Le transfert temporaire des titres d’une filiale française dans le cadre du régime néerlandais de la certification de titres rompt l’engagement de conservation conditionnant le bénéfice de l’exonération de RAS prévue à l’article 119 ter du CGI.
Rappel
En principe, les dividendes de source française versés à des personnes physiques ou morales non-résidentes sont soumis en France à une RAS dont le taux correspond au taux normal de l’IS (CGI, art 119 bis et 187 – 26,5 % en 2021).
Cela étant, les dividendes versés par une société française à une société mère européenne sont exonérés de cette retenue à la source, sous réserve du respect d’un certain nombre de conditions (CGI, art. 119 ter). Il faut notamment que la société bénéficiaire des distributions détienne directement et de manière ininterrompue depuis au moins 2 ans (ou qu’elle prenne un tel engagement de conservation) au moins 10 % du capital de la société distributrice.
L’histoire
En juin 2006, une société belge acquiert la quasi-totalité des titres composant le capital d’une société française. En juin 2007, la filiale française procède à une distribution de dividendes à son actionnaire belge et ne prélève pas de retenue à la source.
Quelques semaines à peine après la distribution, la société belge transfère de manière temporaire les titres de sa filiale française, selon le régime néerlandais de la certification de titres, à une fondation établie aux Pays-Bas (opération effectuée, ainsi que l’indiquent les conclusions du rapporteur public, aux fins de faire échec à une OPA hostile lancée par un groupe concurrent).
Ce régime, qui semble proche de celui de la fiducie ou du trust, prévoit un transfert de la pleine propriété juridique des titres à l’administrateur, et des droits de vote leur étant attachés. En contrepartie, l’actionnaire reçoit des certificats, qui lui permettent de conserver le droit aux dividendes.
L’Administration a considéré que ce transfert interrompait l’engagement de conservation de 2 ans, et a remis en cause le bénéfice de l’exonération de retenue à la source sur les dividendes versés de la société française à son actionnaire belge.
La décision du CE
Confortant les décisions retenues par les juges du fond, le Conseil d’État juge que le transfert de la pleine propriété des titres, ainsi que des droits de vote leur étant attachés, doit être regardé comme interrompant le délai de détention de 2 ans, peu important que la société belge soit demeurée le bénéficiaire effectif des dividendes.
Cette solution est cohérente avec la jurisprudence du Conseil d’État en matière de prêt de titres pour l’application du régime mère-fille de l’article 145 du CGI (voir en ce sens CE, 26 septembre 2014, n°363555, Sté Artémis Conseil). En revanche, on rappellera que, toujours pour l’application des dispositions de l’article 145 du CGI, le transfert à une fiducie de titres qui ont permis au constituant de bénéficier de l’exonération à raison des dividendes reçus n’entraîne pas – sous conditions – la rupture de l’obligation de conservation des titres prévue pour l’application de ce régime.