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Convention fiscale : taux réduit et résidence

La CAA de Paris juge qu’une société étrangère assujettie à un taux réduit d’imposition de 10 % doit être considérée comme « résidente » au sens conventionnel.

En 2013 et 2014, une société française, qui exerce une activité de conseil et d’expertise en système d’information, rémunère sa filiale tunisienne en contrepartie de prestations de services utilisées en France. À la suite d’une vérification de comptabilité, l’Administration exige l’application de retenues à la source sur cette rémunération sur le fondement de l’article 182 B du CGI (majorées d’intérêts de retard et pénalités de 10 %). L’Administration refuse ainsi le bénéfice de la convention franco-tunisienne considérant que la société ne peut prétendre répondre à la qualité de « résident » en application des dispositions conventionnelles.

L’utilisation en France des services fournis par la filiale tunisienne n’étant pas contestée, seule la convention fiscale franco-tunisienne pouvait s’opposer à l’application des dispositions de l’article 182 B du CGI.

Dans ce cadre, l’article 3 de la convention signée entre la France et la Tunisie prévoit que : « 1. Au sens de la présente convention, l’expression  » résident d’un État contractant  » désigne toute personne qui, en vertu de la législation dudit État, est assujettie à l’impôt dans cet État, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère analogue. / (…) ». Aussi, l’Administration soutient que la filiale tunisienne bénéficiant des dispositions du code tunisien d’incitation aux investissements, elle doit être considérée comme « structurellement » exonérée d’impôt et, par conséquent, comme non résidente fiscale de Tunisie. La société tunisienne ne peut dès lors pas prétendre au bénéfice de la convention fiscale bilatérale liant la France et la Tunisie.

La société conteste cette position de l’Administration. En 1re instance, le TA rejette les arguments de la société, qui poursuit en appel.

Au contraire, la CAA considère à l’issue de l’analyse de la situation de fait que la société tunisienne doit être regardée comme résidente de Tunisie au sens conventionnel. En effet, elle relève que la société a acquitté en Tunisie au titre des exercices en litige un IS aux taux de 10 %. Elle juge que cet impôt doit être regardé comme un impôt identique ou analogue à l’impôt de la patente que l’IS a remplacé, au sens de l’article 9 de la convention, alors même qu’il a été calculé par application d’un taux réduit de 10 %, inférieur au taux de droit commun de l’IS tunisien (30 %).

Dans ce contexte, on rappellera qu’il est clairement établi qu’une entité non assujettie aux impôts visés par la convention dans son État, en raison de son statut ou de son activité ne peut être considérée comme résidente fiscale au sens d’une convention modèle OCDE (CE 9 novembre 2015, n° 370054 LHV et n° 371132 Santander Pensiones). Ce qui est notamment le cas d’une société soumise à une imposition forfaitaire modique de nature différente de l’impôt de droit commun (CE, 20 mai 2016, n° 389994, Société Easy Vista). A l’inverse, une société qui n’est pas soumise à l’impôt pour des raisons purement conjoncturelles telles qu’un déficit (TA Montreuil, 18 avril 2017 n° 1502977) ou une imputation de pertes reportables (CAA Versailles 12 mars 2019 n° 17VE01940, Sté Performing Right Society), n’induit pas qu’elle soit « structurellement exonérée » et ne permet donc pas de lui refuser la qualité de résidente fiscale.

Pour autant, comme le rappelait dans cette affaire le rapporteur public, Olivier Lemaire, lorsqu’un impôt est calculé sur la base d’un taux proportionnel aux bénéfices réalisés, il ne peut être « forfaitaire ». Un impôt forfaitaire est, par définition, un impôt dont le montant n’est pas déterminé à proportion du montant des bénéfices réalisés. Certes, en l’espèce ce taux d’imposition était favorable, en application d’un régime fiscal avantageux, la société tunisienne n’en demeure pas moins assujettie à l’IS. De la même façon en France, un même impôt peut faire l’objet de taux différents (IS à 15 % ou 33,1/3 par exemple), la résidence fiscale du contribuable ne saurait pour autant être remise en cause.

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