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Prélèvement à la source : quelles conséquences pour les bailleurs ?

Prélèvement à la source : quelles conséquences pour les bailleurs ?

Cet article a initialement été publié dans la revue « Le magazine 25 Millions de Propriétaires de l’UNPI » de Janvier 2018 et est reproduit sur notre blog avec accord de l’éditeur.

La mise en place du prélèvement à la source supprime l’année de décalage entre l’année de déclaration des revenus et celle de leur imposition. Les revenus tirés de la location d’immeubles feront l’objet de prélèvements, sous forme d’acomptes,par l’administration fiscale au titre de l’impôt sur le revenu 2019. Initialement prévue au 1er janvier 2018, cette mesure a été repoussée au 1er janvier 2019, c’est-à-dire, à l’imposition des revenus perçus au cours de l’année 2019. Pour éviter une double imposition au titre des revenus 2018, il est prévu un mécanisme de crédit d’impôt qui viendra s’imputer sur le montant de l’impôt qui sera prélevé à la source en 2019. Ce report pose la délicate question du traitement réservé aux dépenses dont l’engagement était prévu dès 2018 et plus particulièrement celle des travaux qui devaient être réalisés cette même année. Ai-je toujours intérêt à réaliser des travaux dans les logements mis en location dès 2018 ? Ou est-il plus opportun de reporter leur réalisation aux années futures ?

Qui est concerné par la réforme ?

Ont vocation à être directement concernés par la mise en place de ce prélèvement les bailleurs de biens immobiliers soumis à l’impôt sur le revenu, c’est-à-dire les personnes physiques donnant en location des immeubles nus (qui relèvent des revenus fonciers), ainsi que ceux tirant des revenus de la location meublée (générant des Bénéfices Industriels et Commerciaux ou « BIC »).

Il s’agit pour ces derniers aussi bien des locations de longue durée que des locations saisonnières (par exemple Airbnb). A noter que les organismes de placement collectif immobilier (OPCI) sont également concernés par la mise en place du prélèvement à la source, tout comme les sociétés civiles de placement immobilier (SCPI).

Que va changer le prélèvement à la source pour l’imposition de ces revenus ?

Nous paierons en 2019 l’impôt sur le revenu perçu en 2019. Qu’il s’agisse des revenus fonciers ou des BIC, l’impôt sur le revenu de l’année en cours fera l’objet d’acomptes calculés par l’administration fiscale et payés mensuellement ou trimestriellement. C’est pourquoi, dans ce cas on parlera « d’acomptes contemporains » ; le prélèvement à la source étant réservé aux hypothèses de paiement par le biais d’un tiers (employeur par exemple sur les salaires versés).

Les acomptes seront calculés sur la base de la situation passée et prélevés directement par l’administration fiscale sur le compte du contribuable.

La déclaration de revenus devra toujours être adressée chaque année afin de faire le bilan et prendre en compte l’application d’éventuelles réductions ou crédits d’impôts.

Les acomptes sont calculés sur la base des revenus perçus l’année précédente, si je loue occasionnellement mon bien et que mes revenus varient fortement d’une année sur l’autre, que se passera-t-il ?

L’imposition des revenus se fera sur la base des revenus perçus l’année précédente ; une prise en compte des revenus au fil de l’eau s’avérant trop complexe.

Ce dispositif paraît adéquat dans le cas de revenus récurrents d’une année sur l’autre. Cela devient plus délicat en cas de variation importante des revenus.

C’est pourquoi, il est prévu, en cas de forte variation des revenus, qu’une actualisation du montant des acomptes soit possible en cours d’année à la demande du contribuable.

Le report de la réforme au 1er janvier 2019 a t-il un impact sur l’imposition des revenus ?

Il était nécessaire d’assurer l’année de transition afin d’éviter que les revenus de l’année 2018 ne soient doublement imposés en 2019 (paiement de l’impôt 2018 en 2019 au titre du système actuel et prélèvement en 2019).

C’est pourquoi, l’année 2018 sera une année « blanche », l’imposition des revenus, hors revenus exceptionnels, étant éliminée par un mécanisme de crédit d’impôt (Crédit d’Impôt Modernisation du Recouvrement – CIMR).

Cela signifie-t-il que du fait de cette année blanche, il n’y aurait donc aucun intérêt à engager des dépenses de travaux en 2018 ?

En présence de revenus tirés de la location meublée, les dépenses de travaux des recettes tirées de la location sont déduites pour établir le bénéfice net qui sera imposé entre les mains du titulaire. La déduction des dépenses de travaux en 2018, n’a donc aucun intérêt compte tenu de l’année blanche.

En ce qui concerne les locations nus, imposées dans la catégorie des revenus fonciers, les choses ne sont pas si simples. Afin de soutenir les entreprises du bâtiment, et éviter les tentatives d’optimisations consistant à repousser l’engagement de travaux à une année « plus favorable fiscalement », le gouvernement a prévu un dispositif particulier.

Les travaux d’entretien ou de rénovation qui appartiennent à la catégorie des « charges pilotables » pourront au mieux générer un déficit foncier reportable les années suivantes, en l’absence de revenus imposables en 2018. En revanche, ces charges seraient déductibles des revenus fonciers 2019 à hauteur de la moyenne des travaux réalisés en 2018 et 2019.

Les charges pilotables s’entendent de celles qui n’ont pas le caractère d’urgence et dont le bailleur peut maitriser le calendrier, telles que les dépenses de réparation, d’entretien et d’amélioration.

Ainsi, prenons un exemple :

Si vous engagez des travaux de rénovation (peinture, plomberie…) en 2018 pour un montant de 7 000 € et que vous percevez en 2018, 20 000 € de loyers, les revenus nets fonciers générés s’élevant à 13 000 € seront non imposables au titre de l’année 2018 compte tenu de l’année blanche.

Ces dépenses de travaux pourront néanmoins être imputées pour moitié en 2019, donc à hauteur de 3 500 €.

Si ces travaux étaient réalisés en 2019, les dépenses pouvant venir en déduction du revenu tiré de la location auraient été du même montant, soit 3 500 €.

Ainsi, hormis en cas d’existence de revenus exceptionnels générés en 2018, différer la réalisation des travaux à 2018 ou 2019 n’emporte aucun avantage fiscal ; le montant déductible reste le même.

Est-il donc préférable d’attendre l’année 2020 ?

En l’état actuel des textes, pour les revenus tirés de la location nue, il serait en effet préférable d’attendre 2020, puisque les dépenses de travaux seront alors déductibles pour 100% de leur montant.

Si nous reprenons l’exemple précité, les 7 000 € de dépenses pourront être déduits en 2020 contre 3 500 € en 2018 ou en 2019. En cas de location meublée, l’intégralité des dépenses de travaux demeure déductible qu’ils soient réalisés en 2018 ou en 2019.

Le résultat serait-il différent en présence de revenus exceptionnels en 2018 ?

Il faut comprendre que les revenus exceptionnels sont ceux qui ne sont pas tirés de l’exécution normale du contrat de location (indemnités de pas-de-porte, arriérés de loyers…).

Ces revenus n’entrent pas dans le champ d’application du CIMR et resteront donc imposés en 2018. En présence de revenus exceptionnels, il peut donc être intéressant d’effectuer des travaux dès 2018 afin de pouvoir déduire 100 % de ces dépenses, voire créer du déficit foncier reportable.

A ce titre, quel est l’impact de la réforme sur le déficit foncier ?

Pour rappel, actuellement, les déficits fonciers (autres que les intérêts d’emprunt) sont imputables sur le revenu global à hauteur de 10 700 € par an. Au-delà, ils peuvent être imputés sur les revenus fonciers des dix années suivantes.

Le plafond du déficit foncier imputable ne serait pas modifié et demeurerait de 10 700 € par an.

Si les travaux réalisés en 2018 génèrent un déficit foncier, celui-ci sera déductible du revenu global 2018 dans la limite de 10 700 €.

Au-delà, ce déficit pourra être déduit les années suivantes.

Dès lors, si vous avez prévu de réaliser de gros travaux en 2018, dont le montant dépasse largement le plafond de 10 700 €, il peut être intéressant de dégager un déficit reportable.

Ai-je intérêt à louer mon bien par le biais d’une société ?

L’investissement dans l’immobilier peut se faire par le biais d’une structure dite translucide (Société civile immobilière soumise à l’impôt sur le revenu) ou opaque (société soumise à l’impôt sur les sociétés).

Dans le premier cas, l’imposition des bénéfices sera la même que dans le cadre de la perception directe des revenus fonciers.

Chaque associé de la société est redevable de l’impôt sur les revenus, à hauteur de ses parts dans la société. Ces revenus faisant l’objet du prélèvement à la source dans les mêmes conditions qu’en cas de détention directe, l’intérêt de recourir à ce type de structure devrait donc être limité.

Investir par le biais d’une société soumise à l’impôt sur les sociétés pourrait être avantageux dans la mesure où les dépenses de travaux seront en principe déductibles. Mais dans ce cas l’imposition « globale » pourrait s’avérer plus lourde. En effet, un premier impôt est dû au niveau de la société (le taux de droit commun étant de 33,33 % des bénéfices) puis en cas de redistribution aux actionnaires, le dividende étant soumis au prélèvement forfaitaire unique actuellement en cours de discussion au Parlement (« flat tax » de 30 %).

A signaler : le cas « hybride » de la location meublée professionnelle ou non professionnelle (LMNP) qui présente des attraits spécifiques en ce qu’elle permet l’amortissement des constructions, les plus-values réalisées pouvant bénéficier d’exonérations. Une analyse au cas par cas est nécessaire en fonction des objectifs poursuivis à plus ou moins long terme.

Qu’en est-il pour les prélèvements sociaux ?

Un crédit d’impôt doit également permettre d’effacer les prélèvements sociaux dus au titre de l’année 2018. Dans le même esprit que le « CIMR impôt sur le revenu », le « CIMR prélèvement sociaux » sera déterminé en appliquant au montant des revenus non exceptionnels le taux des prélèvements sociaux, c’est-à-dire, 17,2% pour les revenus du patrimoine et 9,7% pour les revenus d’activité.

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