Un décret publié au Journal Officiel du 5 décembre 2024 précise les obligations déclaratives françaises des groupes dans le champ de Pilier 2, ainsi que le contenu de l’échange d’informations entre Etats. Par ailleurs, l’Administration a enrichi sa FAQ dédiée à l’application des règles Pilier 2.
Précisions sur les obligations déclaratives des groupes entrant dans le champ de Pilier 2 (Décret du 4 décembre 2024)
Les règles Pilier 2 visant à assurer un niveau minimum d’imposition mondiale des groupes d’entreprises multinationales ayant un CA >750 m€, s’appliquent en France pour tout exercice ouvert à compter du 1er janvier 2024. Dans ce cadre, les entreprises concernées sont soumises à un certain nombre d’obligations déclaratives (dispositions intégrées dans notre droit interne par la LF 2024, art. 33).
Ainsi, les entités constitutives (EC) françaises appartenant à des groupes dans le champ d’application de Pilier 2 sont notamment tenues de déposer auprès de l’Administration une déclaration d’information GloBE (GIR) dématérialisée dans les 15 mois suivant la clôture de leur exercice (délai allongé à 18 mois dans l’hypothèse d’une 1re entrée dans le champ d’application de l’impôt complémentaire). Elles sont également tenues de fournir à l’Administration, dans le même délai, le relevé de liquidation de l’impôt acquitté en application des règles Pilier 2.
Par ailleurs, les EC appartenant à des groupes entrant dans le champ d’application de Pilier 2 sont tenues d’indiquer à l’administration fiscale, dans leur déclaration classique de résultat au titre de l’exercice d’application de Pilier 2, leur appartenance à un tel groupe, l’identité de l’entité mère ultime du groupe et, le cas échéant, de l’entité qui dépose la déclaration d’information (GIR), ainsi que l’Etat ou le territoire dans lequel les entités sont situées.
Le décret n°2024-1126 est venu préciser les obligations déclaratives des groupes entrant dans le champ d’application de Pilier 2 et le contenu de l’échange d’informations entre Etats ou territoires.
Eléments à indiquer dans la déclaration de résultat (CGI, annexe 3, art. 46 quater-0 ZZB)
Le décret complète la liste des éléments qui doivent être indiqués par chaque EC située en France dans sa déclaration de résultat.
Ainsi, chaque EC doit indiquer si elle dépose le relevé de liquidation de l’impôt complémentaire ou l’identité de l’EC désignée pour déposer le relevé de liquidation lorsque le groupe a opté pour désigner une seule entité pour acquitter la totalité de l’impôt complémentaire en France (CGI, art. 1679 decies).
Eléments à indiquer dans la déclaration GIR
Le décret précise les éléments devant être compris dans la déclaration GIR (CGI, annexe 3, art. 46 quater-0 ZZD).
Ainsi, la déclaration devra comprendre des éléments généraux concernant le groupe dans son ensemble et des éléments détaillés devant être complétés pour chaque « panier » dans chaque pays dans lequel le groupe est implanté (« panier » devant s’entendre comme l’ensemble des entités situées dans un même pays pour lequel la loi prévoit une détermination distincte du taux effectif d’imposition, CGI, annexe 3, art. 46 quater-0 ZZA).
Il convient de relever que ces éléments correspondent aux éléments figurant sur le modèle de déclaration GIR publié par l’OCDE en juillet 2023.
Le décret précise enfin que la déclaration GIR qui sera déposée (CGI, annexe 3, art. 46 quater-0 ZZC et 46 quater-0 ZZD) :
- devra être conforme au modèle défini par l’Administration (non encore publié à ce stade),
- devra être complétée en euros (ou dans la monnaie utilisée dans les Etats financiers consolidés du groupe).
Déclaration GIR simplifiée (CGI, annexe 3, art. 46 quater-0 ZZE)
Pour mémoire, lors de la publication de la déclaration GIR modèle par l’OCDE, un régime de déclaration simplifiée a également été prévu pour une durée maximale de 5 ans (2024/2028). L’OCDE offre ainsi aux groupes la possibilité, sur option, de limiter les informations à compléter par entité aux seuls pays dans lesquels un impôt complémentaire est dû.
Le décret transpose cette déclaration simplifiée en droit français.
Ainsi, l’entité déclarante pourra déposer une déclaration simplifiée, sous réserve du respect de 2 conditions :
- strictement pour les exercices ouverts au plus tard le 31 décembre 2028 et clos au plus tard le 30 juin 2030 ;
- strictement pour les pays où le groupe n’est pas redevable d’un impôt complémentaire nécessitant une répartition entre EC.
Cette déclaration simplifiée devrait comprendre au titre de l’ensemble des EC du groupe situées dans un même Etat le résultat qualifié et les impôts (montant corrigé des impôts couverts et montant total de la correction pour impôt différé). Ces informations devront être exprimées de manière agrégée et en montant net.
Il convient de noter qu’un certain nombre d’éléments, limitativement énumérés par le texte devraient être détaillés au niveau de chaque EC (les corrections afférentes aux entrées et sorties d’EC du groupe, les corrections afférentes aux transferts d’actifs entre EC, les options exercées au niveau des EC, etc.).
Eléments à indiquer dans le relevé de liquidation (CGI, annexe 3, art. 366 B)
Le décret vient préciser les éléments devant être mentionnés dans le relevé de liquidation. Celui-ci devrait ainsi contenir :
- Des informations générales sur l’entité déclarante (éléments d’identification de l’EC, date d’ouverture et de clôture de son exercice, qualité d’EMU du groupe, obligation de dépôt de la déclaration GIR, identité de l’entité procédant au dépôt de la déclaration GIR, le cas échéant) ;
- Des éléments au titre de l’impôt complémentaire, notamment :
- Le montant de l’impôt complémentaire dû au titre de la IIR, UTPR, QDMTT ;
- En cas d’option pour désigner une seule entité tenue d’acquitter la totalité de l’impôt complémentaire en France et de procéder au dépôt du relevé de liquidation : l’identité des EC au nom desquelles l’impôt est acquitté, les éléments nécessaires à l’affectation de l’impôt complémentaire entre EC.
Le relevé de liquidation doit être daté et signé par l’entité versante.
Le décret rappelle que les entités qui ne sont pas redevables de l’impôt complémentaire au titre d’un exercice ou qui ont désigné une autre entité du groupe pour acquitter cet impôt sont dispensées du dépôt du relevé de liquidation.
Echange d’informations entre Etats
Le décret vient préciser l’étendue de l’échange entre Etats des informations contenues dans la déclaration GIR (CGI, annexe 3, art. 46 quater-0 ZZF) :
- L’Etat de l’EMU (sous réserve qu’il applique une IIR ou une UTPR) est destinataire de l’ensemble des informations contenues dans la déclaration GIR ;
- Les Etats appliquant une QDMTT, ou une IIR ou une UTPR sont destinataires des éléments généraux concernant le groupe compris dans la déclaration GIR (des restrictions existent toutefois en ce qui concerne les Etats appliquant uniquement une QDMTT) ;
- Les Etats bénéficiant de droits à taxer en application de la QDMTT de la IIR ou de l’UTPR sont destinataires des éléments portant sur le détail des calculs du taux effectif d’imposition et de l’impôt complémentaire à raison du ou des Etats ou territoires au regard desquels ils bénéficient de ces droits à taxer (des restrictions existent toutefois en ce qui concerne les Etats dont le droit à taxer résulte de l’application d’une UTPR qualifiée dont le pourcentage d’attribution est de 0).
Un arrêté du Ministre chargé du budget donnera la liste des Etats ayant adopté une QDMTT, une IIR ou une UTPR qualifiée(s) ainsi que ceux ayant conclu avec la France un accord permettant l’échange automatique de déclarations GIR (CGI, annexe 3, art. 46 quater-0 ZZG).
Entrée en vigueur
Le décret est entré en vigueur le lendemain de sa publication au Journal Officiel, soit le 6 décembre 2024.
Mise à jour de la FAQ Pilier 2 (en date du 28 novembre 2024)
En janvier 2024, l’Administration a créé un espace dédié à la mise en œuvre des règles Pilier 2 en France sur son site impots.gouv.fr.
Y sont regroupées une partie des ressources documentaires préparées par l’OCDE (règles modèles, Administrative Guidance, modèle GIR, …), Directive européenne ainsi que les textes de transposition en France issus de la LF 2024.
On y trouve également l’adresse mail à laquelle peuvent être envoyées les questions sur le sujet : pilier2-contact@dgfip.finances.gouv.fr.
L’Administration y a également intégré une FAQ, qui vient d’être enrichie de 2 nouvelles questions-réponses.
- L’Administration y indique d’abord que le choix de l’entité déclarante est libre.
En application de l’article 223 WW bis, 1° du CGI, une entité constitutive située en France est dispensée de déposer une déclaration GIR lorsqu’une autre entité constitutive de ce groupe qui est située en France a été désignée par l’ensemble des autres entités constitutives du groupe situées en France pour déposer la déclaration et en a informé l’administration fiscale.
L’Administration indique que le groupe peut désigner l’entité constitutive de son choix pour remplir ces obligations déclaratives : il ne s’agit pas nécessairement de l’entité mère ultime, et il n’y a pas de critères précis pour désigner l’entité déclarante. Il peut ainsi s’agir de l’entité qui avait déjà la charge de la déclaration CbCR fiscal pour le groupe.
- L’Administration apporte également des précisions sur les modalités déclaratives dans le cas de figure spécifique d’une entité mère à détention minoritaire (MOPE), à la tête d’un sous-groupe.
La question posée portait sur le cas d’une EMU française non cotée détenant d’une part une POPE française cotée et d’autre part un sous-groupe via une MOPE française et la possibilité de procéder à des dépôts séparés de GIR en France, pour l’EMU et pour la MOPE.
L’Administration indique que dans l’hypothèse où le groupe choisit de désigner une entité française comme entité déclarante chargée de déposer la déclaration GIR pour le groupe en France (CGI, art. 223 WW bis, 1°), cette déclaration devra contenir l’ensemble des informations afférentes aux entités appartenant au périmètre du groupe, y compris les informations afférentes aux sous-groupes à détention minoritaire MOPE le cas échéant.
Elle précise que dans la mesure où aucune disposition du CGI n’autorise le dépôt d’une déclaration GIR par une MOPE à la tête d’un sous-groupe à raison de ce seul sous-groupe, un groupe ne pourra pas procéder à des dépôts distincts de déclaration GIR par sous-groupe.