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La CJUE juge que les services de gestion des actifs financiers d’un régime professionnel de pension et de gestion d’un fonds de pension ne constituent pas des opérations d’assurance exonérées de TVA au sens de l’article 135-1-a de la Directive TVA (CJUE, 8 octobre 2020, aff. C-235/19, United Biscuits).
L’affaire, d’origine britannique, concerne la qualification aux fins de la TVA de prestations de services de gestionnaires de placements rendues à la société fiduciaire d’un régime professionnel de pension, auquel étaient affiliés les salariés de la société United Biscuits, ainsi qu’à la fiduciaire du fonds de placement collectif dans lequel étaient investis les actifs du régime de pension.
La réglementation britannique prévoyait que les prestations de services de gestion de fonds de pension pouvaient bénéficier de l’exonération de TVA applicable aux opérations d’assurance lorsqu’elles étaient fournies par un prestataire agréé en qualité d’assureur.
L’affaire
Au cas particulier, les fiduciaires ont sollicité de l’administration fiscale britannique (HMRC) le remboursement de la TVA qui avait grevé les honoraires de gestion de fonds de pension versés à des gestionnaires de fonds de placement, au motif que ces opérations auraient dû être exonérées de TVA y compris lorsque fournies par des prestataires agrées pour de tels services de gestion mais sans disposer de la qualité d’assureur.
A la suite d’un désaccord avec HMRC et saisie par les sociétés requérantes, la juridiction de renvoi britannique a saisi la CJUE d’une question préjudicielle relative au point de savoir si les services en cause peuvent être qualifiés d’« opérations d’assurance » exonérées au sens de l’article 135, paragraphe 1, sous a), de la Directive TVA.
L’Avocat Général avait proposé d’apporter une réponse négative. Cet avis est suivi par la CJUE dans le présent arrêt.
La décision de la CJUE
La Cour rappelle le principe constant selon lequel les termes employés pour désigner les exonérations visées à l’article 135, paragraphe 1 de la Directive TVA sont d’interprétation stricte. A cet égard, les opérations d’assurance se définissent selon une jurisprudence constante par le fait que « l’assureur se charge, moyennant le paiement préalable d’une prime, de procurer à l’assuré, en cas de réalisation du risque couvert, la prestation convenue lors de la conclusion du contrat » (CJUE, 25 février 1999, C-349/96, Card Protection Plan Ltd).
En l’espèce, la Cour relève qu’il n’est pas contesté que les services fournis aux fiduciaires consistaient seulement en la gestion de placements pour leur compte, à l’exclusion de toute indemnisation de risque.
Par conséquent, la Cour conclut que ces prestations ne peuvent être qualifiées d’opérations d’assurance au sens de l’article précité.
La Cour réfute les arguments des fiduciaires selon lesquels, d’autres critères, issus de la jurisprudence de la Cour ou du droit de l’Union en matière d’assurance, pourraient permettre de qualifier une prestation d’« opération d’assurance » pour les besoins de la TVA :
- Bien que la Cour ait pu énoncer, en substance, par le passé, qu’aucune raison n’autorise une interprétation différente du terme « assurance » selon qu’il figure dans les directives relatives à l’assurance ou à la TVA, ces propos ne se référaient pas à la notion d’ « opération d’assurance » au sens de la TVA et ne visaient dès lors pas à compléter cette notion ;
- Les dispositions des directives sur l’assurance ne permettent pas de conclure que les prestations de gestion de fonds de pensions sont susceptibles de relever du champ de l’exonération de TVA des opérations d’assurance. Au sens de ces dispositions, les « opérations » de gestion de fonds de collectifs de retraite sont des activités accessoires aux « assurances » sans pour autant constituer des « assurances » ;
- Bien que le libellé des annexes des directives en matière d’assurance mentionne la gestion des fonds de pension au titre des activités d’assurance (ces annexes utilisant par exemple les termes « branches d’assurance »), hormis les versions danoise et anglaise, la majorité des autres versions qualifient ces activités de « branches » d’activité. La Cour rappelle que cette classification avait pour objet de déterminer les activités (les « assurances » et les « opérations ») dont l’exercice était soumis à agrément obligatoire sans pour autant assimiler ces « opérations » aux « assurances ».
Par cet arrêt, la CJUE confirme sa jurisprudence sur la définition de la notion d’ « opération d’assurance » exonérée de TVA et illustre une nouvelle fois le principe d’interprétation stricte des exonérations.
Pour mémoire, la CJUE avait déjà jugé dans l’arrêt Wheels (CJUE, 7 mars 2013, C-424/11) que la gestion des fonds de pension pouvait être exonérée sur le fondement de l’exonération de la gestion des organismes de placement collectif (article 135-1-g de la Directive TVA) notamment si les investisseurs (bénéficiaires des pensions de retraites) supportent un risque d’investissement. Dans l’affaire Wheels, comme dans l’affaire United Biscuits, cette condition faisait défaut puisque le montant des pensions était prédéfini (régime à prestations définies). La CJUE avait par la suite considéré ce critère comme rempli dans l’arrêt ATP (CJUE, 13 mars 2014, C-464/12, ATP PensionService A/S).