Dans un rapport daté du 20 juin 2025, le Conseil ECOFIN dresse un bilan des travaux de la présidence polonaise (janvier-juin 2025), notamment en matière de fiscalité.
En bref
Le rapport se félicite des travaux accomplis en matière fiscale sous la présidence polonaise (notamment, adoption de la directive « DAC 9/Pilier 2 », de la directive « ViDA » – « TVA à l’ère numérique », progression des travaux sur la révision de la directive relative à la taxation de l’énergie, discussions sur la proposition de directive « Prix de transfert » – même si celle-ci ne devrait, finalement, pas voir le jour).
Il formule un certain nombre de réserves sur les projets de textes en cours de discussion et indique que des travaux techniques et des aménagements sont encore nécessaires (notamment, sur la proposition de directive « BEFIT »).
Surtout, il confirme l’arrêt des travaux sur la proposition de directive « Unshell » (ex « ATAD 3 »).
Rappelons qu’à compter du 1er juillet 2025, et jusqu’au 31 décembre prochain, c’est le Danemark qui assurera la présidence du Conseil de l’UE.
Focus sur les projets de texte en matière de fiscalité directe
« Unshell » (ex « ATAD 3 »)
Le 22 décembre 2021, la Commission européenne a dévoilé une proposition de texte visant à prévenir l’utilisation abusive des sociétés-écrans à des fins fiscales. Le projet repose sur un dispositif en 3 temps : 1) identification des entités « à risque » ; 2) Faculté pour ces entités de renverser la présomption en démontrant qu’elles satisfont à certains critères de substance ; 3) A défaut, non-application à ces entités du bénéfice des directives européennes et des conventions fiscales internationales.
Ce projet de texte a soulevé de nombreuses interrogations, et des travaux ont été effectués en vue de le refondre profondément (notamment, suppression du volet « sanctions » au profit d’un seul volet déclaratif).
Ces travaux n’ont toutefois pas suffi à convaincre les Etats membres, qui ont notamment soulevé un risque de chevauchement des indicateurs de substance de « Unshell » avec certains marqueurs « DAC 6 », et donc un risque de « double » déclaration.
Aussi, a-t-il été suggéré de plutôt privilégier une révision de certains marqueurs « DAC 6 ».
Dans ce contexte, le Conseil ECOFIN se prononce en faveur de l’arrêt des travaux autour de la proposition de directive « Unshell », au profit d’une révision de la directive « DAC 6 ». Cette annonce a été accueillie favorablement par la plupart des Etats membres.
Prix de transfert
Le 12 septembre 2023, la Commission européenne a dévoilé une proposition de directive visant à harmoniser les règles de prix de transfert au sein de l’UE et à garantir une approche coordonnée de ce sujet.
Les aspects clés de cette proposition incluent :
- L’intégration du principe de pleine concurrence dans le droit de l’Union ;
- L’harmonisation des principales règles de fixation des prix de transfert ;
- La clarification du rôle et du statut des lignes directrices de l’OCDE sur les prix de transfert ;
- La possibilité de créer des règles contraignantes communes au sein de l’Union sur des sujets spécifiques relatifs aux prix de transfert, conformément aux lignes directrices de l’OCDE.
Ce projet de texte a suscité un certain nombre de préoccupations. Certains Etats membres craignent notamment qu’il aboutisse à un double standard en matière de prix de transfert (UE vs OCDE), ainsi qu’une perte de flexibilité.
Des travaux complémentaires ont donc été menés sous les présidences belge, hongroise et polonaise, sans convaincre les différents Etats membres, dont beaucoup ont continué à s’opposer à la proposition de texte.
Dans ces conditions, le Conseil ECOFIN conclut à l’abandon probable de la proposition de texte, au profit de l’établissement d’une plateforme de l’UE en matière de prix de transfert, dont les contours restent encore à préciser (pas de consensus des Etats membres à ce stade sur ces modalités).
« BEFIT »
La proposition de directive « BEFIT » (Business in Europe : Framework for income taxation) a pour objectif d’instaurer un nouveau cadre pour la fiscalité des entreprises dans l’UE, avec un corpus réglementaire unique en matière d’impôt sur les sociétés, reposant sur une assiette commune et une méthode de répartition forfaitaire des résultats, qui se substituerait à la précédente proposition « ACCIS ».
La proposition de texte a reçu un accueil plutôt mitigé, tant des Etats membres que des parties intéressées (publication des avis recueillis dans le cadre d’une consultation publique), les principales critiques portant notamment sur sa difficile articulation avec la directive « Pilier 2 », et les différentes règles anti-abus existant au sein des Etats membres.
Des travaux techniques complémentaires sont donc nécessaires – mais ne figuraient, en tout état de cause, pas parmi les priorités de la présidence polonaise.
Affaire à suivre sur ce point.