Seule la fraction de la prime destinée à couvrir le risque de décès est immédiatement déductible et sous condition que l’entreprise soit en mesure d’en justifier le montant.
Une société a souscrit deux contrats d’assurance-décès, dans le but de s’assurer contre le risque de survenance du décès de ses deux dirigeants. Ces dirigeants ont eux-mêmes personnellement souscrit, de manière concomitante, deux contrats d’assurance prévoyant, en cas de décès sur la période couverte par le contrat, le versement des garanties souscrites par la société elle-même en faveur de leurs héritiers, ou, en cas de vie au terme du contrat, le reversement à leur profit des primes d’assurance acquittées par la société.
La société entendait déduire les primes ainsi versées, sur le fondement des dispositions de l’article 39-1 du CGI (permettant la déductibilité immédiate des frais généraux de toute nature). Sont en effet déductibles les primes versées en exécution d’un contrat d’assurance garantissant à une entreprise une indemnité en cas de réalisation d’un risque susceptible de porter atteinte à la valeur de ses éléments d’actif ou d’affecter les résultats de son exploitation.
L’Administration a considéré qu’il convenait de faire masse de ces différents contrats, malgré le défaut d’identité des souscripteurs. Pour elle, ces contrats constituaient, pour la société, deux opérations de placement. Elle a par conséquent refusé la déduction immédiate des primes ainsi versées.
Le Conseil d’Etat valide cette analyse. Il juge notamment qu’est sans incidence sur la qualification de l’opération le fait que ce placement soit, du fait du montage retenu, insusceptible de bénéficier à la société (CE, 31 mars 2017, n° 387209, Société Hôtel de l’Orchidée).
Pour autant, il n’écarte pas la déductibilité immédiate de l’intégralité des primes versées par la société. Pour lui, il appartenait à celle-ci d’opérer une distinction entre la fraction de la prime exclusivement destinée à couvrir le risque de décès (immédiatement déductible pourvu que la société puisse justifier son montant) et la fraction de la prime permettant aux dirigeants de bénéficier du reversement de cette dernière en cas de non survenance du risque (non immédiatement déductible).
On notera que la solution ainsi retenue est conforme à la distinction traditionnellement opérée tant par la doctrine administrative (BOIBIC- CHG-40-20-20, n° 110) que par la jurisprudence entre les contrats d’assurance constitutifs de placements financiers et ceux ayant pour objet l’assurance d’un risque réel. La singularité de la présente décision réside, nous semble-t-il, dans le fait que le Conseil d’Etat transpose cette analyse dans l’hypothèse de contrats et de souscripteurs distincts, dont il choisit de faire masse.