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Analyse des mesures marquantes du PLFSS 2016

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 (Consulter le texte définitif) vient d’être définitivement adopté par l’Assemblée nationale en 3e et dernière lecture, sous réserve de la décision du Conseil constitutionnel (saisine du 4 décembre 2015, n° 2015-723DC).
Nous retiendrons notamment les mesures suivantes.

Fiscalité des Entreprises

Aménagement de la C3S (art. 9)

L’abattement d’assiette applicable pour le calcul de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés (C3S) due à compter du 1er janvier 2016 est porté à 19 millions d’euros.

Pour mémoire, la C3S est prélevée au taux de 0,13% sur le chiffre d’affaires global annuel hors taxes des sociétés. Le gouvernement avait annoncé en 2014, dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité, la suppression progressive de la C3S en 3 ans à compter de 2015. Dans cette perspective, la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 avait instauré un abattement d’assiette de 3,25 millions d’euros pour le calcul de la C3S due à compter du 1er janvier 2015.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, afin de poursuivre cet engagement, porte le montant de cet abattement d’assiette de 3,25 à 19 millions d’euros. On notera que cette contribution devrait disparaître totalement à l’horizon 2017.

Fiscalité des Personnes

ALLÈGEMENT des cotisations sociales patronales jusqu’à 3,5 SMIC (art. 7)

La cotisation d’allocations familiales est abaissée de 1,8 point pour les salariés dont la rémunération annuelle est inférieure à 3,5 SMIC.

La cotisation patronale d’allocation familiale est en principe due au taux de 5,25%. La loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 avait prévu que ce taux soit réduit de 1,8 point pour les salariés dont la rémunération annuelle n’excédait pas 1,6 SMIC.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, mettant en œuvre l’acte II du pacte de responsabilité et de solidarité, étend cette réduction aux rémunérations inférieures à 3,5 SMIC. Seront concernées les rémunérations versées à compter du 1er avril 2016.

Diminution du seuil d’assujettissement aux charges sociales des parachutes dorés (art. 8)

Le seuil d’imposition dès le premier euro à la CSG et aux cotisations sociales, salariales et patronales, des indemnités versées, à l’occasion de la cessation forcée de leurs fonctions, aux mandataires sociaux, dirigeants et assimilés est abaissé de 10 à 5 PASS (soit 190 200 €).

Par ailleurs, la loi nouvelle supprime collatéralement l’assujettissement aux cotisations sociales au premier euro des indemnités de rupture du contrat de travail supérieures à 10 PASS. On remarquera néanmoins que cette suppression ne vise que les cotisations sociales à l’exclusion de la CSG.

Le tableau ci-dessous récapitule ces différentes hypothèses :

 

Montant de l’indemnité < 2 PASS > 2 PASS
< 5 PASS
> 5 PASS
< 10 PASS
> 10 PASS
Cessation forcée Cotisations sociales Exonération totale Exonération à hauteur d 2 PASS Imposition au 1er € Imposition au 1er €
CSG Exonération totale Exonération à hauteur de 2 PASS Imposition au 1er € Imposition au 1er €
Rupture du contrat de travail Cotisations sociales Exonération totale Exonération à hauteur de 2 PASS Exonération à hauteur de 2 PASS Exonération à hauteur de 2 PASS
CSG Exonération totale Exonération à hauteur de 2 PASS Exonération à hauteur de 2 PASS Imposition au 1er €
Modifications apportées signalées en rose.

Cet article est applicable aux indemnités versées au titre d’une rupture de contrat de travail ou d’une cessation forcée notifiée à compter du 1er janvier 2016, ou dont la demande d’homologation a été transmise à compter de cette date.

Simplification du recouvrement des cotisations sociales des indépendants (art. 13)

Le processus de recouvrement des cotisations d’assurance maladie dues par les professions libérales est transféré aux URSSAF à compter d’une date fixée par décret comprise entre le 1er janvier 2017 et le 1er janvier 2018.

Cette disposition simplifiera notamment les démarches des avocats libéraux, qui n’auront plus que deux interlocuteurs (URSSAF et CNBF) au lieu de trois (URSSAF, CNBF et RSI) en matière de paiement des cotisations sociales. Concrètement, les URSSAF se verront confier les missions relatives au calcul, à l’encaissement et au recouvrement amiable et contentieux des cotisations d’assurance maladie.

Réaffectation des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine (art. 24)

La loi prévoit de réaffecter les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine des non-résidents au financement exclusif de prestations sociales non contributives (principalement au FSV et accessoirement à la CADES et à la CNSA).

Cette réaffectation vise à assurer la conformité au droit communautaire du maintien de l’assujettissement aux prélèvements sociaux des revenus du patrimoine des contribuables, résidents ou non, assujettis à la législation sociale d’un autre Etat membre de l’UE, de l’EEE ou de la Suisse. On se souvient en effet que la CJUE, dans un arrêt de Ruyter (CJUE, 26 février 2015, aff. C-623 13, TLS 388), a remis en cause la faculté de soumettre aux prélèvements sociaux les revenus du patrimoine des contribuables affiliés à un régime de sécurité sociale d’un de ces Etats.

On relèvera que les différentes commissions parlementaires avaient pourtant fait part de leur scepticisme sur la capacité de cette mesure à assurer l’euro-compatibilité du dispositif. Il est donc probable que cette réaffectation ne suffise à tarir le contentieux pour l’avenir.

S’agissant des impositions recouvrées par voie de rôle, ces modifications s’appliqueront aux produits recouvrés par la voie de ceux émis à compter du 1er janvier 2016. Pour les impositions non recouvrées par voie de rôle, cette mesure concernera les impositions assises sur les opérations dont le fait générateur interviendra à compter du 1er janvier 2016.