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Consolidation – Traitement comptable des nouvelles taxes instaurées par la loi de finances pour 2025

Cet article a été publié dans les Éditions JFA Juristes & Fiscalistes Associés – Mai 2025 et est reproduit sur ce blog avec l’accord de l’éditeur.

La loi de finances pour 2025 comporte notamment deux nouvelles impositions à la charge des grandes entreprises : une contribution exceptionnelle et temporaire sur les bénéfices des grandes entreprises (art. 48) et une taxe sur les réductions de capital consécutives au rachat de titres (art. 95). Le traitement comptable de ces deux impositions nouvelles fait l’objet de prises de position des parties prenantes et de l’ANC. Par ailleurs, l’analyse des deux nouvelles impositions au regard du Pilier 2 ne nous semble pas faire de doute.



Sur la contribution exceptionnelle et temporaire sur les bénéfices des grandes entreprises

Pour rappel, la contribution exceptionnelle est finalement 1 due au titre d’un seul exercice : le 1er exercice clos à compter du 31 décembre 2025. Seules sont concernées les entreprises (ou intégrations fiscales le cas échéant) ayant réalisé un chiffre d’affaires supérieur à 1 milliard d’euros, soit au titre du 1er exercice clos à compter du 31 décembre 2025, soit au titre de l’exercice précédent. La complexité de cette contribution exceptionnelle tient aux modalités de calcul de son assiette, qui correspond à la moyenne de l’impôt sur les sociétés dû au titre du 1er exercice clos à compter du 31 décembre 2025, et au titre de l’exercice précédent.

Son taux varie en fonction du chiffre d’affaires réalisé par l’entreprise (ou par l’intégration fiscale le cas échéant) : 20,6 % ou 40,2 %, selon que le chiffre d’affaires de l’entreprise (ou de l’intégration fiscale le cas échéant) atteint ou non, au titre de l’un des deux exercices considérés, le seuil de 3 milliards d’euros.

Deux mécanismes de lissage sont prévus en cas de dépassement des seuils de moins de 100 millions d’euros.

Analyse IFRS

Sur la nature de l’imposition

Au regard des normes IFRS, il ne fait pas de doute que cette nouvelle contribution entre dans le champ d’application de la norme IAS12, applicable aux impôts sur le résultat. En effet, bien que la base de calcul prenne en compte la moyenne de l’impôt sur le résultat de deux exercices, il n’en reste pas moins que cette nouvelle contribution est assise sur un impôt sur le résultat, lequel est assis sur un résultat. Tout comme la contribution additionnelle de 3,3 % applicable au-delà d’un impôt sur le résultat de 763.000 €, la nouvelle contribution doit être considérée comme un impôt sur le résultat au sens de la norme IAS12.

Sur ses modalités de comptabilisation

En raison des modalités de calcul de la contribution sur la moyenne de l’IS dû au titre de deux exercices (celui clos à compter du 31 décembre 2025 et le précédent), mécaniquement, la contribution est due pour la moitié de son taux sur l’impôt du 1er exercice considéré et pour l’autre moitié de son taux sur l’IS du 2e exercice.

Ainsi, à titre illustratif, dans l’hypothèse d’un groupe dont la clôture annuelle coïncide avec l’année civile, et ayant dépassé le seuil de 3 milliards d’euros (et donc soumis à un taux de contribution de 41,2 %), la contribution exceptionnelle et temporaire totale sera égale à la somme de 20,6 % de l’IS dû au titre de l’exercice clos le 31.12.2024 et de 20,6 % de l’IS dû au titre de l’exercice clos le 31.12.2025.

Dans la mesure où à la clôture de l’exercice 2024, la loi de finances 2025 introduisant cette nouvelle contribution n’était pas votée, aucun montant n’a dû être comptabilisé dans les comptes IFRS clos au 31.12.2024. En revanche, la loi étant définitive depuis le 14 février 2025 et le fait générateur comptable de la composante de la contribution assise sur l’impôt sur le résultat 2024 étant la réalisation des résultats 2024, la quote-part de la contribution correspondant à cette composante 2024 est à comptabiliser immédiatement au cours de la première période comptable (intermédiaire ou annuelle) close après le 14 février 2025, date de promulgation de la loi.

Ainsi, pour les entreprises dont la clôture annuelle coïncide avec l’année civile, la composante 2024 devrait être comptabilisée en totalité dans la première période intermédiaire 2025 et ne sera pas lissée sur l’année via le taux effectif d’impôt 2025 (taux projeté prévu par la norme IAS34).

Pour les entreprises dont la clôture annuelle est décalée (par exemple 31 mars, 30 juin ou 30 septembre 2025), la contribution sera assise sur la moyenne de l’impôt dû au titre des exercices clos en 2025 et en 2026. Dans ces situations, la totalité de la composante rattachée à l’exercice clos en 2025 sera comptabilisée dans l’exercice comptable clos en 2025. Dans ce même exercice comptable clos en 2025, il conviendra de tenir compte de l’existence de cette contribution au titre de l’impôt sur le résultat clos en 2026 pour valoriser les impôts différés des différences temporelles se retournant sur l’exercice clos en 2026.

Analyse au regard de la comptabilité sociale

De son côté, l’ANC a été plus formelle puisqu’elle a adopté le 4 avril 2025 un règlement dédié au traitement comptable de la contribution exceptionnelle et temporaire instaurée par la loi de finances pour 2025 (règlement ANC n°2025-02 en cours d’homologation).

Dans ce cadre, l’ANC précise que la contribution exceptionnelle et temporaire est comptabilisée en charges (par analogie avec le traitement comptable de l’impôt sur les résultats de cet exercice) au titre de l’exercice 2025 (ou 2026 pour les clôtures décalées).

En revanche, pour l’exercice 2024 (ou 2025 pour les clôtures décalées), aucune charge n’est à comptabiliser. Une information devrait être donnée dans l’annexe des comptes sociaux sur la part de la contribution assise sur l’impôt de l’exercice 2024 (ou 2025 pour les clôtures décalées). Cette information devra inclure les hypothèses prises en compte pour estimer le montant de la contribution.

Il convient de noter que le règlement ne traite que des comptes sociaux annuels et non des comptes consolidés établis selon les règles françaises, ni des comptes intermédiaires établis selon les règles françaises.

Sur la taxe sur les réductions de capital consécutives aux rachats de titres

Pour rappel, l’article 95 de la loi de finances pour 2025 a instauré deux taxes sur les réductions de capital par annulation de titres résultant d’un rachat leurs propres titres par les grandes entreprises (ayant leur siège en France et ayant réalisé au cours du dernier exercice clos un chiffre d’affaires hors taxe, tel qu’il résulte des comptes consolidés ou combinés, le cas échéant, supérieur à 1 milliard d’euros) :

La première, applicable au titre de chaque opération successive, est assise sur le montant de la réduction de capital, majoré d’une fraction des primes liées au capital.

La seconde est assise sur la différence entre le montant total des réductions de capital et le montant total des augmentations de capital réalisées entre le 1er mars 2024 et le 28 février 2025, majoré d’une fraction des primes liées au capital.

Dans les deux cas, le taux est de 8 %.

Analyse IFRS

Sans avoir besoin d’une position formelle du régulateur IFRS, l’ensemble des parties prenantes a considéré que : 

Analyse au regard de la comptabilité sociale

Dans son règlement du 4 avril 2025 (en cours d’homologation) précédemment mentionné, l’ANC s’est également prononcée sur les taxes sur les réductions de capital instaurées par la loi de finances pour 2025.

Ainsi, selon l’ANC, les taxes sur les réductions de capital instaurées par la loi de finances pour 2025 doivent être enregistrées au débit du compte 63 (compte d’impôts, taxes et versements assimilés), donc dans le compte de résultat à la différence de ce qui est prévu dans les normes IFRS.

Il n’est pas fait mention du fait générateur comptable dans le texte.

Analyse des deux nouvelles impositions au regard du Pilier 2

Enfin, s’il ne fait pas de doute que la contribution exceptionnelle et temporaire sera considérée comme de l’impôt « qualifié » au regard des règles Pilier 2, il ne nous semble pas pouvoir en aller de même s’agissant des taxes sur les réductions de capital, qui ne devraient dès lors pas pouvoir être qualifiées pour le calcul du TEI (ni simplifié, ni GloBE).


Sur le projet initial, v. FI 4-2024, n°  4, § 49, comm. A. de Massiac et F. Guinaudeau.

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