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Imposition d’un État étranger à raison des revenus tirés de la location d’un immeuble en France

Le Conseil d’État pose le principe selon lequel les revenus tirés par un État étranger (en l’espèce le Koweït) de la location d’un bien immobilier en France peuvent y être taxables.

L’État du Koweït, via le fonds Kuweit Investment Authority donnait, en location nue, une tour à La Défense. L’Administration entendait l’assujettir à ce titre à l’impôt sur les sociétés.

Dans une décision publiée au recueil Lebon, le Conseil d’État vient confirmer la position de l’Administration.

Pour mémoire, l’Administration considère de longue date qu’une société étrangère, qui n’exerce en France aucune activité habituelle mais y possède un immeuble à usage commercial ou d’habitation donné en location, est passible de l’IS, en raison de sa forme ou du caractère lucratif de l’opération, sur les profits retirés de cette location en vertu des dispositions de l’article 206, I, du CGI (D. adm. 4 H-1413 n° 61, 1-3-1995, reprise au BOFiP, BOI-IS-CHAMP-60-10-30 n° 340).

Le juge de l’impôt a, quant à lui, dégagé une grille d’analyse applicable aux personnes morales étrangères propriétaires d’immeubles en France.

Il examine, en premier lieu, si les caractéristiques de cette personne morale permettent de l’assimiler à une société française de capitaux, qui serait passible de l’IS à raison de sa seule forme. Si tel n’est pas le cas, alors l’assujettissement à l’IS n’est possible que si la société étrangère se livre à une exploitation lucrative (notamment, CE, 24 mai 2006, n° 278737, Sté Immobilière Saint-Charles, CE, 27 janvier 2013, n° 354994, Ets Poudix).

Dans l’affaire en cause, le Conseil d’État transpose, de manière nous semble-t-il inédite, ce raisonnement à l’hypothèse où les revenus immobiliers sont appréhendés par un État étranger.

Il juge que les dispositions de l’article 206, I du CGI assujettissent à l’impôt sur les sociétés, au-delà des sociétés qu’elles désignent expressément, toutes les personnes morales qui se livrent à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif, sans exclure les États étrangers.

Dès lors, l’activité qu’un État étranger exerce en France est assujettie à l’impôt sur les sociétés si elle relève d’une exploitation à caractère lucratif.

Pour apprécier la lucrativité de l’activité, le Conseil d’État recourt aux critères tenant à l’objet et aux conditions particulières d’exercice de l’activité, qu’il avait dégagés par le passé pour apprécier le caractère lucratif ou non d’une activité exercée par un organisme public français (CE, 20 juin 2012, n° 341410, Commune de la Ciotat).

Relevant que l’activité de location de la tour en litige était réalisée dans des conditions similaires à celles dans lesquelles des entreprises privées exercent leur activité, avec des prix pratiqués correspondant aux prix du marché et une clientèle composée de sociétés commerciales, le Conseil d’État conclut ici au caractère lucratif de l’activité exercée et donc à son assujettissement à l’impôt sur les sociétés.

On notera que, par deux décisions distinctes rendues le même jour, le Conseil d’État s’est également prononcé sur les modalités d’imposition d’autres revenus immobiliers appréhendés par le Koweït (revenus locatifs et plus-values de cession), mais par l’intermédiaire d’une SCI. 

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