Par un revirement de jurisprudence, la CAA de Paris juge que pour déterminer le dirigeant responsable solidairement au titre de la pénalité de l’article 1759 du CGI, il convient de se placer, à défaut de date connue du versement des revenus réputés distribués, à la date de dépôt de la déclaration réelle des résultats de la société, même si ce dépôt est tardif.
Pour mémoire, les sociétés soumises à l’IS qui distribuent ou versent des revenus non déclarés à des personnes dont l’identité n’est pas révélée sont soumises à une amende égale à 100 % des sommes distribuées ou versées (CGI, art. 1759). Les dirigeants sociaux sont, à la date du versement de ces revenus, ou à défaut de connaissance de cette date, à la date de la déclaration des résultats de l’exercice au cours duquel ces distributions ou versements sont intervenus, solidairement tenus au paiement de cette amende (CGI, art. 1754).
En l’espèce, à l’issue d’une vérification de comptabilité portant sur l’exercice 2012, les sommes correspondant aux montants rectifiés ont été regardées par l’administration fiscale comme des revenus distribués par la société. Celle-ci a donc demandé que soit désignée l’identité des bénéficiaires (CGI, art 117). En l’absence de réponse par la société vérifiée dans le délai imparti, l’administration fiscale lui a infligé la pénalité de 100 % prévue par l’article 1759 du CGI. Par suite, le gérant de la société, en fonction jusqu’au 13 mai 2013, est recherché en paiement de cette pénalité en sa qualité de dirigeant solidaire.
Le dirigeant conteste l’obligation de paiement de cette pénalité en lieu et place de la société. À ce titre, il soutient qu’il n’était plus le gérant en fonction à la date du dépôt (tardif) de la déclaration de résultat de l’exercice 2012, soit le 3 octobre 2013.
Alors que sa demande est rejetée devant le TA de Melun, il relève appel du jugement.
Pour trancher l’affaire, la CAA de Paris juge que la date à retenir pour déterminer l’identité du dirigeant solidaire n’est pas la date légale (théorique) de souscription de la déclaration du résultat de l’exercice au cours duquel les distributions ont été effectuées (soit le 3 mai 2013 pour les exercices clos le 31 décembre 2012 – cf. CGI art. 223), mais la date effective (réelle) du dépôt de cette déclaration de résultat. Elle conclut qu’en l’espèce, l’ex-gérant ne pouvait pas être tenu solidairement responsable du paiement de l’amende fiscale prévue par les dispositions de l’article 1759 du CGI, dès lors qu’à la date à laquelle la société a déposé sa déclaration de résultats relative à l’exercice clos en 2012 (soit le 3 octobre 2013) il n’était plus en fonction.
Antérieurement, dans une situation semblable, la CAA de Paris avait pourtant considéré que seule la date limite légalement fixée pour le dépôt de la déclaration de résultat, en application de l’article 223 du CGI, devait être prise en compte, peu importe la date de dépôt réel et tardif de cette déclaration du résultat (CAA Paris, 6 juin 2017, n°16PA02979). Elle avait ainsi semble-t-il repris la jurisprudence selon laquelle en l’absence de souscription d’une déclaration, c’est la date légale limite de déclaration de résultat qui doit être retenue (CAA Lyon, 9 octobre 2012, n°11LY02388, Neyrinck) – aucune autre date ne pouvant en effet être prise en compte.
Elle a désormais revu sa position, comme l’y invitaient les conclusions du rapporteur public, Olivier Lemaire, sous la décision.