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Régimes des impatriés : vers une non-applicabilité de l’exonération forfaitaire de 30% pour les mobilités intra-groupe antérieures à novembre 2018 ?

La décision du Conseil d’Etat 22 décembre 2020, met à mal l’exonération forfaitaire de 30% pour les recrutements antérieurs au 16 novembre 2018 sous contrat local français au sein d’un même groupe de sociétés. Cette décision, n’a pas forcément une portée universelle mais vient contredire une décision antérieure de la Cour d’Appel qui était plus favorable au contribuable. Il convient selon nous de réexaminer la situation des salariés qui ont été recrutés localement par des sociétés françaises du même groupe avant novembre 2018 afin de déterminer si l’exonération forfaitaire de 30% est applicable.

Faits

La décision porte sur l’imposition des revenus 2011 et 2012. Un salarié d’une entité britannique rompt son contrat de travail avec cette dernière pour rejoindre une société du groupe située en France dans le cadre d’un contrat de droit français à durée indéterminée. À la suite d’un contrôle sur pièces, l’administration fiscale propose de rectifier la base imposable en remettant en cause le bénéfice du régime forfaitaire des impatriés prévu à l’article 155B du Code Général des Impôts.

Au cas particulier, l’administration fiscale détermine que le mouvement ne relève pas d’un recrutement direct de l’étranger par une entreprise établie en France mais d’une mobilité entre sociétés appartenant au même groupe. En conséquence, l’exonération forfaitaire de 30% prévue à l’article 155 B II du Code Général des Impôt n’était pas applicable.

La Cour Administrative d’Appel juge néanmoins en faveur du contribuable et décide que l’exonération forfaitaire de 30% était bien applicable en l’espèce.

Le Conseil d’Etat conclue à la présence d’indices forts confirmant que le salarié a été appelé par son entreprise établie à l’étranger pour occuper un emploi en France au sein du même groupe. Il indique qu’il ressort du 1 du II de l’article 155B que « seules les personnes recrutées directement à l’étranger par une entreprise installée en France et non les personnes effectuant une mobilité entre entités du même groupe peuvent bénéficier, sur option, de l‘exonération d’imposition forfaitaire de 30% de leur rémunération ». Il reproche à la Cour Administrative d’Appel d’avoir inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis en jugeant que le contribuable avait fait l’objet d’un recrutement direct à l’étranger par une entreprise établie en France.

Le Conseil d’Etat décide l’annulation de l’arrêt de la Cour Administrative d’Appel et renvoie l’affaire à la même Cour.

Portée

A la lecture des conclusions du rapporteur public, cet arrêt ne peut être considéré comme un arrêt de principe à portée générale. Dans les faits de l’espèce, le rapporteur relève que la décision de transfert a en réalité été prise par la société d’origine du contribuable (société étrangère) et souligne qu’il convient d’analyser l’intention des parties : la société d’origine, la société d’accueil et le salarié concerné. En revanche, selon le rapporteur, l’absence de période d’essai et la reprise de l’ancienneté dans le CDI constituent des indices forts qui plaident en faveur de la non-application de l’exonération forfaitaire de 30% dans un transfert intra-groupe antérieur au 16 novembre 2018.

Selon notre analyse, le Conseil d’Etat ne confirme pas de manière générale la non-applicabilité de l’exonération forfaitaire de 30% pour les mobilités intra-groupe antérieures à novembre 2018.

Il est prudent au contraire de nuancer cette décision qui reste circonstanciée par les faits de l’espèce – nous restons donc dans une zone grise qui permet encore l’argumentation en cas de remise en cause par l’administration fiscale.

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