Selon la CAA de Marseille, les avances consenties par une société à sa sœur, sous couvert d’une convention de trésorerie, sont constitutives d’un acte anormal de gestion, dès lors qu’elles ont eu pour seul objectif d’éviter à l’associé commun de financer lui-même les besoins de trésorerie de la société bénéficiaire de l’aide, en sa qualité de caution solidaire.
Rappel
On sait que l’aide accordée par une société à une autre ne peut présenter un caractère normal que si elle répond à l’intérêt propre de la société qui la consent. En particulier, une telle aide ne peut pas être justifiée par le seul intérêt du groupe auquel appartiennent les deux sociétés.
L’histoire
Une société, détenue en intégralité par un contribuable personne physique, a consenti des avances de trésorerie au titre des exercices 2012 et 2013 à sa société sœur, sous couvert d’une convention de trésorerie.
L’Administration a considéré que ces mouvements de trésorerie étaient constitutifs d’un acte anormal de gestion, en l’absence de tout intérêt de la société à consentir ces prêts.
Elle faisait notamment valoir que ces opérations ont consisté à régler les annuités dues par la société bénéficiaire des aides, dont la trésorerie ne lui permettait pas de faire face à ces échéances, pour le remboursement d’un prêt contracté auprès d’une banque pour financer l’achat, auprès de la société prêteuse, des actions d’une société tierce.
L’Administration considère, en outre, que ces avances avaient permis à l’associé commun des deux sociétés de ne pas financer personnellement les besoins de trésorerie de la société bénéficiaire des avances, en sa qualité de caution solidaire et constituaient par conséquent des libéralités, imposables entre ses mains sur le fondement des dispositions de l’article 111,a du CGI (sommes mises à disposition des associés à titre d’avances, de prêts ou d’acomptes, présentant la nature de revenus réputés distribués).
La décision de la CAA de Marseille
Pour tenter d’écarter la qualification d’acte anormal de gestion, le contribuable se prévalait de la convention de trésorerie conclue entre les deux sœurs en 2009.
Cet argument n’est pas accueilli favorablement par la Cour, qui relève que cette convention prévoyait qu’une aide ne pourrait être apportée qu’à la condition qu’elle soit « dicté(e) par un intérêt économique, social ou financier commun », lequel faisait en l’espèce défaut.
Elle souligne que la société bénéficiaire de l’aide était déficitaire au titre des exercices en litige, et que seuls les versements de sa sœur ont alimenté sa trésorerie.
Si le contribuable arguait que ces apports en trésorerie constituaient, en réalité, des avances sur le prix de cession d’une société tierce, conformément à un protocole transactionnel de cession signé en 2010, la Cour relève que ce protocole était purement spéculatif, et qu’en tout état de cause, les versements correspondaient uniquement aux annuités de l’emprunt contracté par la bénéficiaire de l’aide auprès de la banque, pour lequel l’associé commun était caution solidaire.
La Cour en conclut que la société ayant accordé l’aide s’est ainsi volontairement appauvrie en finançant, en dehors de toute obligation, les annuités d’emprunt de sa sœur.
Dès lors, elle juge qu’en l’absence de tout intérêt économique et compte-tenu de la communauté d’intérêts entre les deux sociétés, les avances litigieuses constituaient bien un acte anormal de gestion.
La Cour confirme également l’imposition des sommes en tant que revenus distribués entre les mains de l’associé commun, jugeant que les avances lui avaient permis de ne pas avoir à financer personnellement les besoins de trésorerie de sa filiale. Il importe peu, à cet égard, que sa caution solidaire n’ait été effectivement mise en jeu que bien plus tard (en 2016).