La CAA de Lyon confirme l’impossibilité d’appliquer la théorie de l’acte anormal de gestion aux titulaires de BNC, mais rappelle que l’Administration demeure néanmoins fondée à réintégrer dans leur résultat imposable le montant des recettes non déclarées qu’ils n’auraient normalement pas dû renoncer à percevoir.
Rappel
Le Conseil d’Etat a écarté, il y a plusieurs années déjà, l’application de la théorie de l’acte anormal de gestion aux titulaires de BNC (CE, 23 décembre 2013, n°350075).
Cette position découle notamment de la lettre des dispositions de l’article 93, I du CGI, qui n’autorisent la déduction que des dépenses « nécessitées par l’exercice de la profession », contrairement à celles de l’article 39 du CGI, applicables au BIC, qui se bornent à prévoir que le bénéfice est établi « sous déduction de toutes charges ».
Pour autant, il a admis la faculté pour l’Administration de réintégrer le montant des recettes auxquelles le contribuable a renoncé, dans son résultat imposable, dès lors que cette renonciation est dépourvue de contrepartie équivalente pour lui, qu’elle ne peut être regardée comme conforme aux règles ou usages de sa profession ou qu’elle n’est justifiée par aucun autre motif légitime.
L’histoire
Un contribuable exerçait la profession de kinésithérapeute – relevant donc des BNC – au sein de locaux appartenant à une SCI dont il détenait la quasi-intégralité des parts.
Il avait conclu, avec plusieurs autres kinésithérapeutes, des contrats de collaboration libérale, aux termes desquels il leur accordait l’usage des locaux professionnels (pris en location par le contribuable) ainsi que des installations et des appareils, moyennant le versement de redevances. Les frais portant sur les locaux et les installations restaient à la charge du contribuable.
A l’issue d’une vérification de comptabilité portant sur les années 2012 et 2013, l’Administration a relevé que ces redevances avaient été directement versées par les kinésithérapeutes à la SCI, sans que le contribuable ne les comptabilise dans ses recettes.
Considérant qu’il avait ainsi renoncé à percevoir une partie de ses recettes au profit d’un tiers, l’Administration a réintégré les redevances litigieuses dans l’assiette des BNC.
La décision de la CAA de Lyon
Reprenant le considérant de principe dégagé par le Conseil d’Etat dans sa décision de 2013 précitée, la Cour rappelle que si les titulaires de BNC sont, en principe – sous réserve, en ce qui concerne les professions libérales et les professions réglementées, du contrôle qu’exercent les instances de supervision spécialement instituées à cet effet – seuls juges de l’opportunité des décisions qu’ils prennent, l’Administration est fondée à réintégrer dans leur résultat imposable le montant des recettes non déclarées qu’ils n’auraient normalement pas dû renoncer à percevoir.
Tel est notamment le cas lorsque la renonciation en cause est dépourvue de contrepartie équivalente pour ces contribuables, qu’elle ne peut être regardée comme relevant de l’exercice normal de leur profession ou d’une pratique normale dans le cadre de leur occupation ou qu’elle n’est justifiée par aucun autre motif légitime.
Au cas d’espèce, le contribuable ne soutenait pas que cette renonciation à percevoir les redevances litigieuses comportait une contrepartie équivalente ou qu’elle était justifiée par un autre motif légitime. S’il invoquait des usages ordinaux et comptables, il n’en précisait toutefois ni la teneur, ni la portée.
La Cour confirme, en conséquence, le bien-fondé des réintégrations opérées par l’Administration.