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Déclaration des bénéficiaires effectifs : Attention à la date limite du 1er avril 2018

Vade-mecum relatif à l’obligation de déclarer les bénéficiaires effectifs au registre du commerce et des sociétés

Dans le cadre de l’application de la directive européenne anti-blanchiment 2015/849 du 20 mai 2015, l’ordonnance 2016-1635 du 1er décembre 2016 renforçant la lutte contre le blanchiment a mis à la charge des personnes morales immatriculées au registre du commerce et des sociétés une obligation d’information sur leurs bénéficiaires effectifs.

Le dispositif figure désormais aux articles L.561-46 et suivants du Code monétaire et financier complété des dispositions des articles R.561-55 et suivants dans sa partie réglementaire.

Pour vous guider, le cabinet d’avocats Deloitte Société d’Avocats, une entité du réseau Deloitte a établi un vade-mecum vous indiquant les principales conséquences de l’entrée en vigueur de ce dispositif et les modalités de déclaration.

Quelles sont les sociétés concernées ?

Toutes les personnes morales immatriculées au registre du commerce et des sociétés sont concernées, y compris les sociétés civiles, les « sociétés familiales », les sociétés étrangères ayant un établissement en France, et les groupements dotés de la personnalité morale (GIE, etc.). Cette obligation s’impose même si les statuts comprennent déjà la liste des associés ou qu’une liste des souscripteurs a été déposée lors de la demande d’immatriculation.

Les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé ne sont pas concernées.

Dans quels délais la déclaration doit-elle être faite ?

Les personnes morales immatriculées à compter du 1er août 2017 doivent déposer le document identifiant leurs bénéficiaires effectifs lors de leur demande d’immatriculation ou au plus tard dans un délai de 15 jours à compter de la réception du récépissé de dépôt de dossier de création d’entreprise.

Les personnes morales immatriculées avant le 1er août 2017 ont jusqu’au 1er avril 2018 pour déposer leur déclaration.

Faut-il mettre à jour la déclaration des bénéficiaires effectifs ?

Oui. L’article R.561-55 du Code monétaire et financier impose le dépôt d’une nouvelle déclaration dans les 30 jours suivant tout fait ou acte rendant nécessaire la rectification ou le complément des informations qui y sont mentionnées.

Qu’est-ce qu’un bénéficiaire effectif ?

Dans l’attente d’un nouveau décret plus précis sur la notion, l’article R561-1 du Code monétaire et financier indique qu’on entend « par bénéficiaire effectif de l’opération la ou les personnes physiques qui soit détiennent, directement ou indirectement, plus de 25 % du capital ou des droits de vote de la société, soit exercent, par tout autre moyen, un pouvoir de contrôle sur les organes de gestion, d’administration ou de direction de la société ou sur l’assemblée générale de ses associés. »

L’exercice d’un pouvoir de contrôle peut donc être déduit des clauses statutaires, d’un pacte d’actionnaires, ou de tout autre contrat conférant des droits importants à un associé (droit de vote double, droit de véto, priorité dans la nomination des dirigeants, etc.).

Il existe des dispositions spécifiques pour les bénéficiaires effectifs d’organismes de placements collectifs et de personne morale qui n’est ni une société ni un organisme de placements collectifs, ou lorsque la société concernée intervient dans le cadre d’une fiducie ou de tout autre dispositif juridique comparable relevant d’un droit étranger.

A quel degré doit-on remonter ?

Il convient de remonter la chaîne des actionnaires jusqu’à la dernière personne physique détenant indirectement plus de 25 % du capital ou des droits de vote ou qui exerce, par tout autre moyen, un pouvoir de contrôle sur les organes de gestion, d’administration ou de direction de la société ou sur l’assemblée générale de ses associés. 

Quelle est la forme de la déclaration ?

L’article R.561-56 du Code monétaire et financier indique la forme et les mentions de la déclaration :

  1. S’agissant de la société ou de l’entité juridique, sa dénomination ou raison sociale, sa forme juridique, l’adresse de son siège social et, le cas échéant, son numéro unique d’identification complété par la mention RCS suivie du nom de la ville où se trouve le greffe où elle est immatriculée ;
  2. S’agissant du bénéficiaire effectif :
    1. Les nom, nom d’usage, pseudonyme, prénoms, date et lieu de naissance, nationalité, adresse personnelle de la ou des personnes physiques 
    2. Les modalités du contrôle exercé sur la société ou l’entité juridique 
    3. La date à laquelle la ou les personnes physiques sont devenues le bénéficiaire effectif de la société ou de l’entité juridique 
    4. Les pièces justificatives en annexes

Qui signe la déclaration ?

Le document relatif au bénéficiaire effectif est daté et signé par le représentant légal de la société ou de l’entité juridique qui procède au dépôt (R.561-46 du Code monétaire et financier).

Quel est le coût de la déclaration ?

Source : Arrêté du 1er août 2017 relatif aux tarifs réglementés des greffiers des tribunaux de commerce

Qui a accès aux informations contenues dans la déclaration des bénéficiaires effectifs ?

Deux catégories de personnes ont accès aux informations :

Les personnes spécifiquement listées ayant une qualité leur permettant d’avoir accès aux informations.

L’article R.561-57 liste les personnes pouvant avoir communication de la déclaration sous réserve de respecter les conditions propres à chacune :

  1. Les magistrats de l’ordre judiciaire,
  2. Les agents du service mentionné à l’article L. 561-23 du Code monétaire et financier,
  3. Les agents des douanes,
  4. Les agents de la direction générale des finances publiques chargés du contrôle et du recouvrement en matière fiscale,
  5. Le personnel des services de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution,
  6. Les enquêteurs et les contrôleurs de l’Autorité des marchés financiers en application de l’article L. 621-10 du Code monétaire et financier,
  7. Le bâtonnier et, le cas échéant sur sa délégation, un ou plusieurs membres du conseil de l’ordre,
  8. Les notaires inspecteurs,
  9. Les huissiers de justice inspecteurs,
  10. Les commissaires-priseurs judiciaires délégués,
  11. Le président du conseil de l’ordre des avocats au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation,
  12. Le président du Conseil national des administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires et les contrôleurs désignés,
  13. Le président du Haut Conseil du commissariat aux comptes et son rapporteur général,
  14. Les membres du comité de lutte anti-blanchiment de l’ordre des experts comptables,
  15. Le président du Conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques,
  16. Le délégué aux agents sportifs, relevant de la commission des agents sportifs constituée par la fédération sportive délégataire,
  17. Les agents désignés par l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation,
  18. Les agents de la police nationale chargés de la police des jeux.

Le décret indique les conditions dans lesquelles ces personnes peuvent avoir accès à la déclaration.

Les personnes assujetties à la lutte contre le blanchiment d’argent

L’article R.561-58 du Code monétaire et financier prévoit que le document relatif au bénéficiaire effectif peut être communiqué aux personnes assujetties à la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme qui :

Les tiers

L’article R.561-59 du Code monétaire et financier prévoit que le document relatif au bénéficiaire effectif peut être communiqué à toute autre personne autorisée par une décision de justice qui n’est plus susceptible d’une voie de recours ordinaire (voir point 10).

Comment puis-je avoir accès à la déclaration des bénéficiaires effectifs d’une société ?

Toute personne justifiant d’un intérêt légitime peut demander la communication de la déclaration des bénéficiaires effectifs dans les conditions ci-après (R.561-59 du Code monétaire et financier).

La demande de communication est formée par requête. A peine d’irrecevabilité, cette requête contient :

  1. Si le requérant est une personne physique, ses nom, prénoms, nationalité, date, lieu de naissance, profession et domicile ; si le requérant est une personne morale, sa forme, sa dénomination, son siège social et l’organe qui la représente légalement ;
  2. L’indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;
  3. L’objet et le fondement de la demande, ainsi que l’indication des pièces sur lesquelles elle est fondée.

Elle est datée et signée par le requérant.

Le juge commis à la surveillance du registre est saisi par la remise de la requête au greffe du tribunal de commerce.

Il peut fonder sa décision sur tous les faits relatifs au cas qui lui est soumis, y compris ceux qui n’auraient pas été allégués. Il procède, même d’office, à toutes les investigations utiles. Il a la faculté d’entendre sans formalités les personnes qui peuvent l’éclairer ainsi que celles dont les intérêts risquent d’être affectés par sa décision. Il peut se prononcer sans débat.

Il statue par ordonnance. Celle-ci est notifiée au requérant et au bénéficiaire effectif par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. La notification indique la forme et le délai de recours ainsi que les modalités suivant lesquelles il doit être exercé.

L’ordonnance est susceptible d’appel par le requérant et le bénéficiaire effectif.

Peut-on m’obliger à faire la déclaration ?

Oui sous certaines réserves : toute personne justifiant d’un intérêt peut saisir le président du tribunal d’une requête tendant à enjoindre, au besoin sous astreinte, à une société qui n’y aurait pas procédé de déposer au greffe le document relatif à ses bénéficiaires effectifs (L561-48 du Code monétaire et financier).

Quelles sont les sanctions du défaut de déclaration ?

Le fait de ne pas déposer au registre du commerce et des sociétés le document relatif au bénéficiaire effectif ou de déposer un document comportant des informations inexactes ou incomplètes est puni, entre autres, de six mois d’emprisonnement et de 7 500 € d’amende. Les personnes morales encourent une amende de 37 500 € (L561-49 Code monétaire et financier).

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