Par le biais d’une réponse ministérielle, l’Administration vient tempérer la portée d’une récente décision du Conseil d’Etat et préciser les conditions dans lesquelles les dirigeants de sociétés commerciales sont personnellement tenus de déclarer les comptes étrangers de ces sociétés.
Eléments de contexte
Pour mémoire, les personnes physiques, les associations et les sociétés n’ayant pas une forme commerciale, domiciliées ou établies en France, sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des comptes bancaires ouverts, détenus, utilisés ou clos à l’étranger (CGI, art. 1649 A, al. 2).
L’Administration a précisé – en ligne avec les dispositions de l’article 344 A de l’annexe III au CGI – que cette obligation déclarative concernait non seulement les contribuables titulaires d’un compte bancaire étranger, mais également ceux qui sont bénéficiaires d’une procuration sur un tel compte (BOI-CF-CPF-30-20, n°10, 8 mars 2017).
Le défaut de déclaration est notamment sanctionné par l’application d’une amende forfaitaire d’un montant de 1 500 € (pouvant être porté à 10 000 € lorsque le compte est situé dans un Etat n’ayant pas conclu avec la France une convention d’assistance administrative permettant l’accès aux renseignements bancaires). Surtout, les sommes, titres ou valeurs transférés à l’étranger ou en provenance de l’étranger par l’intermédiaire d’un compte bancaire non déclaré, constituent, sauf preuve contraire, des revenus imposables en France.
Dans un arrêt daté du 8 mars 2023, le Conseil d’Etat a jugé qu’entre dans le champ de l’obligation déclarative de l’article 1649 A du CGI tout compte bancaire ouvert, utilisé ou clos à l’étranger par une personne physique, une association ou une société n’ayant pas une forme commerciale, domiciliée ou établie en France, quel que soit le titulaire de ce compte, y compris notamment si ce titulaire est une société commerciale (décision n°463267). Précisons qu’au cas d’espèce, le contribuable était associé à 50 % de ladite société, avait tout pouvoir sur le compte bancaire qu’elle avait ouvert en Lettonie, et que ce compte avait été débité sur son ordre.
Cette décision a toutefois fait naître un certain trouble auprès des dirigeants et administrateurs de sociétés françaises et étrangères disposant de comptes hors de France, qui se sont inquiétés de devoir déclarer les comptes, souvent très nombreux, des sociétés dont ils sont mandataires en leur qualité de dirigeants et dont ils font un usage exclusivement professionnel.
C’est dans ce contexte qu’un sénateur a interrogé le ministre de l’Économie et des finances.
Les précisions apportées
Le Ministre rappelle que les dispositions de l’article 1649 A du CGI visent à couvrir tous les cas de de détention de comptes à l’étranger, y compris le cas des contribuables bénéficiaires effectifs de comptes dont la propriété réelle est dissimulée derrière des artifices juridiques.
Ainsi, si le contexte conduit à considérer un dirigeant ou un administrateur comme bénéficiaire ou ayant droit économique de comptes dont la détention est masquée, par exemple, au moyen d’un prête-nom ou d’une structure écran, ceux-ci se trouvent soumis à l’obligation déclarative. Il en va de même pour les cas où l’associé ou dirigeant d’une entité établie hors de France qui, alors même que cette dernière aurait une activité réelle, effectue des opérations sur le compte de cette entité pour son propre compte.
A contrario, le seul fait pour une personne de détenir une participation dans une société étrangère ou d’en être le dirigeant ne le fait pas entrer dans le champ de l’obligation déclarative.