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Tempête dans le crédit-bail : la résolution de la vente entraîne sa caducité et il ne produit aucun effet

Tempête dans le crédit-bail : la résolution de la vente entraîne sa caducité et il ne produit aucun effet

Le crédit-bail attire la jurisprudence des chambres mixtes de la Cour de cassation, ce qui n’est pas sans logique s’agissant d’un contrat qui mixte vente, bail, crédit et mandat !

En 1990, la jurisprudence se fixait sans aucune ambiguïté en décidant du sort du contrat de crédit-bail en cas de résolution de la vente : « la résolution du contrat de vente entraîne nécessairement la résiliation du contrat de crédit-bail, sous réserve de l’application de clauses ayant pour objet de régler les conséquences de cette résiliation ».

En 2018, dans une affaire d’achat d’un camion équipé d’une grue, financé par un crédit-bail, qui allait se révéler non conforme aux spécifications prévues au bon de commande, une Cour d’appel prononça la résolution de la vente et la caducité conséquente du crédit-bail. Cela obligeait le vendeur à restituer le prix de vente à la banque, et à la banque à restituer les loyers versés.

La Cour de cassation juge « qu’il y a lieu, dès lors, modifiant la jurisprudence, de décider que la résolution du contrat de vente entraîne par voie de conséquence, la caducité, à la date d’effet de la résolution du contrat de crédit-bail et que sont inapplicables les clauses prévues en cas de résiliation du contrat ».

Cette décision met fin à la monotonie sans éclats du monde du crédit-bail, qui s’était conformé et habitué à un régime juridique fort clairement balisé : le contentieux était, sur ces points, quasiment tarie. Las, l’ouvrage (et les solutions conventionnelles) est remis sur la table.

Cet arrêt comporte trois enseignements, dont tous ne sont pas convaincants.

En premier lieu, le détail, technique, de la motivation, indique que la jurisprudence relative à la location financière, qui repose sur l’idée de l’interdépendance entre les contrats, ne s’applique pas au crédit-bail.

En second lieu, la mesure adaptée est la caducité du contrat de crédit-bail en cas de résolution de la vente.

Enfin, les clauses prévues en cas de résiliation du contrat de crédit-bail ne peuvent pas recevoir application (en raison de la caducité).

On ne peut que louer la cohérence de la Cour de cassation à vouloir clarifier et rendre intelligible les règles de droit : de ce point de vue, il est peu discutable que la caducité est la mesure adaptée.

En revanche, la distinction faite entre l’interdépendance des contrats dans la location financière et le « caractère accessoire au contrat de vente » du crédit-bail n’est absolument pas convaincant ; il est même contre-intuitif.

Quant à la déclaration de l’inapplicabilité des clauses organisant les conséquences de la rupture de l’opération, fin de crédit-bail en conséquence de la résolution de la vente, elle ne convainc ni sur le terrain du droit, ni économiquement.

En droit, la Cour de cassation ne vient-elle pas d’affirmer que « en cas de résolution d’un contrat pour inexécution, les clauses limitatives de réparation des conséquences de cette inexécution demeurent applicables » ?

Le Code civil, article 1230, ne prévoit-il pas désormais, depuis sa réforme par ordonnance ratifiée, que « la résolution n’affecte ni les clauses relatives au règlement des différends, ni celles destinées à produire effet même en cas de résolution, telles les clauses de confidentialité et de non-concurrence ».

Et plus généralement, la volonté des parties ne commande-t-elle pas une solution contraire, sous réserve évidemment d’une situation d’abus ou de déséquilibre significatif (ce dernier désormais devenu un élément du droit commun des contrats d’adhésion, art. 1171, ce que sont en général les contrats de crédit-bail).

Ces interrogations ne remettent cependant pas en cause la logique et la cohérence, en droit, de la solution adoptée par la Cour de cassation.

Economiquement, si on perçoit la volonté d’avantager le crédit-preneur, au détriment du crédit-bailleur, cela revient à déplacer la charge du risque, qui était partagée sous l’ancienne jurisprudence, entre le preneur (qui choisit et négocie l’objet de la vente) et le financier (qui permet la réalisation de la vente).

Désormais, ce risque pèse sur le financier … qui ne manquera pas de répercuter cela dans le coût du crédit, au détriment des preneurs. En outre, cela crée une situation d’aléa moral : le preneur n’a pas à besoin d’être diligent au regard de la vente, car si elle rate son objectif, il n’en souffrira d’aucune manière.

Si l’on estime que l’équilibre de l’opération de crédit-bail est excessivement perturbé, il ne reste que la voie d’une convention indépendante, parfaitement autonome, dont l’objet est de couvrir le crédit-bailleur en cas de résolution de la vente : une convention de garantie donc, reposant sur l’aléa de l’échec d’une opération qui lui est extérieure.

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