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Article 123 bis et notion de détention dans l’entité établie hors de France

L’ayant droit économique d’un compte bancaire ouvert au nom d’une société étrangère peut être regardé comme détenant une participation dans cette société pour l’application du dispositif anti-abus prévu à l’article 123 bis du CGI.

Le dispositif anti-abus de l’article 123 bis

Pour mémoire, l’article 123 bis du CGI prévoit l’imposition des avoirs détenus à l’étranger par une personne physique fiscalement domiciliée en France, par l’intermédiaire d’une entité établie hors de France où elle est soumise à un régime fiscal privilégié et dont les actifs sont principalement financiers. Les bénéfices et les revenus positifs de cette entité sont réputés acquis par la personne physique dans la proportion des actions, parts ou droits financiers qu’elle détient dans cette entité et soumis à l’impôt sur le revenu sur une assiette majorée de 25 %.

Ce mécanisme anti-abus s’applique en cas de détention, directe ou indirecte, de 10 % dans l’entité étrangère. La détention de 10 % est présumée lorsque l’entité considérée est située dans un ETNC.

L’histoire

L’Administration a entendu mettre en œuvre les dispositions de l’article 123 bis à l’encontre d’un contribuable français, à raison des sommes créditées sur le compte bancaire luxembourgeois d’une société de droit panaméen.

Si le contribuable ne détenait pas au moins 10 % des titres de la société panaméenne, l’Administration considérait qu’il devait toutefois être regardé comme la contrôlant.

Pour étayer sa position, elle faisait valoir que le contribuable était le « bénéficiaire économique » des sommes créditant le compte bancaire de la société (ce que le contribuable a lui-même reconnu) et qu’il avait la libre disposition des fonds déposés sur ce compte (le contribuable avait effectué d’importants retraits en espèce).

La décision du Conseil d’État

Le Conseil État partage l’analyse de l’Administration et des juges du fond. Dans un considérant de principe extrêmement clair, il indique qu’en instaurant le mécanisme anti-abus de l’article 123 bis, « le législateur a entendu imposer les résidents fiscaux à raison des bénéfices réalisés à l’étranger par certaines entités établies dans des États ou territoires dans lesquels elles sont soumises à un régime fiscal privilégié, sur lesquelles ces résidents exercent un contrôle même partagé, quelle que soit sa forme juridique et, dans le cas où il est quantifiable, supérieur à 10 % ».

Il en conclut qu’en établissant que le contribuable avait créé la société panaméenne, déclaré être le bénéficiaire économique du compte ouvert au nom de cette société dans une banque luxembourgeoise et reconnu avoir librement disposé des sommes placées sur ce compte, l’Administration apportait la preuve qu’il remplissait bien la condition de contrôle prévue à l’article 123 bis du CGI.

Dans ses éclairantes conclusions sous la décision, le rapporteur public milite également en faveur de cette solution, à la lumière notamment des travaux préparatoires de la loi de finances pour 1999, de la jurisprudence relative au « maître de l’affaire » (est regardé comme le maître de l’affaire celui qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d’user sans contrôle des biens sociaux, Conseil d’Etat, 22 février 2017, n°388887, Ortiz), ainsi qu’à celle relative à la taxe de 3 % sur les immeubles (référence à la notion de « bénéficiaire économique » pour le bénéfice de l’exonération de l’entité conditionnée à la désignation de ses actionnaires, Cass. Com. 18 octobre 2016, n°15-14.528).

 

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