L’Administration vient de publier les projets de BOFIP relatifs à la réforme des règles de TVA applicables aux opérations du commerce électronique (en vigueur au 1er juillet 2021), lesquels font l’objet d’une consultation publique jusqu’au 13 octobre 2021.
Ces commentaires étaient attendus. Les nouveaux régimes ne s’appréhendent pas facilement et de nombreuses situations sont impactées.
Les projets abordent principalement les sujets suivants :
- Le champ d’application de la réforme ( 256 II bis et 256 V 2° du CGI). Le projet de BOI-TVA-CHAMP-10-10-40-60 reprend les principaux concepts et les illustre par des cas pratiques. Il s’agit principalement : des ventes à distance intracommunautaires de biens ; des ventes à distance de biens importés (que l’administration scinde en ventes « directes » et « indirectes », selon qu’elles sont importées et vendues dans le même Etat membre ou non) ; de la notion d’interface électronique « facilitatrice » en ce compris les cas dans lesquels cette dernière est redevable de la TVA car réputée « acheter et revendre » les biens pour les seuls besoins de la TVA ; de la nature des biens concernés par la réforme ; enfin, des qualité, lieu d’établissement et modalités de livraison aux acquéreurs concernés pour qualifier les opérations visées.
- La territorialité de la TVA ( 258 IV, 258 A, du CGI). Ces règles sont exposées et récapitulées dans un tableau de synthèse figurant au projet de BOI-TVA-CHAMP-20-20-30. A titre de rappel, le système aboutit en principe à une taxation en France lorsque le client qui reçoit les biens ou acquiert le service y réside. Il y a de nombreuses spécificités, notamment dans le cadre des ventes à distance de biens importés. En outre, lorsqu’une interface électronique « facilite » une opération et est réputée acheter et revendre un bien, il est généralement considéré que le transport est imputé à la revente effectuée par l’interface électronique. Cela aboutit généralement à ne pas collecter la TVA sur la vente réputée exister entre le vendeur et l’interface électronique.
- Les règles liées au fait générateur et à l’exigibilité de la TVA ( 269, 1-a sexies et 2-a D, 298 sexdecies H, I-D du CGI). Le projet de BOI-TVA-BASE-20-40 reprend brièvement les situations spécifiques dans lesquelles le fait générateur et l’exigibilité ont lieu au moment de l’acceptation du paiement par le client, contrairement aux règles de droit commun (cas d’une interface électronique « facilitatrice » réputée acheter et revendre les biens et de l’utilisation du guichet « IOSS » – cf. ci-dessous).
- Les incidences sur le taux de TVA ( 278 et 298 sexdecies I, II 2° du CGI). Le projet de BOI-TVA-LIQ-20-10 expose le cas très spécifique d’une option pour une procédure de dédouanement, lorsque le système du guichet unique « IOSS » n’est pas utilisé (cf. ci-dessous), qui prévoit l’application du taux de droit de commun de 20% à l’importation d’un bien, quelle que soit sa nature.
- Les incidences sur le droit à déduction de la TVA d’importation supportée à la douane. Le projet de BOI-TVA-DED-10-20 fait le point sur la possibilité de déduire ou non la TVA supportée à la douane, selon la qualification de l’opération d’importation, la valeur intrinsèque des envois, la présence ou non d’une interface électronique « facilitatrice », le destinataire de la marchandise noté sur les documents douaniers, etc. Un tableau récapitulatif des situations permet d’y voir plus clair. Il convient de noter une spécificité française : dans le cas d’une vente à distance d’un bien importé dont la valeur intrinsèque excède 150 € via une interface électronique « facilitatrice », cette dernière peut être redevable de la TVA à l’importation, sans pouvoir la récupérer auprès du Trésor français.
- Les obligations déclaratives et de paiement ( 293 A, 298 sexdecies F, G et H du CGI). Trois projets de BOFiP couvrent cette thématique centrale (BOI-TVA-DECLA-10-30, BOI-TVA-DECLA-20-20-60-10, BOI-TVA-DECLA-20-20-60-20). Sont exposées : la désignation du redevable de la TVA, selon la nature de l’opération (notamment les cas où la TVA sur la vente ou l’importation est due par l’interface électronique « facilitatrice ») ainsi que les conditions d’utilisation des différents guichets uniques (« one stop shop » ou « OSS »). Nous rappelons qu’il y a trois systèmes : le guichet pour les prestataires non-établis dans l’UE qui rendent des services taxables dans l’UE à des particuliers (guichet « non UE »), le guichet pour les ventes à distance intracommunautaires de biens, les ventes domestiques effectuées par des opérateurs établis en dehors de l’UE et « facilitées » par une interface électronique réputée acheter et revendre les biens, ainsi que les services rendus par des sociétés UE taxables dans un autre Etat-membre (guichet « UE ») et le guichet spécifiquement mis en place pour les ventes à distances de biens importés dont la valeur intrinsèque n’excède pas 150 € (« Import One Stop Shop – IOSS). Il convient de noter que l’utilisation de l’IOSS nécessite la désignation d’un « intermédiaire » lorsque le vendeur est établi en dehors de l’UE et de la Norvège. En outre, l’utilisation de l’IOSS permet d’exonérer de TVA due à l’importation les biens importés (la TVA étant due sur la vente au client).
- Les obligations liées à la tenue des registres liés aux opérations du commerce électronique pour les opérateurs se prévalant d’un OSS (BOI-TVA-DECLA-30-10-15) et les mesures de simplification qui en découlent en matière de facturation (BOI-TVA-DECLA-30-20-10-10).
De nombreux autres BOI existants sont « liés » au nouveau régime.
Les opérateurs ont jusqu’au 13 octobre pour remonter leurs commentaires signés, par courriel, à l’Administration. En attendant, les projets de BOFIP sont opposables à l’Administration.