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Clause de garantie de passif : appréciation de la durée de la garantie

Cour d'appel de Paris

La CA de Paris juge que l’absence de fixation par les parties d’un délai précis pour mettre en œuvre la garantie de passif est sans incidence sur la durée de la garantie elle-même, contractuellement fixée.

Rappel

Les clauses de garanties de passif permettent, en cas de cession de parts ou d’actions, de prémunir l’acquéreur contre l’apparition, postérieurement à la cession, d’un évènement dont la cause est antérieure à la cession et qui se traduirait par un accroissement du passif ou une diminution de l’actif, ce qui pourrait être le cas d’un redressement fiscal.

La clause de garantie précise en principe la durée pendant laquelle l’acquéreur peut mettre en œuvre la garantie, ce qui conduit à exclure de celle-ci les dettes apparaissant après l’expiration de cette durée.

Elle peut notamment prévoir que la garantie couvrant un certain type de dette (une dette fiscale, par exemple) s’éteint au terme du délai de prescription applicable (par exemple la prescription fiscale).

L’histoire

En 2013, les associés d’une société ont cédé l’intégralité de leurs participations à une autre société.

Dans ce cadre, l’un des associés cédants a consenti à la cessionnaire une garantie de passif aux termes de laquelle il s’est engagé à garantir 15 % du passif fiscal et social en cas de toute apparition ou augmentation du passif par rapport aux comptes de référence arrêtés au 31 décembre 2012.

Un an plus tard, il a consenti une extension de la garantie de passif, afin de l’étendre aux comptes de l’année 2013.

La clause prévoyait expressément que « la présente garantie est consentie et restera valable pour une durée prenant fin 3 mois après l’expiration du délai de prescription des administrations concernées pour les matières fiscales, douanières et sociales et au plus tard le 31 décembre 2016 (pour l’année 2012) et le 31 décembre 2017 (pour l’année 2013) ».

Elle prévoyait, en outre, que la déchéance du droit à garantie était subordonnée à la violation par le bénéficiaire de l’obligation, contractuellement prévue, d’informer le garant dans le délai de 30 jours, et, si cette violation est avérée, à la démonstration de la perte de droits qui en a résulté pour le garant en termes de recours.

En 2016, la société dont les titres ont été cédés a fait l’objet d’une vérification de comptabilité, à l’issue de laquelle l’Administration a remis en cause ses CIR 2012 et 2013.

Fin 2018, elle a reçu l’avis de mise en recouvrement subséquent. Dans la foulée, la société cessionnaire a alors entendu actionner la clause de garantie de passif, ce que le cédant a contesté, estimant que cette demande était intervenue postérieurement aux délais contractuellement fixés.

La décision de la CA de Paris

Devant la Cour, la société cessionnaire faisait valoir que les dates du 31 décembre 2016 et du 31 décembre 2017 ne constituaient pas la limite avant laquelle le garant devait être informé de l’existence de la dette fiscale à garantir, mais uniquement la fin de la période de garantie durant laquelle l’Administration pouvait révéler une dette.

La Cour souscrit à cette analyse et opère une distinction entre l’obligation de couverture et l’obligation de règlement.

Elle juge, au cas d’espèce, que la clause de garantie de passif litigieuse n’instituait pas un délai pour mettre en œuvre la garantie, mais fixait la durée pendant laquelle l’évènement générateur de la garantie devait s’être produit pour relever de la garantie de passif.

Aussi, les dates du 31 décembre 2016 et du 31 décembre 2017 correspondent donc au délai ultime pour couvrir l’apparition du dommage, ces dates ayant été fixées en considération du délai maximal dont dispose l’Administration pour remettre en cause les CIR.

Enfin, elle juge que la circonstance que les parties n’ont pas fixé de délai précis pour mettre ensuite en œuvre la garantie après l’une de ces 2 dates est sans incidence sur la durée de la garantie contractuellement fixée.

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