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Report déficitaire et identité d’entreprise (régime pré-2e LFR 2012)

Le Conseil d’Etat rappelle que la mise en œuvre du droit au report déficitaire est subordonnée notamment à la condition qu’une société n’ait pas subi, dans son activité, des transformations telles qu’elle n’était plus, en réalité, la même.

Avant l’adoption de la 2e LFR pour 2012, la loi fiscale disposait simplement que le changement de l’objet social ou de l’activité réelle d’une société emportait cessation d’entreprise, évènement entraînant la perte du droit au report de ses déficits (CGI, art. 221-5, ancienne rédaction).

Dans ce contexte, la jurisprudence avait précisé, d’une part, que la mise en œuvre du droit au report déficitaire était subordonnée notamment à la condition qu’une société n’ait pas subi, dans son activité, des transformations telles qu’elle n’est plus, en réalité, la même et, d’autre part, que la perte du report déficitaire ne pouvait être encourue que si le changement d’activité était réel, profond et définitif.

S’agissant des conséquences d’une filialisation d’activité, la doctrine administrative a toujours soutenu la thèse selon laquelle une société qui exerce une activité commerciale ou industrielle prépondérante, change d’activité, lorsqu’une opération de restructuration limite son activité réelle à la seule gestion de participations.

On sait que le juge a considéré qu’une société qui avait cessé d’exercer son activité de transport routier, transférée à une filiale détenue à 99 %, et qui se limitait ensuite à une activité de holding, doit être regardée comme ayant changé d’activité et, par suite, comme n’étant pas en droit d’imputer sur les bénéfices procurés par l’activité nouvelle les déficits subis dans le cadre de l’activité initiale (CAA Lyon, 21 juin 2007 n° 03-1753 ; confirmé par CE, 30 juin 2010 n° 308531, SA Compagnie Financière Montrachet).

Cela étant, dans les cas de filialisation progressive de plusieurs activités, la difficulté reste d’apprécier à quelle date survient le changement d’activité. C’est dans une situation de ce type que le juge vient de prendre une position favorable.

Au cas particulier, une société avait exercé depuis sa création en 1975 une activité d’exploitation de fonds de commerce d’articles d’habillement et de rideaux, puis a créé entre 2003 et 2008 six filiales dont l’objet était l’exploitation des fonds de commerce. Au cours de l’exercice clos en 2008, la société a procédé à la fermeture du dernier fonds qu’elle exploitait directement pour se consacrer exclusivement à son activité de holding.

Un service vérificateur a remis en cause l’imputation sur le bénéfice des exercices 2009 et 2010 d’une partie du déficit né à la clôture de l’exercice 2008, au motif que la cessation par la société de son activité de commerce devait être regardée comme un changement d’activité réelle emportant cessation d’entreprise.

Le Conseil d’Etat considère qu’en l’espèce, l’Administration ne pouvait se fonder sur l’activité de l’entreprise depuis sa création pour prétendre au changement d’activité et s’opposer ainsi à l’imputation du report déficitaire, contrairement à ce qu’a admis la CAA de Nancy, dès lors que le déficit effectivement imputé était celui du seul exercice 2008, au titre duquel l’activité de holding de la société constituait déjà une part non marginale de son activité totale.

Cette décision, comme la jurisprudence antérieure, conserve une portée, même si elle est marginale, dans la réglementation actuelle. En effet, lorsque les critères objectifs de présomption de changement d’activité réelle instaurés par la 2eLFR pour 2012 ne sont pas remplis, il ne faut pas perdre de vue que, pour prétendre à l’imputation de son report déficitaire, l’entreprise ne doit pas avoir effectivement changé d’activité réelle (CGI, art. 221-5, a).

Dans le cas d’une filialisation progressive sur plusieurs exercices des différentes activités d’une société, il est intéressant de savoir que si les critères objectifs ne sont pas remplis d’un exercice à l’autre, le changement d’activité réelle ne sera pas apprécié par rapport à l’activité initiale de la société mais que c’est seulement un changement d’activité depuis l’exercice de constatation du déficit qui peut s’opposer à son imputation.

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