La loi relative à la lutte contre la fraude, définitivement votée par le Parlement le 10 octobre dernier, a été publiée au Journal officiel du 24 octobre, sans avoir fait l’objet d’une saisine préalable du Conseil constitutionnel. Ses mesures recouvrent pour l’essentiel 3 thématiques que sont le renforcement des moyens de contrôle et des sanctions à disposition de l’Administration, le renforcement du contrôle des opérations à l’étranger et l’articulation des procédures pénales et fiscales. En outre, la loi couvre un volet de lutte contre la fraude sociale, qui ne sera pas développé ici.
En cas de contrôle inopiné prévu à l’article L. 47 du LPF, consistant en la constatation matérielle des éléments physiques de l’exploitation ou de l’existence et de l’état des documents comptables, l’Administration, avant tout contrôle au fond, peut effectuer deux copies des fichiers comptables, placées sous scellés : l’une, conservée par l’Administration, l’autre remise à l’entreprise vérifiée. En cas d’altération des scellés ou des fichiers copiés (ou de non présentation par l’entreprise de sa copie propre des fichiers), le service vérificateur peut effectuer sur la copie qu’il a conservée les tris, classements et calculs afin de s’assurer de la concordance des documents comptables avec les déclarations fiscales déposées. Il peut également, dans ces mêmes circonstances ou en cas d’impossibilité d’effectuer tout ou partie des traitements informatiques nécessaires au contrôle des diverses composantes de la comptabilité informatisée (données élémentaires, traitements, documentation), réaliser ces traitements sur sa copie des fichiers.
Désormais, lorsque l’Administration envisagera des traitements informatiques de la comptabilité tenue au moyen de systèmes informatisés, elle pourra consulter la copie des fichiers (faite dans le cadre du contrôle inopiné) afin de la comparer aux fichiers, copies de fichiers nécessaires à la réalisation des traitements, et résultats des traitements, réalisés et mis à disposition par le contribuable. La comparaison ainsi effectuée sera opposable à l’entreprise. Une telle consultation/comparaison pourra intervenir alors même qu’il n’y a pas eu altération des fichiers copiés ou des scellés. Elle s’applique aux avis de vérification remis à compter du lendemain de la publication de la présente loi, soit à compter du 25 octobre 2018.
En tout état de cause, les données copiées par l’Administration dans le cadre d’une vérification inopinée, ne peuvent pas être utilisées par elle, avant tout engagement d’une procédure de contrôle fiscal.
L’avis du praticien : Magali Besnard
Ce dispositif nous semble avoir vocation à s’appliquer en priorité aux TPE et PME et ce pour plusieurs raisons :
- La réalisation des copies doit se faire dans un laps de temps réduit, ce qui induit :
- Un volume de données réduit à copier. Aussi, les systèmes utilisés ne doivent pas être trop complexes pour qu’il soit techniquement possible de réaliser une copie en une journée.
- Des archives fiscales déjà constituées. L’Administration ne pourra pas exploiter les sauvegardes sans avoir la disposition du système utilisé par la société.
- L’Administration recherche généralement à disposer des copies des fichiers de systèmes de caisses :
- Cela est rendu possible par l’obligation depuis début 2018 d’utiliser un logiciel de caisse certifié qui doit notamment prévoir un archivage des données.
Les copies des fichiers pourront être utilisées par l’Administration en cas de réalisation de traitements informatiques et être comparées aux résultats des traitements réalisés par le contribuable. Ce dernier sera amené à justifier les éventuels écarts constatés. En pratique, ce renforcement du dispositif « anti-modification » des données comptables sera surtout utilisé dans le cadre des contrôles inopinés des petites et moyennes structures mais confirme une nouvelle fois le souhait de l’Administration de mettre les données électroniques au cœur du contrôle fiscal.