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Pacte Dutreil : apprécier l’éligibilité d’une société dont l’activité est mixte

La Cour de cassation, dans un arrêt du 25 janvier 2023 (n°20-23.137) rappelle que la notion de faisceau d’indices est la méthode pour déterminer l’éligibilité d’une société dont l’activité est mixte à l’exonération partielle des droits de mutation à titre gratuit fondée sur la mise en place d’un Pacte Dutreil.

Rappel du dispositif

L’exonération partielle de droits de mutation à titre gratuit fondée sur la mise en place d’un Pacte Dutreil requiert l’exercice par la société concernée d’une activité commerciale, industrielle, artisanale, agricole ou libérale (activités « éligibles »). Cette condition doit ainsi faire l’objet d’une attention particulière en présence d’une société qui exerce plusieurs activités dont certaines sont qualifiées de « civiles ». Tel est notamment le cas des sociétés opérationnelles qui détiennent également des biens immobiliers de rapport ou des participations dans des filiales.

Prises isolément ces activités civiles ne seraient pas éligibles à l’exonération « Dutreil ».

Toutefois tant la jurisprudence que l’administration fiscale reconnaissent la possibilité pour une société qui exerce des activités « mixtes » de bénéficier de l’entière efficacité de l’exonération « Dutreil » sur l’ensemble de la valeur transmise sans application d’un quelconque prorata compte tenu de la composition des actifs de la société concernée. Cette position suppose toutefois que la société exerce une activité commerciale, industrielle, artisanale, agricole ou libérale prépondérante.

Le contribuable doit donc sécuriser en amont de toute opération de transmission, mais aussi pendant toute la période des engagements de conservation, la prépondérance des activités éligibles. A défaut, c’est l’intégralité de l’exonération qui sera remise en cause.

Le faisceau d’indices : une méthode subjective

Initialement l’administration fiscale exigeait le strict respect de deux critères cumulatifs pour valider cette condition :

  1. le chiffre d’affaires procuré par l’activité éligible devait représenter au moins 50 % du montant du chiffre d’affaires total
  2. le montant de son actif brut immobilisé devait représenter, en valeur réelle actualisée, au moins 50 % du montant total de cet actif brut.

Censurée par les plus hautes juridictions (CE, décision du 23 janvier 2020, n° 435562 ; Cass. Com., décision du 14 octobre 2020, n° 18-17.955), l’administration fiscale a mis en conformité sa doctrine lors de la refonte opérée le 21 décembre 2021, en abandonnant ces deux critères pour retenir une appréciation « en considération d’un faisceau d’indices déterminés d’après la nature de l’activité et les conditions de son exercice ».

L’Administration a toutefois pris soin de prendre acte « à titre de règle pratique » d’une présomption du caractère « prépondérant » des activités industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale d’une société lorsque ces deux critères précités viendraient à être respectés. Il est intéressant de noter que l’administration fiscale inclut même désormais les actifs circulants pour l’appréciation du second critère relatif à la composition de l’actif afin de tenir compte d’une certaine réalité économique.

Cet assouplissement a ouvert le champ d’application du Pacte Dutreil aux sociétés qui exercent une activité mixte sans toutefois respecter le double ratio de chiffre d’affaires et d’actif brut. Mais il a également introduit un élément plus « subjectif » en faisant référence à l’appréciation d’un « faisceau d’indices » qui, lorsqu’il n’est pas suffisamment maitrisé, devient source d’insécurité juridique.

La référence à la notion du faisceau d’indices devient ainsi la norme.

C’est d’ailleurs ce qu’a rappelé la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 25 janvier 2023, en soulignant que l’administration fiscale ne peut systématiquement sanctionner les contribuables qui ne respectent pas les deux ratios de chiffre d’affaires et d’actif brut « sans examiner, […], les autres indices fondés sur la nature de l’activité de la société et les conditions de son exercice ».

La décision de renvoi de la Cour d’appel de Versailles devrait apporter aux praticiens des éclairages précieux sur les éléments constitutifs du « faisceau d’indices » à prendre en compte et ainsi sécuriser les contribuables qui mettraient en œuvre ce dispositif.

A suivre…

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