Instruction fiscale n°04/MFB/SE/DE/DGM/DGI/DELC/2018 de l’Administration fiscale du 9 juillet 2018 précisant le contenu de la documentation prix de transfert
Dans le cadre de la Loi de Finances pour l’année 2018, le Gouvernement a souhaité renforcer son dispositif interne de lutte contre l’érosion des bases d’imposition et le transfert indirect de bénéfices.
L’instruction du 9 juillet 2018 précise de manière détaillée les modalités d’application de ces dispositions et donne des indications sur leur mise en œuvre.
Renforcement des obligations déclaratives concernant les transactions internationales intragroupe réalisées par des entreprises tchadiennes
La Loi de Finances pour 2018 a mis à la charge des entreprises situées au Tchad, et qui sont sous la dépendance ou qui possèdent le contrôle d’entreprises situées hors du Tchad, l’obligation de produire à l’appui de leur déclaration de résultats, une documentation allégée, mentionnant leurs liens et les transactions avec des entreprises étrangères apparentées.
L’instruction fiscale précise la notion de dépendance. Celle-ci est caractérisée dans 3 hypothèses :
- La dépendance de l’entreprise tchadienne vis-à-vis de l’entreprise étrangère ;
- La dépendance de l’entreprise étrangère sous l’entreprise tchadienne ;
- La commune dépendance des entreprises tchadiennes et étrangères d’une autre entreprise, d’un groupe ou d’un consortium.
Il est précisé que cette dépendance peut être juridique ou de fait.
Deux hypothèses de dépendance juridique sont décrites dans l’instruction :
- La détention par l’une des entreprises directement ou indirectement par personne interposée, d’une part prépondérante dans le capital social de l’autre ou la majorité absolue des suffrages susceptibles de s’exprimer dans les assemblées de l’autre entreprise, ou un droit sur la majorité des bénéfices de l’autre ;
- L’exercice par une entreprise étrangère au sein de l’entreprise nationale, directement ou par personne interposée, des fonctions comportant le pouvoir de décision.
L’instruction indique que l’existence d’un lien de dépendance peut également résulter de situations de fait, indépendamment de tout lien juridique ou capitalistique entre les entreprises.
Il est précisé que ce sera le cas lorsqu’une entreprise tchadienne est liée par un contrat avec une autre entreprise étrangère qui lui impose des prix pratiqués entre elles, ou lorsqu’une entreprise tchadienne et une entreprise étrangère utilisent le même nom commercial, ont recours aux mêmes représentants et se partagent les commandes reçues par ces représentants.
La dépendance de fait pourra également être caractérisée dans les situations suivantes :
- Lorsqu’une entreprise tchadienne fabrique des biens sous une marque détenue par une entreprise étrangère sans contrat de licence et que l’entreprise étrangère achète la totalité de la production de l’entreprise tchadienne et intervient dans la gestion et la commercialisation à des clients indépendants dans le pays où elle est implantée, des produits fabriqués au Tchad ;
- Lorsqu’une entreprise obtient ses marchés par l’intermédiaire d’une autre entreprise à laquelle elle abandonne la totalité de ses bénéfices, y compris ceux provenant des marchés qu’elle a conclus elle-même ;
- Lorsqu’une entreprise n’a pu fonctionner ou réaliser des investissements au cours de ses premiers exercices d’activité uniquement grâce au concours financier ou avances importantes consenties par une société étrangère.
Il est indiqué dans l’instruction que l’existence de la dépendance de fait est donc caractérisée par la capacité d’une entreprise d’imposer à une autre entreprise, des conditions économiques dans leurs relations commerciales, qui n’auraient pas pu l’être dans le cadre de rapports entre entreprises indépendantes.
Il est également précisé qu’il y a une dépendance de fait si l’entreprise étrangère exerce dans l’entreprise tchadienne directement ou indirectement un véritable pouvoir de décision ou inversement.
Forme et délai de la déclaration
La déclaration introduite par la Loi de Finances 2018 doit être jointe à la déclaration de résultats et devait être produite pour la première fois au titre de l’exercice clos au 31 décembre 2018.
Contenu de la déclaration
L’instruction précise que la déclaration doit comporter :
- Des informations générales sur le groupe d’entreprises associées (partie I)
- Des informations spécifiques concernant l’entreprise tchadienne déclarante (partie II)
Partie I : Informations générales sur le groupe d’entreprises associées
Il est indiqué dans l’instruction que les informations devant figurer dans cette partie sont les suivantes :
- L’identification des entreprises appartenant au groupe de sociétés : la dénomination, le numéro d’identification fiscale et le pays d’implantation de toutes les entreprises appartenant au même groupe multinational de sociétés;
- Les activités du groupe : pour chacune des entités du groupe multinational, les activités principales ;
- La description de la structure organisationnelle du groupe et des liens capitalistiques existant entre les entités du groupe : cette description devra être présentée sous la forme d’un schéma avec des annotations permettant d’en comprendre les implications et jointe à la déclaration ;
- Les actifs incorporels détenus ou utilisés par l’entreprise tchadienne déclarante (brevets, marques, modèles et autres droits incorporels) : la déclaration doit mentionner la nature de chaque actif incorporel détenu ou utilisé par l’entreprise déclarante. Pour les actifs simplement utilisés, la mention de l’identité et de la location du ou des propriétaires est exigée.
- Autres informations générales sur le groupe : l’entreprise déclarante pourra compléter sa déclaration avec toute autre information qu’elle juge nécessaire à la bonne compréhension de sa politique de prix de transfert.
Partie II : Informations spécifiques concernant l’entreprise déclarante
Il est précisé dans l’instruction que les informations suivantes doivent être renseignées dans cette partie :
- Les transactions effectuées avec des entreprises associées : l’entreprise déclarante doit mentionner l’ensemble des transactions qu’elle a effectuées avec des entreprises associées au cours de l’exercice faisant l’objet de la déclaration ;
- Les transactions doivent être ventilées par nature (ventes, prestations de services, honoraires, commissions, redevances versées ou perçues, etc.) ;
- Le montant agrégé des transactions effectuées avec ces entreprises associées : l’entité déclarante devra indiquer les montants agrégés des charges et des produits comptabilisés au cours de l’exercice au titre des transactions réalisées avec des entreprises associées. Seul le montant consolidé selon la nature du flux doit être renseigné. Il n’y a pas lieu de préciser le détail par transaction.
- L’identité et la localisation géographique des entreprises associées concernées par les flux déclarés : l’entreprise déclarante doit également préciser l’identité et le pays d’implantation des entreprises associées avec lesquelles les transactions intragroupe ont été réalisées au cours de l’exercices.
- Les changements intervenus au cours de l’exercices concernant la propriété, la création et la localisation des actifs incorporels ainsi que l’actionnariat de la société déclarante, doivent impérativement être mentionnés.
Caractère irréfragable de la présomption du lien de dépendance en cas de versement de sommes à des personnes situées dans un ETNC ou un pays à fiscalité privilégiée
L’article 26-XXII du CGI prévoit que la déductibilité des sommes versées par des entreprises tchadiennes qui sont sous la dépendance ou qui possèdent le contrôle d’entreprises situées hors du Tchad est limitée à 50 % de leur montant brut.
La Loi de Finances pour 2018 institue une présomption de dépendance en cas de versement de sommes à une personnes située dans un ETNC ou un pays à fiscalité privilégiée. Dans ce cas, la caractérisation de ce lien de dépendance n’est pas exigée.
Il est précisé dans l’instruction fiscale que cette limitation est systématiquement appliquée pour la déduction de sommes versées à un bénéficiaire situé dans ce type de pays ou territoires, sans qu’il soit nécessaire de prouver un quelconque lien de dépendance ou de contrôle. Ces dispositions créent une présomption irréfragable du lien de dépendance. L’entreprise tchadienne ne sera pas fondée à rapporter la preuve contraire et l’administration fiscale ne sera pas dans l’obligation de démontrer l’existence de lien de dépendance.