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Covid-19 : Mesures d’urgence et « Aides d’État »

En réponse à la situation actuelle, la Commission européenne a adopté le 19 mars 2020 un cadre temporaire spécifique et valide dans la foulée 3 mesures françaises d’urgence et d’adaptation économique dans le cadre de la réglementation des Aides d’État.

Pour rappel, les principes de base en matière d’Aides d’État sont mentionnés aux articles 107 à 109 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). Conformément à l’article 108, § 3, lorsqu’un un EM envisage d’octroyer un dispositif susceptible d’être considéré comme une « Aide d’État », il doit, préalablement à sa mise en œuvre, notifier cette Aide à la Commission européenne. Une dispense de notification est cependant prévue pour les Aides de minimis n’excédant pas 200 k€ sur une période de 3 exercices fiscaux (Règlement (UE) 2015/1588).

Par ailleurs, si l’Aide d’État n’est pas notifiée à la Commission préalablement à sa mise en place, et est jugée incompatible, les entreprises qui en ont bénéficié sont susceptibles de devoir rembourser l’Aide ainsi obtenue. La récupération de cette Aide « non-notifiée » auprès du bénéficiaire peut être imposée à un EM par la Commission dans un délai de prescription de dix ans à compter de son versement – elle est par ailleurs assortie de lourds intérêts de retard courant depuis la mise à disposition de l’aide.

La France a déjà été condamnée pour des Aides mises en place dans le cadre de textes spécifiques du Code général des impôts : par exemple, en 2003 au titre de l’exonération d’impôt applicable aux activités issues de la reprise d’entreprises en difficulté (ancien article 44 septies du CGI) et plus récemment en 2017 au titre de l’exonération d’impôt sur les sociétés applicable aux ports autonomes.

Les avantages fiscaux peuvent notamment être qualifiés d’Aides d’État lorsque les 4 critères suivants sont remplis (voir communication de la Commission publiée au JOCE 1998 C/384/3) : une aide accordée à une entreprise, par l’État au moyen de ressources publiques, procurant un avantage sélectif, et affectant les échanges entre EM et la concurrence.

L’article 107 du TFUE autorise toutefois certains types d’Aides, parmi lesquelles :

Dans le contexte actuel de difficultés économiques liées à l’épidémie de COVID‑19, la Commission européenne a assoupli la réglementation des Aides d’État. Elle a ainsi reconnu que les EM peuvent concevoir de larges mesures de soutien conformes aux règles en vigueur en matière d’Aides d’État et a notamment précisé que :

La Commission souligne que cet encadrement temporaire comporte un certain nombre de « garde-fous» (par ex. rattachement des prêts ou des garanties bonifiés en faveur des entreprises à l’échelle de leur activité économique, par référence à leur masse salariale, à leur chiffre d’affaires ou à leurs besoins de liquidités, etc..).

Dans ce contexte temporaire, les Aides doivent toujours être notifiées par les EM à la Commission qui vérifie – avant de donner son accord – que les mesures sont nécessaires, appropriées et proportionnées pour remédier à une perturbation grave de l’économie d’un EM, conformément à l’article 107, § 3, point b), du TFUE et aux conditions énoncées dans l’encadrement temporaire.

Dans les 48 heures suivant l’entrée en vigueur de l’encadrement temporaire, la Commission a ainsi approuvé 3 régimes d’Aides d’État français (qui devraient mobiliser un montant de 300 Md€) :

Cette validation offre davantage de sécurité juridique aux entreprises bénéficiaires des mesures correspondantes, les Aides jugées incompatibles avec le marché intérieur donnant lieu à restitution intégrale par l’entreprise bénéficiaire à l’EM ayant octroyé l’aide. Dans ce cadre, la Commission est vigilante, la France a pu ainsi se faire rappeler à l’ordre à plusieurs reprises afin d’obtenir ce remboursement auprès des entreprises.

N.b : Pour mémoire, la Commission avait également adopté un cadre temporaire en 2008, en réaction à la crise financière mondiale.