La Commission des finances de l’Assemblée nationale a achevé l’examen de la 1re partie du PLF 2019, préalablement à son examen en séance publique en 1re lecture (à compter du 15 octobre).
Ces amendements doivent, bien entendu, encore être discutés en séance publique, avant d’être votés. Toutefois, dès lors que la majorité d’entre eux ont été présentés par le rapporteur général de la Commission des finances (ou ont reçu son soutien), il est vraisemblable qu’ils reçoivent le support de la majorité présidentielle.
Réduction du taux de la quote-part de frais et charges sur les plus-values de cessions de titres de participation (art. 12)
La Commission des finances s’est opposée à un abaissement de 12 % à 5 % du taux de la QPFC sur les plus-values de cessions de titres de participation, et souhaite voir restreint le champ d’application de la mesure.
Il est proposé que le taux soit abaissé à 5 %, seulement lorsque la cession est réalisée entre :
- des sociétés membres d’un groupe intégré
- une société membre d’un groupe intégré et une société soumise à un impôt équivalent à l’impôt sur les sociétés dans un Etat membre de l’Union européenne ou dans un autre Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales qui, si elle était établie en France, remplirait les conditions pour être membre de ce groupe, en application des articles 223 A ou 223 A bis du CGI, autres que celle d’être soumise à l’impôt sur les sociétés en France
- une société non intégrée et une société soumise à un impôt équivalent à l’impôt sur les sociétés dans un Etat membre de l’Union européenne ou dans un autre Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales, sous réserve que ces sociétés eussent rempli les conditions pour constituer un groupe, si la seconde société était établie en France (sauf si le défaut d’intégration résulte de la seule absence des options et accords à formuler)
Ainsi, le champ du taux de 5 % serait cantonné aux mêmes hypothèses que celles bénéficiant du taux de QPFC de 1 % pour l’application du régime mère fille.
Limitation de la déductibilité des charges financières (art. 13)
Clause de sauvegarde en cas de situation de sous-capitalisation
Le projet de texte prévoit qu’en cas de situation de sous-capitalisation, la déduction des charges financières nettes sera restreinte à hauteur de 10 % de l’EBITDA ou de 1 M€ si ce montant est plus élevé, sans clause de sauvegarde.
La Commission des finances vient d’adopter un amendement visant à l’instauration d’une telle clause (hors intégration fiscale, comme dans l’intégration fiscale). Le dispositif renforcé prévu en cas de sous-capitalisation ne s’appliquerait pas si l’entreprise apporte la preuve que le ratio d’endettement du groupe consolidé auquel elle appartient est supérieur ou égal à son propre ratio d’endettement. Ainsi, dans cette hypothèse, l’entreprise continuerait à bénéficier de l’application des plafonds de droit commun (30 % de l’EBITDA fiscal ou 3 M€) et de la clause de sauvegarde permettant, sous conditions, une déduction complémentaire.
Pour l’application de cette clause de sauvegarde spéciale sous-capitalisation, le ratio d’endettement de l’entreprise correspondrait au rapport existant entre le montant total de ses dettes et le montant de ses fonds propres.
Le ratio d’endettement du groupe consolidé serait déterminé en tenant compte des dettes, à l’exception de celles envers des entreprises appartenant au groupe consolidé. Le ratio d’endettement de l’entreprise serait considéré comme égal au ratio d’endettement du groupe consolidé auquel elle appartient lorsque le premier ratio est supérieur au second ratio de deux points de pourcentage au maximum.
La même clause de sauvegarde serait adaptée aux groupes intégrés.
Clarification sur les éléments à retenir pour déterminer l’EBITDA
L’EBITDA à retenir s’obtient en corrigeant le résultat fiscal soumis à l’IS des charges financières nettes, des amortissements et des provisions admis en déduction, des gains et pertes imposables au taux réduit. Il s’entend de celui obtenu avant imputation des déficits et tient compte des déductions et des abattements pour l’assiette de l’impôt.
Il serait précisé que le résultat fiscal serait corrigé, s’agissant des provisions, des seules provisions pour dépréciation.
Exception en faveur des projets d’infrastructures publiques de long terme (autorisée par l’article 4 de la directive ATAD)
Echapperaient au dispositif nouveau les charges financières supportées par le cocontractant de l’Administration et afférentes aux biens acquis ou construits ou aux opérations réalisées par lui dans le cadre :
- d’un marché public de travaux prévu au I ou au IV de l’article 5 de l’ordonnance n° 2015 899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics
- d’un marché de partenariat prévu à l’article 67 de l’ordonnance n° 2015 899 du 23 juillet 2015 précitée
- d’un contrat de concession prévu au I ou au III de l’article 6 de l’ordonnance n° 2016 65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession
- d’un bail emphytéotique prévu à l’article L. 1311-2 du code général des collectivités territoriales
- d’un contrat en cours d’exécution conclu avant l’entrée en vigueur des dispositions mentionnées aux 1° à 4° et qui, eu égard à son objet, aurait relevé du champ d’application de ces dispositions ou de l’article L. 6148-2 du Code de la santé publique dans sa rédaction en vigueur avant le 1er avril 2016.
Cette possibilité s’inscrit dans la dérogation prévue à l’article 4, 4 de la directive ATAD, qui permet de ne pas inclure dans le périmètre des charges financières faisant l’objet d’une déductibilité encadrée, les intérêts qui sont afférents à des projets d’infrastructures publiques de long terme.
Réforme du régime d’imposition des produits de cession ou de concession de brevets (art. 14)
Baisse du taux réduit de 15 % à 10 %
Le PLF prévoyait le maintien de l’actuel taux de 15 %, qui pourrait finalement être abaissé à 10 %.
Le taux applicable aux revenus tirés d’actifs incorporels par un inventeur personne physique serait, lui, réduit de 12,8 % à 10 %.
Modifications du champ d’application
Le projet de texte prévoit que les inventions brevetables non brevetées, jusque-là dans le champ, soient désormais exclues dans le cadre du dispositif nouveau.
Ces inventions, au sens des articles L. 611-10 à L. 611-19 du Code de la propriété intellectuelle, pourraient rester en définitive incluses dans le champ d’application du régime.
Par ailleurs, le dispositif serait étendu à l’ensemble des logiciels originaux protégés par le droit d’auteur (et non plus seulement à ceux n’ayant pas généré de revenus avant le 1er janvier 2019).
- Amendement I-CF439
- (identiques, 1165, 1178 et 1387) – (amendements non défendus par le rapporteur général mais par les députés LREM de la Commission des finances ainsi que certains Modem)
Documentation
Pour mémoire, une nouvelle obligation documentaire visant à faciliter les contrôles de l’Administration serait instaurée. Le texte originel prévoit que, si la documentation n’est pas remise ou est incomplète, l’Administration met en demeure l’entreprise de se conformer à ses obligations. A défaut, une amende correspondant à 5 % des revenus tirés des actifs imposés selon le régime préférentiel serait appliquée.
Cette sanction serait en définitive limitée à 5 % des revenus tirés, non pas de tous les actifs éligibles au régime préférentiel, mais seulement de ceux concernés par la mise en demeure, c’est-à-dire ceux pour lesquels des informations n’ont pas été transmises.
Un amendement de clarification sur le champ de cette obligation documentaire a également été adopté.
Articles 3 (PAS) et 16 (Pacte Dutreil)
Ils doivent, bien entendu, encore être discutés en séance publique avant d’être votés.
Mesures d’accompagnement du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu (art. 3)
Dans le cadre du prélèvement à la source, il est prévu que l’administration fiscale mette le taux qui lui est applicable à disposition du contribuable et qu’elle le transmette au débiteur du PAS (CGI, art. 204 H, I, 4).
En sus de la communication du taux, l’administration fiscale serait également dans l’obligation de fournir au contribuable son calcul.
Dans le cadre de la mise en place du prélèvement à la source au 1er janvier 2019, les contribuables qui bénéficient de certains crédits d’impôt vont percevoir du Trésor Public, au plus tard le 1er mars de l’année de la liquidation de l’impôt afférent aux revenus de l’année précédente, un acompte sur le montant de ces avantages fiscaux.
Outre les différents crédits d’impôts visés initialement par le projet de loi, ouvrirait également droit au bénéfice de cette avance le crédit d’impôt en faveur de l’agriculture biologique (CGI, art. 244 quater L).
Aménagement du « pacte Dutreil transmission » (art. 16)
Les seuils de détention dans l’entreprise transmise requis pour bénéficier du dispositif seraient abaissés comme suit :
- pour les sociétés cotées, de 20 % des droits financiers et des droits de vote actuellement, à 10 % des droits financiers et 20 % des droits de vote
- pour les sociétés non cotées, de 34 % des droits de vote et des droits financiers aujourd’hui, à 17 % des droits financiers et 34 % des droits de vote
Cet aménagement concernerait les engagements collectifs souscrits à compter du 1er janvier 2019.
L’actuel dispositif prévoit que l’engagement collectif de conservation de deux ans est réputé acquis lorsque les parts ou actions détenues depuis deux ans au moins par le défunt ou le donateur, seul ou avec son conjoint ou le partenaire par lequel il est lié par un PACS, atteignent les seuils de détention requis, sous réserve que cette personne ou son conjoint ou son partenaire exerce depuis deux ans dans la société concernée son activité professionnelle principale ou certaines fonctions de direction.
Ce mécanisme serait assoupli, puisqu’il s’appliquerait désormais y compris en cas de détention indirecte (détention de titres d’une société détenant elle-même des titres éligibles au mécanisme Dutreil). Il serait également étendu de manière à tenir compte des parts ou actions détenues par le concubin notoire du contribuable.
Cet aménagement s’appliquerait aux engagements collectifs réputés acquis à compter du 1er janvier 2019.
- I-CF1450
Amendement présenté par le rapporteur général de la Commission des finances - I-1173 identique
Certaines opérations de restructuration de la société pendant les phases d’engagement collectif et individuel de conservation des titres sont autorisées sans remise en cause du régime d’exonération (augmentation de capital, fusion ou scission etc.). Serait ajoutée à cette liste l’hypothèse des offres publiques d’échanges, préalables à une fusion ou une scission, avec application à compter du 1er janvier 2019.
- I-CF1166
- Sous-amendement I-CF1455
Sous-amendement (restrictif) présenté par le rapporteur général de la Commission des finances
Aménagement (à la marge) du dispositif « Dutreil-ISF »
Deux aménagements sont apportés en faveur des contribuables ayant bénéficié du mécanisme « Dutreil-ISF » avant son abrogation :
- l’assouplissement des conséquences de l’apport de titres soumis à engagement de conservation prévu par le PLF 2019 pour le pacte « Dutreil-transmission » serait transposé au « Dutreil-ISF »
- l’obligation annuelle de production d’une attestation serait, de la même manière, supprimée (et remplacée par une simple obligation de production sur demande de l’Administration)
- I-CF1456
Amendement présenté par le rapporteur général de la Commission des finances