Adoptée par le Congrès en mars 2010, la loi américaine FATCA (Foreign Account Tax Compliance Act) est un dispositif majeur de lutte contre l’évasion fiscale des contribuables américains détenant des avoirs financiers à l’étranger. Il a été mis en place à la suite de l’affaire UBS. Les premières dispositions de cette loi qui impose à l’ensemble des acteurs financiers non américains d’identifier et de déclarer leurs titulaires de comptes, actionnaires et clients américains, viennent d’entrer en vigueur le 1er juillet 2014.
Quelques éléments de contexte
A l’origine, cette loi a pour principe d’obliger les banques et établissements financiers du monde entier à transmettre aux Etats-Unis les informations dont ils disposent sur leurs clients, contribuables américains, sous peine d’une retenue à la source dissuasive de 30 % sur les flux concernés.
Tel que voté en 2010, FATCA était un dispositif extraterritorial et unilatéral qui, ayant soulevé de nombreuses questions quant à son application pratique (levée du secret bancaire, protection des données personnelles,etc.), a beaucoup évolué. Grâce à l’action de la France en collaboration avec ses principaux partenaires européens, FATCA est devenu un dispositif bilatéral négocié et réciproque – en théorie – entre les Etats-Unis et l’Etat partenaire par le biais de la signature d’accords intergouvernementaux (« IGA Modèle 1 » ou « IGA Modèle 2 »). Ces accords ont pour but d’organiser l’échange d’informations dans un cadre compatible avec le droit local de chaque pays puisque désormais, les données seront transmises par les institutions financières à leur administration fiscale locale et non directement à l’administration fiscale américaine. Ils ont aussi et surtout pour mérite de réduire sensiblement les obligations des institutions financières des Etats signataires, notamment en matière de retenue à la source.
Aujourd’hui, le dispositif FATCA peut s’appliquer sous trois formes différentes : dans le cadre de la législation américaine et des « Final Regulations » publiées par l’IRS, dans le cadre d’un « IGA Modèle 1 » ou dans le cadre d’un « IGA Modèle 2 ». Au sein d’un groupe multinational, la difficulté viendra de la nécessité de cette gestion de contexte hétérogène puisque chaque entité (succursale ou filiale), en fonction de sa localisation, devra regarder les dispositions applicables. La France a signé un « IGA Modèle 1 » le 14 novembre 2013.
Point sur l’incorporation de FATCA dans le droit français
La loi de séparation et de régulation des activités bancaires de 2013 (Loi n°2013-672 du 26 juillet 2013) a instauré l’article 1649 AC du Code général des impôts afin de conférer une base légale générale à la collecte des informations fiscales par les établissements financiers. Le projet de loi de finances rectificative pour 2014, voté le 23 juillet dernier, a amendé cet article afin de renforcer la sécurité juridique du cadre applicable à l’échange d’informations et permettre aux institutions financières de réaliser, y compris au moyen de traitements de données à caractère personnel, les diligences nécessaires en matière d’identification et de déclaration des comptes, des paiements et des personnes. En outre, en cas d’omission ou d’inexactitude, une amende de 200 € par compte déclarable a été instaurée.
En parallèle, un projet de loi visant à autoriser l’approbation de l’IGA entre la France et les Etats-Unis a été adopté par le Sénat et est actuellement examiné par l’Assemblée nationale.
Au-delà de la mise en place du cadre législatif, il faut souhaiter que l’administration fiscale française publie rapidement ses commentaires afin de lever certaines incertitudes juridiques et techniques sur la mise en œuvre effective de FATCA.
FATCA ne concerne pas que les institutions financières
Même si FATCA vise avant tout les groupes financiers, elle concerne également les groupes non-financiers qui peuvent avoir des « institutions financières au sens de FATCA » au sein de leur structure sans le savoir et qui sont de ce fait susceptibles d’être tenus au respect de certaines obligations pour se conformer à cette règlementation nouvelle.
En effet, FATCA peut impacter les groupes non-financiers notamment dans les cas suivants :
- Existence d’entités financières au sein de ces groupes (cash pooling, banques internes, centrales de financement, fonds de pension, etc.), ou
- Présence aux Etats-Unis, ou
- Perception de revenus passifs en provenance des Etats-Unis (intérêts, redevances, loyers, dividendes, produit de cession de titres américains, paiements au titre d’instruments dérivés, etc.).
Plus généralement, dès lors que ces groupes non-financiers entreront en relation avec des institutions financières, ces dernières, quelle que soit leur localisation, leur demanderont d’auto-certifier leur conformité avec la législation FATCA via un imprimé fiscal américain.
Il est donc essentiel pour un groupe non-financier d’analyser le statut de ses entités au regard de la réglementation FATCA et le cas échéant, d’entreprendre les actions nécessaires pour se conformer à cette réglementation nouvelle.
Après FATCA, le CRS : la route continue…
Le dispositif FATCA a provoqué un sursaut international dans le domaine de la lutte contre l’évasion fiscale internationale. Dans le sillage de l’initiative américaine, l’Union européenne et l’OCDE se sont lancées dans l’élaboration de standards.
Au niveau européen, la révision de la Directive Epargne (2003/48/CE) et de la Directive sur la coopération administrative (2011/16/UE) est en cours.
L’OCDE, quant à elle, travaille depuis de long mois sur une Norme Mondiale d’Echange Automatique d’Informations (« Common Reporting Standard » ou « CRS »).
Largement inspirée de la réglementation FATCA, la norme CRS publiée en janvier 2014 pose les principes de ce modèle d’échange. Elle s’accompagne d’un Modèle d’Accord entre Autorités Compétentes, calqué sur les IGA, qui constituera le socle légal de la coopération entre les différents Etats.
Le 21 juillet 2014, l’OCDE a complété son dispositif en publiant des commentaires visant à définir une ligne d’interprétation commune à la norme mondiale et à apporter des informations complémentaires sur sa mise en œuvre.
Cela constitue une étape clé dans la mise en œuvre d’un régime mondial d’échange automatique de renseignements entre juridictions. A ce jour, plus de 60 pays se sont engagés à appliquer ce standard automatique d’échange, destiné à favoriser la transparence fiscale.Ces engagements permettront d’augmenter considérablement le volume d’informations communiquées par les institutions financières au niveau mondial.
L’entrée en vigueur effective de cette nouvelle norme mondiale pour 45 des pays engagés est attendue pour 2016.