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Cotisations sociales et veille interne : des nouvelles positives sur l’éligibilité des dépenses au CIR

Le Conseil d’Etat juge que la contribution exceptionnelle et temporaire (CET), mise à la charge des entreprises adhérant à une institution relevant de l’AGIRC, constitue une cotisation sociale à retenir au titre des dépenses de personnel pour la détermination du crédit d’impôt recherche. 

Il se prononce également pour la prise en compte au titre de la veille technologique de dépenses de personnels internes, non retenues au titre des dépenses des chercheurs et techniciens de recherche éligibles. 

Les faits 

L’Administration remettait en cause le CIR correspondant : 

La contribution exceptionnelle et temporaire (CET) constitue une cotisation sociale pouvant être retenue au titre des dépenses de personnel 

Le Conseil d’Etat rappelle que sont retenus dans l’assiette du CIR, au titre des dépenses de personnel, les « rémunérations et leurs accessoires, ainsi que les charges sociales, dans la mesure où celles-ci correspondent à des cotisations sociales obligatoires ».  

Il définit ensuite les cotisations sociales obligatoires comme les versements des employeurs aux régimes obligatoires de sécurité sociale, ainsi que les versements destinés à financer les garanties collectives complémentaires instituées par des dispositions législatives ou réglementaires ou les garanties instituées par voie de conventions ou d’accords collectifs, ainsi que par les projets d’accord ou les décisions unilatérales mentionnés à l’article L. 911-1 du CSS, qui ont pour objet d’ouvrir des droits à des prestations et avantages servis par ces régimes au titre de ces garanties.  

Et il complète cette définition en indiquant qu’en font également partie les prélèvements « qui, tout en n’entrant pas en compte pour la détermination du calcul des prestations servies par un régime obligatoire de sécurité sociale, conditionnement l’ouverture du droit à ces prestations et constituent, par leurs caractéristiques, un élément de solidarité interne au régime ». 

Il juge ensuite que ni la FNAL ni l’APEC ne présentent le caractère de cotisations sociales obligatoires (cf également CE, 19/06/2019, n°413000, ST Microelectronics et CAA Paris, 14/04/2016, n°14PA04805, SA AB Science). 

En revanche, la contribution exceptionnelle et temporaire, qui présente un caractère additionnel à la cotisation retraite principale et constitue, compte tenu de son objet et de son faible montant, un élément de solidarité interne au régime, est au nombre des versements qui conditionnent l’ouverture du droit aux prestations du régime et doit être regardée, alors même qu’elle n’est pas prise en compte pour la détermination des points acquis chaque année par les assurés, comme une cotisation sociale au sens du CIR.  

Il retient dès lors une position contraire à celle exprimée par l’Administration dans ses commentaires au BOFiP, qui exclut expressément cette contribution des cotisations obligatoires éligibles (BOI-BIC-RICI-10-10-20-20, 5 décembre 2018, n°320).  

Les dépenses de personnel interne exposées au titre de la veille technologique nécessaire à des opérations de recherche, peuvent être éligibles au CIR

Au terme du j) du II de l’article 244 quater B, peuvent être retenues dans l’assiette du CIR « Les dépenses de veille technologique exposées lors de la réalisation d’opérations de recherche, dans la limite de 60 000 € par an ». 

L’article 49 septies I quater de l’annexe 3 au CGI précise que « la veille technologique s’entend comme un processus de mise à jour permanent ayant pour objectif l’organisation systématique du recueil d’informations sur les acquis scientifiques, techniques et relatifs aux produits, procédés, méthodes et systèmes d’informations afin d’en réduire les opportunités de développement. ». 

Les juridictions de première et seconde instance avaient confirmé la position de l’Administration selon laquelle les dépenses de veille technologique ne pouvaient inclure des dépenses de personnel, ces dernières ne pouvant être prises en compte qu’en application du b) du II de l’article 244 quater B (dépenses de personnels afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche). 

Le Conseil d’Etat censure cette interprétation en affirmant que « les dépenses de personnel qui sont exposées au titre de la veille technologique organisée pour la réalisation d’opérations de recherche et qui ne sont pas au nombre des dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche mentionnées au b du II de l’article 244 quater B » sont éligibles au CIR dans la limite de 60.000 €

Il en résulte que peuvent être retenues les dépenses de personnel internes afférentes à de la veille technologique, peu important ces personnels qualifient ou pas de chercheurs ou techniciens de recherche. 

Le mot de nos experts 

L’admission de la CET au titre des cotisations sociales obligatoires éligibles au dispositif du CIR, quand bien même cette contribution n’ouvre pas en tant que telle de droits particuliers pour le salarié (contribution de solidarité), ouvre des perspectives intéressantes pour apprécier l’éligibilité de cotisations sociales plus récentes et pour l’instant non visées par la doctrine administrative, en particulier la contribution d’équilibre technique et la cotisation d’équilibre général, créées suite à la fusion du régime AGIRC-ARRCO en 2019

Concernant la veille technologique, on remarquait depuis plusieurs années les réticences de l’administration quant à l’éligibilité de dépenses de personnels internes. La décision claire du Conseil d’Etat permettra de retenir de la même manière les dépenses de veille qu’elles soient réalisées en interne (par des chercheurs, techniciens de recherche ou des personnels n’ayant pas cette qualification) ou externalisées.

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