Site icon Deloitte Société d'Avocats

Activité occulte et possibilité pour le contribuable d’apporter la preuve d’une erreur

Photo du Conseil d'Etat

Le Conseil d’Etat confirme que le contribuable peut s’opposer tant à la majoration de 80 %, qu’au délai spécial de reprise de dix ans en cas d’activité occulte, s’il établit qu’il a commis une erreur justifiant qu’il ne se soit acquitté d’aucune de ses obligations déclaratives (sous l’empire de l’ancienne convention franco-luxembourgeoise).

On sait qu’en cas de découverte d’une activité occulte, le droit de reprise de l’Administration s’exerce jusqu’à la fin de la 10e année suivant celle au titre de laquelle l’imposition est due. L’activité est considérée comme occulte lorsque le contribuable n’a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu’il était tenu de souscrire, et qu’il n’a pas fait connaître son activité à un CFE ou au greffe du tribunal de commerce, ou qu’il s’est livré à une activité illicite (LPF, art. L. 169 et L. 174).

En outre, la découverte d’une telle activité est susceptible d’entraîner l’application d’une majoration de 80 % (CGI, art. 1728,3).

En l’espèce, à la suite d’une procédure de visite et de saisie, l’Administration avait considéré qu’une société luxembourgeoise disposait d’un établissement stable en France. Dans le cadre de la vérification de comptabilité qui s’en est suivie, elle a relevé le caractère occulte de l’activité de cet établissement, la société luxembourgeoise n’ayant pas déposé les déclarations qu’elle était tenue de souscrire et n’ayant pas davantage fait connaître son activité à un centre de formalité des entreprises.

Pour mémoire, la preuve du caractère occulte est présumée apportée dès lors que le contribuable ne s’est pas acquitté de ces obligations déclaratives, sans que l’Administration ne soit tenue de démontrer de surcroît que son comportement révélait son intention de dissimuler son activité (CE, 7 décembre 2015, n° 368227, Frutas y Hortalizas SL).

Le contribuable peut toutefois renverser cette présomption, en faisant valoir qu’il a commis une erreur justifiant qu’il ne se soit acquitté d’aucune de ses obligations déclaratives (solution d’abord limitée à l’application de la majoration pour activité occulte, CE, 7 décembre 2015, n° 368227, Sté Frutas y Hortalizas Murcia SL, puis transposée à l’application du délai spécial de reprise de dix ans, CE, 21 juin 2018, n° 411195).

La société se prévalait en l’espèce d’une telle erreur, arguant qu’elle avait déclaré son activité au Luxembourg et y avait souscrit ses déclarations fiscales.

Le Conseil d’Etat confirme que dans ce cas, la justification de l’erreur commise doit être appréciée en tenant compte tant du niveau d’imposition dans cet autre Etat que des modalités d’échange d’informations entre les administrations fiscales des deux Etats.

Il relève que l’article 22 de la convention franco-luxembourgeoise alors applicable, relatif à l’échange d’informations, n’ouvrait qu’une possibilité restreinte d’assistance administrative (limitation du champ des renseignements susceptibles de faire l’objet d’échanges), ne permettant pas d’assurer la communication à l’administration française de l’ensemble des informations nécessaires à l’application de la loi fiscale française.

Aussi, considère-t-il qu’en tenant compte de cet élément pour juger que la société luxembourgeoise n’établissait pas avoir commis une erreur de nature à justifier qu’elle ne se soit pas acquittée de ses obligations déclaratives en France, les juges du fond ont suffisamment motivé leur décision. En particulier, ils n’étaient pas tenus de rechercher si les modalités d’échange d’informations entre les autorités françaises et luxembourgeoises avaient été de nature à faire obstacle en l’espèce à l’établissement des rectifications prononcées.

Exit mobile version