Le Conseil d’Etat a rendu un arrêt en date du 10 juillet 2012, donnant une application restrictive de l’exonération de TVA de l’article 261 B du CGI, aboutissant à valider un rappel de taxe sur des remboursements de frais facturés par Méderic Prévoyance à sa filiale assurance.
Les faits étaient les suivants. Dans le cadre d’une convention « 261 B », l’institution de prévoyance Méderic Prévoyance avait mis à la disposition de sa filiale Méderic Assurances les moyens humains et matériels nécessaires à son fonctionnement. La convention stipulait que la filiale assurance rembourserait à l’institution de prévoyance les frais effectivement supportés par celle-ci sans qu’il puisse en résulter pour cette dernière ni perte ni profit et, par ailleurs, que les frais engagés par l’institution de prévoyance ne pourraient excéder au cours d’un exercice 90% des chargements de gestion sur primes encaissés par sa filiale assurance.
Le service vérificateur a considéré que les prestations prévues par la convention ne pouvaient pas bénéficier de l’exonération prévue par l’article 261 B.
Le CE a validé cette analyse en jugeant que la convention de mise à disposition de moyens ne saurait constituer un groupement au sens des dispositions précitées, lesquelles impliquent un groupement réunissant nécessairement deux personnes physiques ou morales exonérées ou non assujetties qui en sont adhérentes et utilisent en commun des moyens humains et matériels.
Cette décision soulève de nombreuses questions.
En effet, d’un point de vue économique, il apparait qu’il y avait effectivement mise en commun de moyens entre ces deux sociétés. L’une engageait des frais qu’elle utilisait pour sa propre activité exonérée et en refacturait à l’autre une partie.
Nous comprenons cependant que cette mise en commun économique n’est pas suffisante et qu’un groupement de fait doit présenter des qualités supplémentaires.
La difficulté vient du fait qu’un groupement de fait n’est pas une société et n’existe que dans le cadre des dispositions de l’article 261 B du CGI. Quelles sont donc ces qualités supplémentaires ?
Cette question est d’autant plus délicate que l’administration fiscale a eu, à plusieurs reprises, recours à cette exonération dans des circonstances similaires au cas jugé par le Conseil d’Etat. On aura notamment à l’esprit la doctrine « restructuration » ou mise à disposition dans le cadre d’une « obligation légale ».
Au final, face à ce constat, la question est double :
- faut-il faire évoluer les groupements de fait « prestataire-client » vers une formule plus élaborée dont le cahier des charges demeure à préciser ?
- est-il encore possible d’obtenir des décisions nominatives confirmant la bonne application des dispositions d’exonération lorsqu’il s’agit d’un groupement de fait « prestataire-client » ?
Jusqu’à présent, l’administration, qui refusait la mise en place d’un groupe TVA, retenait une interprétation large des dispositions de l’article 261 B du CGI afin d’arriver à un résultat économiquement proche.
Face à des concurrents européens qui disposent dans leur pays d’un groupe de TVA, cette souplesse nous semble indispensable. Au cas particulier, si les parties avaient pu former un groupe de TVA, la question de la taxation des flux de service ne se serait pas posée.
De manière générale, on comprend dès lors mal l’opportunité de ce contentieux et la portée de cette décision.