Par une décision particulièrement sévère (TA Paris, 16 janvier 2018, n° 1707553, SAS Studialis), le TA de Paris considère qu’une offre de prêt doit être effective et contemporaine afin d’établir de façon certaine le taux de marché applicable.
La déductibilité des intérêts afférents aux sommes laissées ou mises à disposition de la société par des associés ou des entreprises liées est limitée, notamment, par un taux plafond fixé en fonction de la moyenne annuelle des taux effectifs moyens pratiqués par les établissements de crédit pour des prêts à taux variable aux entreprises, d’une durée initiale supérieure à deux ans. Dans le cas où le taux pratiqué est supérieur, la société doit démontrer qu’elle aurait pu obtenir un taux équivalent d’établissements ou d’organismes financiers indépendants, dans des conditions analogues (CGI, art. 212, I et 39, 1-3°).
Dans le cadre d’une opération de LBO, la société requérante a émis, entre fin 2008 et 2012, des emprunts obligataires souscrits par des fonds britanniques, associés d’une société de droit luxembourgeois, elle-même associée de la société requérante. L’Administration a estimé que le taux d’intérêt de 10 % consenti au titre des obligations émises était supérieur à la limite prévue par l’article 212, I du CGI (alors compris entre 2,8 et 4,1 %).
Le TA de Paris s’est en l’espèce montré particulièrement exigeant dans la démonstration du taux de marché applicable aux exercices concernés. L’Administration soutenait sans surprise qu’une offre de prêt effective et contemporaine des opérations tenant compte des caractéristiques propres de la société emprunteuse était seule à même d’établir de façon certaine le taux dont elle aurait bénéficié auprès d’un établissement de crédit ou d’un organisme indépendant.
Le TA a accueilli cette thèse en l’espèce et rejeté les éléments de preuve contraire fournis par la société requérante, parmi lesquels figuraient :
- une offre de prêt émise par une banque début 2008 et correspondant aux caractéristiques des obligations émises, pour un taux de 12 %
- une attestation, fournie par une autre banque, datée de janvier 2015, selon laquelle elle avait été sollicitée par la société requérante à chaque nouvelle émission d’obligations entre 2008 et 2012 et confirmant qu’elle aurait, dans cette hypothèse, pratiqué un taux d’intérêt variant entre 10 et 12 %
- une étude réalisée par un cabinet indépendant excluant une baisse du taux applicable aux obligations du fait de la dégradation du profil de risque de la société requérante et mentionnant des taux allant de 8,32 à 11,68 % sur la période concernée
- et une étude réalisée par une banque sur les taux appliqués sur les marchés européens au cours des années en cause faisant état de taux supérieurs à 10 % pour des financements semblables à l’emprunt obligataire réalisé en l’espèce
Ainsi, aucun de ces documents ne constituait une offre ferme d’une banque. Si le TA de Paris n’érige pas en preuve exclusive la production d’une telle offre, il se montre extrêmement sévère vis-à-vis de la société requérante.
On rappellera que cette question fait l’objet d’une certaine constance de la part de l’Administration, entraînant nécessairement sa récurrence devant les juridictions du fond (voir CAA Paris, 4 novembre 2014, n° 14PA00814, CAA Versailles, 28 mai 2015, n° 14VE01904, ou encore TA Bordeaux, 13 novembre 2014, n° 1302599). Se montrant moins restrictifs, les juges ont ainsi pu admettre des preuves diverses sur la base d’éléments pertinents. Le TA de Montreuil a d’ailleurs récemment jugé que la preuve du caractère normal du taux d’intérêt pratiqué dans le cadre d’un prêt intragroupe pouvait être apportée en produisant des études détaillées et complètes, sans qu’il soit nécessaire de fournir une offre de prêt contemporaine des opérations (TA Montreuil, 30 mars 2017, n° 1506904, Société BSA).
Si la solution adoptée par le TA de Paris parait dans ce contexte dissonante, elle ne manquera pas d’être rappelée par les services vérificateurs. La suite du contentieux sera, nous l’espérons, plus favorable aux entreprises.
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