Mettant un point d’arrêt à un contentieux de place, le Conseil d’État juge que les cotisations individuelles, versées par les établissements de crédit au fonds de résolution unique (FRU – fonds d’urgence utilisable en temps de crise qui vise à empêcher la faillite des banques) ne peuvent être admises en déduction pour la détermination de l’assiette de la CVAE.
Cet arrêt du Conseil d’État s’inscrit dans le prolongement d’un contentieux fiscal initié par plusieurs banques françaises, qui contestaient le refus de l’Administration d’admettre en déduction, pour le calcul de la valeur ajoutée ayant donné lieu au paiement de la CVAE des années 2018 et 2019, les contributions versées au fonds de résolution unique (FRU). Après rejet successif de leurs demandes par les juridictions du fond, elles ont formé des pourvois en cassation devant le Conseil d’État.
Problématique juridique
La question posée était, en substance, de savoir si les contributions individuelles au FRU, instituées par le règlement (UE) n° 806/2014 pour assurer la stabilité financière de l’Union européenne via le mécanisme de résolution unique (MRU), pouvaient être regardées comme des charges déductibles pour le calcul de la valeur ajoutée des établissements de crédit, au sens de l’article 1586 sexies du CGI.
Solution retenue par le Conseil d’État
Le Conseil d’État fonde sa décision sur les éléments suivants :
- Il relève que ces contributions sont dues par les établissements de crédit en exécution d’une obligation légale, dans l’objectif de financer un mécanisme de résolution obligatoire au niveau européen, et dépourvues de contrepartie directe pour ces établissements.
- Compte-tenu de leur nature, le Conseil d’État assimile ces contributions à des « versements institués par l’autorité publique, notamment pour le financement d’actions d’intérêt économique ou social » au sens des dispositions de l’article 514-1 du Règlement du 5 juin 2014 de l’ANC relatif au PCG. Ainsi, il juge qu’elles relèvent de la catégorie comptable des « impôts, taxes et versements assimilés » au sens de ces dispositions, et, au regard du plan comptable des établissements de crédit, du poste 62 « impôts et taxes ». Ces contributions ne constituent donc pas selon le Conseil d’État, des « charges diverses d’exploitation ». Rappelons, à cet égard, que l’ANC n’a émis aucun avis pour qualifier, du point de vue comptable, les contributions individuelles au FRU.
- Le Conseil d’État rappelle que les dispositions de l’article 1586 sexies, III, 2, spécifiques aux établissements de crédit et aux sociétés de financement, fixent une liste limitative des charges admises en déduction pour le calcul de la CVAE, dont sont exclus les impôts et taxes.
Le Conseil d’Etat écarte ainsi l’argument de la banque requérante, qui assimilait les contributions versées au FRU à des primes d’assurance obligatoire ou à des charges d’exploitation. Elle confirme que, dès lors qu’elles doivent être assimilées à des impôts et taxes, elles ne sont pas déductibles de l’assiette de la CVAE.
Portée de la décision
Cet arrêt présente un intérêt majeur pour les établissements de crédit, en précisant la nature et le traitement des contributions individuelles au FRU pour le calcul de la CVAE et rappelle la rigueur de l’interprétation des textes fiscaux. La liste des charges déductibles pour le calcul de la valeur ajoutée servant de base à la CVAE est limitative et l’assimilation de la contribution au FRU à des « impôts et taxes » vient faire obstacle à leur déduction de la base de la CVAE.
