothèse que la subvention Nano finance un lot « recherche sur les nanoconducteurs », pour 90 % de son montant, un lot « dissémination de la recherche auprès des écoles » pour 5 % et un lot « coordination des différents partenaires européens » pour 5 %, ces deux derniers lots étant non éligibles scientifiquement, alors seul 90 % du montant de la subvention devrait être déduit de l’assiette du CIR.

Le simple fait qu’un projet de recherche comporte des opérations éligibles et non éligibles devrait conduire à accepter une déduction partielle des subventions du projet en question.

Une déduction des subventions plafonnée ?

La Cour administrative d’appel de Lyon a jugé que la subvention doit être déduite de l’assiette du CIR l’année de son versement.

Depuis 2014, l’Administration prévoit un plafonnement de la déduction de la subvention aux coûts éligibles engagés sur l’opération de R&D. Ce plafonnement évite tout CIR négatif (BOI-BIC-RICI-10-10-30-20, n°10).

Cependant, la doctrine n’est opposable qu’aux rehaussements d’imposition. Les sociétés en demande de remboursement ne peuvent pas s’en prévaloir. En d’autres termes, les sociétés en demande de remboursement de CIR ne peuvent pas pratiquer l’étalement / le plafonnement des subventions reçues au montant des dépenses de recherche engagées, mais doivent déduire l’intégralité de la subvention l’année de son versement.

Un changement législatif nous semble nécessaire afin de garantir à tous les contribuables d’utiliser la doctrine administrative avec la même efficacité.

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