La Commission européenne a dévoilé, le 12 septembre, 2 projets de Directives, relatives, respectivement, à l’initiative « BEFIT » et à une harmonisation des règles prix de transfert au sein de l’UE.
Ces projets sont soumis à l’approbation unanime des 27 Etats membres.
Si adoptées, ces nouvelles règles seraient applicables à compter du 1er juillet 2028 en ce qui concerne « BEFIT » et à compter du 1er janvier 2026 pour les règles prix de transfert.
Proposition de Directive BEFIT
La proposition de Directive dite « BEFIT » (Business in Europe : Framework for income taxation), vise à instaurer un nouveau cadre pour la fiscalité des entreprises dans l’UE, avec un corpus réglementaire unique en matière d’impôt sur les sociétés, reposant sur une assiette commune et une méthode de répartition forfaitaire des résultats, qui se substituerait à la précédente proposition « ACCIS ».
Pour mémoire, la Commission européenne avait présenté des premiers éléments sur les contours possibles de « BEFIT » à l’automne 2022, qu’elle avait soumis à consultation publique, suggérant, pour chaque point clef, 2 options. Le projet de directive publié le 12 septembre prend en compte les principales tendances ressortant de cette consultation.
En synthèse, ce projet prévoit une consolidation fiscale obligatoire pour les grands groupes internationaux, regroupant les entités localisées au sein de l’UE et détenues à plus de 75 %. Le résultat imposable du groupe serait déterminé à partir du résultat en normes consolidées de chacune des entités membres, avant d’être soumis à de nombreux ajustements, puis une quote-part de ce résultat fiscal serait allouée à chacune des entités membres du groupe BEFIT selon une clef spécifique, afin de donner lieu au paiement de l’IS dans chacun des EM de l’UE.
La directive « BEFIT » devrait être transposée par les Etats membres de l’UE avant le 1er janvier 2028, pour une application à compter du 1er juillet 2028 (art. 78).
Vous trouverez ci-après les principaux éléments du projet de directive :
Champ d’application (art. 2)
La directive s’appliquerait de façon différenciée selon la taille des groupes :
- Application obligatoire pour les groupes dont la société mère ultime est résidente dans un pays de l’UE réalisant un chiffre d’affaires consolidé d’au moins 750 m€ (au titre d’au moins 2 exercices sur les 4 derniers – seuil similaire à la Directive Pilier 2), mais seulement à raison des entités/ES du groupe établis au sein de l’UE et détenus à au moins 75 % par l’entité mère ultime ( 5).
- Application obligatoire pour les groupes dont la société mère ultime est résidente dans un pays hors de l’UE réalisant un chiffre d’affaires consolidé d’au moins 750 m€ (au titre d’au moins 2 exercices sur les 4 derniers – seuil similaire à la Directive Pilier 2), seulement à raison des entités du groupe établies au sein de l’UE et détenues à au moins 75 % par l’entité mère ultime et à condition que le chiffre d’affaires réalisé par les entités/ES du groupe établis dans l’UE soit au moins égal à 50 m€ (au titre au moins de 2 exercices sur les 4 derniers) OU représente plus de 5 % du chiffre d’affaires total du groupe au niveau mondial.
- Application sur option aux groupes de taille inférieure aux seuils sous réserve d’établir des états financiers consolidés.
On notera qu’aucune exonération sectorielle n’est prévue par le projet de texte.
Calcul de l’assiette imposable
Chaque entité (et établissement stable) localisée dans un EM et détenue, de façon directe ou indirecte, de façon continue au cours de l’exercice, à plus de 75 % par un groupe dans le champ d’application BEFIT fait partie de ce groupe BEFIT.
Le résultat fiscal de chaque entité/ES membre du groupe BEFIT est déterminé à partir de son résultat issu des états financiers comptables (norme comptable identique autorisée au sein de l’UE), auxquels seraient apportés un certain nombre d’ajustements (art. 8 à 21).
Au titre des ajustements on retiendra :
- A raison des titres détenus depuis plus de 12 moins et à hauteur de plus de 10 %, il conviendra d’ajuster 95 % des dividendes, 95 % des PV et MV, la variation de juste valeur de titres ;
- Les résultats des ES ;
- Les charges financières nettes excédant les règles ATAD 1 ;
- Les revenus de transport maritime soumis à la taxe au tonnage ;
- Les amendes et pénalités ;
- L’impôt comptabilisé (impôt courant, impôt différé, Top-Up Tax, QDMTT) ;
- Des règles standardisées sont prévues au titre des amortissements (amortissement linéaire, durée d’usage avec des durées fixées pour certains biens (ex. 28 ans pour l’immobilier), base amortissable, titulaire de l’amortissement…) ( 22 à 28) ;
- Des règles spécifiques sont prévues au titre des stocks, des provisions pour risques et charges, des provisions pour dépréciations de créances, des revenus des contrats à long termes, des opérations de couverture, etc.
Le projet de directive prévoit des règles adaptées pour les réorganisations de groupe (art. 34 à 41).
Allocation de l’assiette imposable entre les différents Etats membres
Le résultat fiscal du groupe aux bornes de l’UE serait ainsi composé de la somme des résultats fiscaux des différentes entités du Groupe. De la sorte, les pertes fiscales des membres du groupe BEFIT seraient imputables sur les bénéfices des autres membres du même groupe (possible consolidation des pertes transfrontières).
Des modalités spécifiques de calcul seraient prévues pour les activités extractives, les activités de transport maritime non couvertes par un régime de taxe au tonnage et les activités de transport aérien ou fluvial (art. 46 et 47).
- Lorsque le résultat fiscal BEFIT de l’ensemble du groupe est positif, il serait réparti entre les différents Etats membres selon une formule de calcul spécifique (voir ci-après).
- Lorsque le résultat fiscal BEFIT de l’ensemble du groupe est négatif, la perte fiscale serait reportable au titre des exercices suivants sans limitation de durée ni de montant sur le résultat fiscal BEFIT du groupe ( 42).
Cette « assiette imposable » BEFIT serait ensuite répartie entre chacun des membres du groupe BEFIT, selon une clef d’allocation proportionnelle au résultat fiscal de l’entité par rapport au résultat fiscal BEFIT du groupe.
La clef d’allocation actuellement prévue par le texte aurait vocation à s’appliquer de manière temporaire, l’objectif étant, à terme, de la remplacer par une formule de calcul plus élaborée.
Ainsi, à titre transitoire, pour les exercices ouverts entre le 1er juillet 2028 et le 30 juin 2035, l’allocation serait déterminée sur la base de la moyenne des résultats imposables de l’entité considérée au titre des 3 exercices précédents/moyenne du résultat imposable du groupe BEFIT au titre des 3 exercices précédents x 100 (art. 45).
Au titre des 3 premières années d’application des règles BEFIT, les résultats fiscaux pris en compte sont en partie ceux issus de l’application des règles fiscales nationales, en partie ceux issus des règles BEFIT. A compter de la 4ème année, seuls les résultats fiscaux BEFIT sont pris en compte.
L’assiette imposable attribuée à une entité du groupe BEFIT ferait ensuite l’objet d’ajustements supplémentaires (art. 48).
Volet déclaratif
Un système de « one stop shop » permettra aux groupes de ne s’adresser qu’à une seule autorité fiscale au sein de l’UE pour remplir leurs obligations déclaratives (art. 57).
Les Etats membres conserveront néanmoins le droit de diligenter leur propres contrôles fiscaux (art. 65).
Pénalités (art. 72)
Les pénalités applicables sont laissées à la discrétion des Etats membres, pourvu qu’elles soient efficaces proportionnées et dissuasives.
Proposition de Directive sur les règles Prix de Transfert au sein de l’UE
La Commission européenne a également dévoilé, le 12 septembre, une proposition de Directive afin d’harmoniser les règles de Prix de Transfert au sein de l’UE et de s’assurer d’une approche harmonisée des sujets de prix de transfert.