Rappel
Pour mémoire, pour les exercices clos depuis le 4 juillet 2012, les aides consenties à une autre entreprise qui ne présentent pas un caractère commercial ne sont pas déductibles, sauf à être accordées à une entreprise en difficulté financière soumise à une procédure collective ou de liquidation (2e LFR 2012, art. 17).
On considère généralement que présente un caractère commercial un abandon de créance qui trouve son origine dans des relations commerciales entre deux entreprises et qui est consenti soit pour maintenir des débouchés, soit pour préserver des sources d’approvisionnement (BOI‑BIC‑BASE-50-10, 29 janvier 2013, n°120). A l’inverse, un abandon de créance sera regardé comme revêtant un caractère financier lorsqu’il est accordé par une entreprise en vue de sauvegarder la valeur de ses participations, en assurant la pérennité d’une filiale.
Confrontées en pratique à une imbrication de relations commerciales et de relations financières entre la société mère et sa filiale, la jurisprudence (CE, 27 juin 1984, n°35030), comme la doctrine administrative (BOI-BIC-BASE-50-10, 29 janvier 2013, n°140), prescrivent de rechercher quels sont les motifs prépondérants qui ont conduit à l’octroi de l’aide.
L’histoire
Une société exerçant une activité de conseil en direction d’entreprise et en investissements a accordé à sa filiale détenue à 91 % au titre des exercices 2014 et 2015, des abandons de créances concernant :
- des redevances facturées dans le cadre d’une convention d’assistance et de prestations de services ;
- des loyers relatifs aux locaux qu’elle lui sous-louait depuis plusieurs années.
Estimant que ces aides présentaient un caractère commercial, la société a procédé à la déduction des sommes correspondantes.
L’Administration a remis en cause la déductibilité de ces aides, estimant qu’elles ne revêtaient pas un caractère commercial et, à titre subsidiaire, qu’elles constituaient des actes anormaux de gestion.
La société a vainement contesté le redressement devant le TA de Paris, avant que l’affaire ne soit portée devant la CAA de Paris.
La décision de la CAA de Paris
La CAA de Paris conforte l’analyse de l’Administration, en se fondant, en premier lieu, sur l’absence de relations commerciales significatives entre les 2 entreprises.
A cet égard, elle note qu’à supposer même que les 2 sociétés puissent être regardées comme entretenant des relations commerciales à raison de la conclusion, depuis 2005, d’une convention d’assistance et de prestation de services, la mère ne réalisait, en tout état de cause, pas l’essentiel de son chiffre d’affaires avec sa filiale.
La Cour prend en considération le poids relatif des redevances facturées à la filiale dans ce cadre, lesquelles ne représentaient, respectivement, que 6 % et 1,3 % du CA déclaré par la société mère au titre des exercices 2014 et 2015. Par comparaison, la Cour note que les prestations de services facturées par la société à deux sociétés clientes extérieures au groupe étaient de 80 % et 69 % au titre des mêmes exercices.
Elle retient le même raisonnement au titre des abandons de loyers – dès lors que la location desdits locaux ne constituait pas l’essentiel de l’activité de la société mère.
La société tentait cependant de faire valoir que les abandons de créances litigieux avaient été consentis afin de maintenir ses débouchés et de préserver sa renommée, et qu’ils étaient justifiés par les difficultés financières de sa filiale.
Là encore, la CAA de Paris écarte les arguments soulevés par la société, en relevant que :
- La filiale exerçait une activité de restauration, bien éloignée de celle de la société mère ainsi que de ses principaux clients, de sorte qu’il n’était pas établi que les difficultés rencontrées par la filiale seraient susceptibles d’affecter la réputation de sa mère ;
- Est également sans incidence à cet égard la circonstance que la mère organise des réceptions et repas d’affaires dans le restaurant exploité par sa filiale ;
- Enfin, si la filiale était effectivement déficitaire en 2015, tel n’était pas le cas en 2014 et rien n’établissait, en tout état de cause, que ses éventuelles difficultés de trésorerie seraient de nature à affecter, à terme, le développement de l’activité de sa mère.
Elle conclut donc que les aides litigieuses ne constituaient pas des aides déductibles au sens des dispositions de l’article 39,13 du CGI.