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Inconstitutionnalité du régime fiscal relatif au versement d’une prestation compensatoire mixte inférieure à 12 mois

Est jugé inconstitutionnel, sur le fondement du principe d’égalité devant les charges publiques, le traitement fiscal de la prestation compensatoire mixte inférieure à 12 mois.

Cette décision est l’occasion de revenir sur les effets dans le temps des décisions d’inconstitutionnalité du Conseil constitutionnel.

Déclaration d’inconstitutionnalité des prestations compensatoires mixtes inférieures à 12 mois

Pour mémoire, le traitement fiscal du versement de la prestation compensatoire obtenue dans le cadre d’un divorce dépend entre autres de ses modalités de versements :

À la suite d’une QPC, le Conseil constitutionnel a considéré, le 31 janvier dernier, que les dispositions du II de l’article 199 octodecies du CGI, dans sa rédaction applicable depuis le 1er janvier 2005, sont contraires au principe d’égalité devant les charges publiques et par conséquent inconstitutionnelles. Il relève qu’elles privent le débiteur d’une prestation compensatoire du bénéfice de la réduction d’impôt sur les versements en capital intervenus sur une durée inférieure à 12 mois au seul motif que ces versements sont complétés d’une rente (Conseil constitutionnel n° 2019-824 QPC).

Une différence qui ne se justifie dès lors par aucun des critères objectifs et rationnels en rapport avec l’objet de la loi.

Effets dans le temps de cette déclaration d’inconstitutionnalité

Par cette décision, le Conseil constitutionnel a donc censuré le dispositif, et précisé que :

  1. « En premier lieu, les dispositions déclarées contraires à la Constitution, dans leur rédaction contestée résultant de la loi du 26 mai 2004, ne sont plus en vigueur » [i.e. les dispositions déclarées contraires à la Constitution, dans la rédaction dans laquelle le Conseil les a examinées, ne sont plus en vigueur, ce qui ne permet donc pas leur abrogation]
  2. « En second lieu, la déclaration d’inconstitutionnalité peut être invoquée dans les instances introduites à la date de publication de la présente décision et non jugées définitivement. »

En effet, en application des dispositions de l’article 62 de la Constitution :

« Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l’article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d’une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d’être remis en cause. »

Le Conseil constitutionnel dispose donc d’une grande latitude pour moduler les effets dans le temps de ses décisions.

En l’espèce, il juge que sa déclaration d’inconstitutionnalité peut être invoquée dans les instances introduites à la date de la publication de sa décision (soit le 1er février 2020) et non jugées définitivement.

Une « formule » déjà utilisée à plusieurs reprises :

Éclairés par ces lectures, et malgré certains débats qui subsistent encore en doctrine quant à l’interprétation que l’on peut donner à cette « formule » utilisée par le Conseil constitutionnel (pour les réclamations introduites postérieurement à sa décision), il semble donc raisonnable de penser que cette déclaration d’inconstitutionnalité relative au régime fiscal des prestations compensatoires mixtes inférieures à 12 mois peut être avancée à l’appui des nouvelles réclamations introduites après la présente décision, dans la mesure où elles sont déposées dans le délai de réclamation prévu à l’article R. 196-1 du LPF.

Au cas présent, sont donc visées les réclamations relatives à l’impôt sur les revenus de 2017, 2018 et 2019.