Le Conseil d’État confirme que, pour l’application des dispositions de l’article 109-1, 2° du CGI, la qualité de maître de l’affaire ne permet pas de présumer que ce dernier a effectivement appréhendé les revenus
Rappel : la théorie du « maître de l’affaire » ne joue pas dans les mêmes conditions selon la base légale retenue par l’Administration
Pour mémoire, la théorie du maître de l’affaire permet à l’Administration d’être regardée comme ayant apporté la preuve de l’appréhension de revenus réputés distribués par la personne dont elle établit qu’elle est, dans la société dont les revenus ont été regardés comme distribués, le seul maître de l’affaire (notamment, CE, 30 décembre 2011, n°332088).
Il est bien établi que l’Administration peut recourir à cette présomption du « maître de l’affaire » lorsqu’elle fonde son redressement sur les dispositions de l’article 109-1, 1° du CGI (présomption légale de distribution à l’égard de tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital) ou sur les dispositions de l’article 111, c du CGI (rémunérations et distributions occultes, voir notamment CE, 13 juin 2016, n°391240).
En revanche, le Conseil d’État a récemment jugé, de manière nous semble-t-il inédite que, pour l’application des dispositions de l’article 109-1, 2° du CGI (qui réputent distribuées l’ensemble des sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, bénéficiaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices), la qualité de maître de l’affaire ne permet pas de présumer que ce dernier a effectivement appréhendé les revenus (CE, 29 juin 2020, n°433827 et 432815).
Autrement dit, pour l’application des dispositions de l’article 109-1, 2° du CGI, la qualité de maître de l’affaire ne permet pas de présumer que ce dernier a effectivement appréhendé les revenus (contra : CE, 20 octobre 1982, n°23942).
La confirmation du Conseil d’État
À l’issue de la vérification de comptabilité d’une société au titre de ses exercices 2009 à 2011, l’Administration avait entendu considérer les charges non déductibles remises en cause comme des revenus réputés distribués au nom de l’associé et gérant dans le cadre des dispositions des 1° et 2° du 1 de l’article 109 du CGI.
Le Conseil d’État vient ici confirmer, sans ambiguïté, la solution précédente en jugeant que, pour soumettre à l’IR des revenus sur le fondement de l’article 109-1,2° du CGI, il incombe à l’Administration d’établir qu’ils ont été mis à disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts.
La circonstance que le contribuable, que l’Administration entend imposer, est le maître de l’affaire est, à cet égard, sans incidence.
Rappelons que la CAA de Nantes a également récemment jugé – de manière inédite et surprenante – que l’Administration pouvait recourir à la présomption du « maître de l’affaire » pour l’application des dispositions de l’article 111, a du CGI (CAA Nantes, 14 janvier 2022, n°20NT00345).
La question pourrait être tranchée par le Conseil d’État, dans l’hypothèse où un pourvoi serait formé contre cette décision.