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Délais de paiement : l’ambition renouvelée de la Commission européenne pour lutter contre les retards

Photo de la Commission Européenne

A l’initiative du Commissaire européen au Marché intérieur, Thierry Breton, la Commission européenne a dévoilé le 12 septembre 2023 une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil de l’Union européenne « concernant la lutte contre les retards de paiement dans les transactions commerciales ».

Selon les termes mêmes du Commissaire européen, ce règlement s’inscrit dans un plan plus global dont l’objectif est de « simplifier la vie » des PME qu’il considère comme étant « l’écosystème économique le plus important de l’ensemble du marché intérieur ».

Les constats de la Commission européenne

Selon la Commission, 25 % des faillites dans l’Union européenne seraient dues aux retards de paiement, renforçant en particulier la dépendance des PME à l’égard des autres opérateurs économiques sur le marché. L’objectif de la Commission est donc d’encadrer de manière plus énergique les délais de paiement au sein de l’Union européenne pour l’ensemble des acteurs économiques.

Elle constate également que beaucoup de grandes entreprises font figure de mauvais élèves dans la lutte contre les paiements abusivement tardifs (constat identique à celui posé en France par l’Observatoire des délais de paiement dans son rapport annuel 2022).

Les remèdes proposés  

Face à ces constats, le projet de règlement propose une mise à jour de la directive 2011/7/UE sur les retards de paiement, dont « l’harmonisation a été un véritable cauchemar », selon Thierry Breton.

 Face à l’échec de la mise en œuvre de cette directive, la Commission a opté pour un règlement dont le projet constitue un durcissement visant à réduire concrètement les délais de paiement dans l’Union Européenne. Grâce à cet outil, la Commission entend passer par une application directe des mesures envisagées, là où une directive aurait nécessité une transposition par les autorités nationales.

La législation actuelle ne prévoyant pas « de mesures préventives suffisantes et de mesures dissuasives appropriées», les principaux changements proposés sont les suivants :
 

  1. l’interdiction des paiements supérieurs à 30 jours et la suppression de l’exception à ce délai pour les soins de santé et les pouvoirs publics exerçant une activité économique. Selon Thierry Breton, des délais rallongés pourraient être prévus en cas de discussions avec les États membres, mais « en tout état de cause ces délais seront désormais encadrés par la loi» ;
  2. l’obligation pour les cocontractants principaux, dans le cadre des marchés publics, d’apporter la preuve du paiement de leurs sous-traitants directs afin de favoriser le paiement des sous-traitants en aval et de limiter la rétention de trésorerie ;
  3. l’augmentation des taux d’intérêts de retard (+ 8 points par rapport au taux de la BCE) et de l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement (qui passe de 40 à 50 euros afin de prendre en compte l’inflation), en précisant que ces frais seront automatiquement dus pour chaque facture payée en retard;
  4. la nullité de plein droit des clauses contractuelles et pratiques visant:
    1. à la fixation d’un délai de paiement différent du délai de 30 jours fixé par le règlement ;
    2. à l’exclusion ou à la limitation des intérêts de retard ou des frais de recouvrement ;
    3. à la prolongation de la durée de la procédure de vérification ou d’acceptation de la facture au-delà de la durée de 30 jours fixée par le règlement ;
    4. à retarder ou à empêcher intentionnellement l’envoi de la facture ;
  5. la mise en place d’autorités nationales chargées de veiller à l’application des règles et de sanctionner les entreprises ne respectant pas la réglementation relative aux délais de paiement.

Le dispositif sera initialement déployé pour une durée d’au moins 4 ans avec un objectif de réduction de 35 % de la proportion d’entreprises déclarant des retards de paiement

Ce projet sera soumis et approuvé par le Parlement européen puis par une majorité qualifiée de gouvernements des Etats membres au sein du Conseil de l’Union européenne.  Les dispositions présentées par la Commission sont donc susceptibles d’évoluer, et nous suivrons de près toute modification apportée.

Une fois adoptées par le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne, les nouvelles règles deviendront applicables un an après l’entrée en vigueur du règlement, afin de permettre aux acteurs concernés (par exemple les pouvoirs publics et les entreprises) de prendre les mesures nécessaires pour s’y conformer.

En l’état de rédaction du projet, on relèvera que les transactions commerciales effectuées après la date d’application du règlement seront soumises aux dispositions du règlement, même si le contrat correspondant a été conclu avant cette date.

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