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Précisions sur les modalités d’imposition des sociétés civiles de construction-vente

Cour d'appel de Versailles

Wikipedias Commons Via Tiraden

Le caractère commercial d’une activité de construction-vente doit être apprécié non pas à la lumière de l’objet social initial, mais au regard des opérations effectivement réalisées par la société.

Rappel

On sait que les sociétés civiles relèvent, en principe, de plein droit de l’IS, lorsqu’elles se livrent à des opérations présentant un caractère industriel ou commercial (CGI, art. 206-2, al.1).

Cependant, les sociétés civiles ayant pour objet la construction d’immeubles en vue de leur vente sont, par dérogation, soumises au régime des sociétés de personnes, à la condition que ces sociétés ne soient pas constituées sous la forme de sociétés par actions ou à responsabilité limitée, et que leurs statuts prévoient la responsabilité indéfinie des associés en ce qui concerne le passif social (CGI, art. 239, ter I).

Le juge de l’impôt est venu encadrer les conditions d’application de ce régime.

Il a ainsi jugé qu’une société civile dont l’objet ne comporte pas la construction en vue de la vente ne peut pas bénéficier des dispositions de l’article 239 ter du CGI, même si elle se livre, en fait, exclusivement à de telles opérations (CE, 24 février 1988, n°59762).

Lorsque la société se livre, en plus des opérations de construction-vente, à d’autres opérations, le bénéfice du régime prévu à l’article 239 ter est maintenu si ces opérations présentent un caractère civil ; tel n’est pas le cas s’il s’agit d’opérations réputées commerciales (CE, 28 novembre 2012, n°332110).

L’histoire

Une SCI avait initialement pour objet social l’acquisition de biens immobiliers en vue de leur location, la réalisation de travaux d’agrandissement, de construction, de rénovation, et plus généralement, de toutes opérations se rattachant directement ou indirectement à cet objet ou susceptibles d’en faciliter la réalisation, à la condition qu’elles ne puissent porter atteinte au caractère civil de l’activité de la société.

En 2013, elle a souscrit une déclaration de modification de son objet social pour y adjoindre les activités de vente des biens immobiliers. De la sorte, l’objet social est devenu « l’acquisition de biens immobiliers en vue de leur location et (ou) de leur vente après travaux de construction et de rénovation ».

En 2011, la société a acquis un bien immobilier qu’elle a transformé en 9 maisons d’habitation qu’elle a vendues au cours des années 2013 à 2015. Ces ventes n’ont pas été soumises à la TVA et les plus-values réalisées ont été soumises à l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux, selon le régime des plus-values des particuliers.

La société a fait l’objet d’une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos de 2012 à 2014, à l’issue de laquelle l’Administration a estimé que la société exerçait en réalité une activité de construction-vente de nature commerciale, et a entendu imposer la société en application du régime dérogatoire de l’article 239 ter du CGI (en soumettant ses associés à l’IR dans la catégorie des BIC).

La décision de la CAA de Versailles

La Cour confirme l’exercice, de manière habituelle, des opérations de construction-vente par la société.

S’il est vrai qu’au jour de l’acquisition du bien immobilier (en 2011), les statuts de la société avaient exclusivement pour objet l’acquisition de biens immobiliers en vue de leur location, et que la société a fait estimer, en février 2011, la valeur locative du bien qu’elle envisageait alors d’acquérir, la Cour souligne que la société, créée peu de temps avant l’acquisition du bien, n’a jamais réalisé d’opérations de location et ne justifiait d’aucune démarche visant à la mise en location des biens réalisés.

Elle souligne, en outre, que le bien acquis a été inscrit dans un compte de stock, et non dans un compte d’immobilisation.

Elle en conclut que l’existence d’une intention spéculative de la société, caractéristique des opérations immobilières de nature commerciale, doit être regardée comme établie eu égard au court délai séparant l’acquisition du bien des opérations de revente, du lotissement du bien effectué presque immédiatement après son acquisition, du nombre de biens vendus et du montant des bénéfices réalisés et de leur caractère exclusif dans l’activité de société.

Aussi juge-t-elle que l’Administration, qui s’est fondée à juste titre non sur l’objet social initial et sur les mentions portées sur l’acte d’acquisition, mais sur les opérations effectivement réalisées par la société établissait bien que la société avait exclusivement conduit des opérations de construction en vue de la vente et exerçait une activité non pas civile, mais commerciale.

    

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