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CIR : l’Administration peut-elle requalifier une sous-traitance en cascade ? Le Conseil d’Etat se positionne

Photo du conseil d'Etat

Le Conseil d’État, dans un arrêt du 9 juin 2020 (n° 427441) revient sur le cas de sous-traitance en cascade ou « de second rang ». Pour mémoire, la société Hays Pharma (HP), société agréée au sens de l’article 244 quater B II d) bis du CGI, avait confié des travaux de R&D dans le domaine pharmaceutique à deux autres sociétés du groupe, Hays Pharma Consulting (HPC) et Hays Pharma Services (HPS), non agréées.  Ces travaux étaient in fine rendus au bénéfice d’un client tiers.

L’administration a considéré que les sommes perçues par HPS et HPC, en provenance de HP, devaient être déduites de l’assiette de leur CIR respectif, puisque seul le donneur d’ordre (le client) peut dans ce cas bénéficier du CIR sur lesdits travaux, conformément à l’article 244 quater B III du CGI. En d’autres termes, l’administration, suivie par la Cour d’appel, ont raisonné comme si les deux sociétés HPC et HPS étaient elles-mêmes agréées, ce afin d’éviter une double prise en compte des mêmes travaux de R&D dans leur CIR ainsi que dans celui du client final.

A lire également concernant la décision de la CAA : Un arrêt d’espèce, concernant le CIR de sociétés de services en présence de deux niveaux de sous-traitance

Cette analyse est censurée par le Conseil d’Etat, qui rappelle qu’en l’état du droit applicable au litige, aucune disposition de l’article 244 quater B du CGI n’interdit à une entreprise de bénéficier du CIR au titre d’opérations de recherche effectuées pour le compte d’un organisme privé agréé, sauf caractérisation d’un montage constitutif d’une fraude à la loi, non invoqué ici.

Cette décision nous semble logique en droit, puisque l’article 244 quater B s’applique sans égard à la refacturation ou non des dépenses de R&D éligibles, et seules les sommes reçues par les entreprises, organismes ou experts agréés doivent être neutralisées, en vertu d’une disposition spécifique (article 244 quater B III du CGI).

C’est justement pour pallier cette situation de sous-traitance en cascade que le législateur a récemment modifié l’article 244 quater B du CGI, en écartant désormais du bénéfice du CIR chez le donneur d’ordre les travaux de R&D non réalisés directement par l’organisme agréée (hormis si ces travaux sont confiés à des sous-traitants de second rang eux-mêmes agréés). 

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