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Nouvelle Autorité européenne en matière de LCB-FT : quels impacts sur le secteur financier ?

Implantée à Francfort-sur-le-Main, la nouvelle Autorité européenne de Lutte contre le Blanchiment de Capitaux et le financement du terrorisme (ALBC) devrait mener ses premières missions de surveillance et de sanction à partir de mi-2025, à l’exception de son pouvoir normatif qui est applicable dès cette semaine. Dans ce contexte et compte tenu de son rôle essentiel au sein de l’Union européenne (UE), l’instauration de cette nouvelle autorité suscite déjà beaucoup de questions, en particulier pour les acteurs du secteur financier.

Quand l’ALBC a-t-elle été instaurée ?

L’ALBC a été instaurée par le Règlement (UE) 2024/1620 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2024.

Ce Règlement fait partie d’un ensemble de textes visant à renforcer le cadre juridique de l’UE en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LCB-FT) et qui comprend :

Les dispositions du Règlement (UE) 2024/1620 prévoyant la création de l’ALBC seront applicables à compter du 26 juin 2024. En dehors de son pouvoir normatif (exemple : élaboration de projets de normes techniques d’exécution et émission d’orientations et de recommandations) applicable dès le 26 juin 2024, les autres pouvoirs et missions de l’ALBC (dont ceux de surveillance et de sanction) seront applicables à compter du 1er juillet 2025.

Pour quelles raisons l’ALBC a-t-elle été instaurée ?

La mise en œuvre des mesures de LCB-FT transposées en droit interne dans chacun des États membres de l’UE présente certaines différences ou lacunes qui ont pu nuire au bon fonctionnement du marché intérieur.

L’objectif de la création de l’ALBC est donc d’instaurer une autorité chargée de contribuer, à l’échelle de l’UE, à la mise en œuvre de règles harmonisées dans le domaine de la LCB-FT (en ce compris, notamment, la contribution à la convergence de la surveillance en matière de LCB-FT dans l’ensemble du marché intérieur, ou encore le soutien à l’harmonisation des pratiques de détection, par les cellules de renseignement financier (CRF), des activités ou flux financiers suspects).

Où l’ALBC sera-t-elle située ?

L’ALBC aura son siège en Allemagne, à Francfort-sur-le-Main.

Quels seront les missions et les pouvoirs de l’ALBC vis-à-vis des acteurs du secteur financier ?

L’ALBC disposera de la personnalité juridique ce qui lui permettra, au sein de chaque État membre de l’UE, d’acquérir ou d’aliéner des biens immobiliers et mobiliers, ou encore d’introduire une action en justice. Cela lui permettra également de conclure des partenariats transfrontières pour le partage d’informations en matière de LCB-FT. De même, et pour les besoins de ses travaux, celle-ci va pouvoir conclure des accords de coopération avec l’OLAF (l’Office européen de lutte antifraude), Europol, Eurojust, le Parquet européen, des autorités LCB-FT de pays tiers et des organisations internationales.

De manière générale, les missions de l’ALBC seront principalement les suivantes :

Plus spécifiquement, l’ALBC exercera une surveillance directe sur certains établissements/groupes (i.e. établissements de crédit/financiers ou groupe d’établissements de crédit/financiers au plus haut niveau de consolidation au sein de l’UE1). À ce titre, l’ALBC va :

En outre, l’ALBC exercera également un rôle vis-à-vis des superviseurs financiers et des CRF nationales (pour la France, il s’agit de Tracfin).

En ce qui concerne les premiers, l’ALBC va notamment :

En ce qui concerne les secondes, l’ALBC va, par exemple :

Pour mener à bien ses missions, l’ALBC disposera de pouvoirs de surveillance et d’enquête et, plus largement, de l’ensemble des pouvoirs et des obligations incombant aux superviseurs financiers dans le domaine de la LCB-FT en vertu du droit de l’UE (sauf exception). Elle pourra, selon les cas, également émettre des orientations et des recommandations, des invitations à agir, des instructions, effectuer une médiation et régler des désaccords entre superviseurs, autorités de surveillance et CRF. Elle pourra également exiger la production d’information et de documents auprès de ces mêmes superviseurs, autorités de surveillance et CRF.

Sur quels textes l’ALBC s’appuiera-t-elle pour mener à bien ses missions ?

L’ALBC appliquera directement l’ensemble des dispositions pertinentes des règlements européens en matière de LCB-FT.

En ce qui concerne les directives européennes de l’UE en matière de LCB-FT, l’ALBC appliquera le droit national de chacun des États membres transposant ces directives.

De quelle manière l’ALBC va-t-elle être organisée ?

L’ALBC est structurée en cinq organes. Un conseil général, principalement en charge de la mise en œuvre du système de surveillance LCB-FT, des missions de l’ALBC en ce qui concerne les CRF ainsi que du pouvoir normatif de l’ALBC.

Le conseil exécutif, principalement en charge de la planification globale et de l’exécution des missions confiées à l’ALBC, devra adopter les décisions qui ne relèvent pas du champ de compétence du conseil général.

A côté de ces organes collégiaux, l’Autorité sera dotée d’un président, qui la représentera et aura la responsabilité de préparer les travaux du conseil général et du conseil exécutif, notamment d’établir l’ordre du jour de toutes les réunions, de les convoquer et de les présider,

Pour compléter la présidence, un directeur exécutif sera plus spécifiquement en charge de la gestion quotidienne de l’ALBC. À ce titre, il devra notamment mettre en œuvre les décisions adoptées par le conseil exécutif, établir et mettre en œuvre le projet de document unique de programmation, élaborer le projet de rapport annuel, élaborer un plan d’actions donnant suite aux conclusions des rapports d’audit et évaluations internes ou externes, etc.

Enfin, une commission administrative de réexamen sera chargée d’instruire toute demande de réexamen contre une décision de sanction prise par l’ALBC.

Quelle sera la méthode de l’ALBC pour mener à bien sa surveillance ?

La méthode de surveillance LCB-FT mise en œuvre par l’ALBC doit reposer sur une approche fondée sur les risques. Cette méthode sera déterminée et mise à jour avec les autorités de surveillance nationales, et ce, de façon harmonisée à l’échelle de l’UE.

Que contiendra la base de données centrale de l’ALBC ?

La base de données centrale élaborée et tenue à jour par l’ALBC comprendra, notamment, les informations suivantes :

Comment la surveillance directe par l’ALBC des établissements/groupes s’opèrera-t-elle ?

 Des équipes communes de surveillance seront constituées entre l’ALBC et les superviseurs financiers nationaux chargés de la surveillance de l’établissement/groupe. Les travaux des équipes communes de surveillance seront coordonnés par un membre du personnel de l’ALBC.

Les tâches d’une équipe commune consisteront à :

Comment les pouvoirs de l’ALBC aux fins de l’exécution de ses missions pourront-ils se manifester ?

 Aux fins de l’exécution de ses missions, l’ALBC disposera de plusieurs pouvoirs, tels que les suivants :

Comment la surveillance indirecte par l’ALBC des autres établissements/groupes s’opèrera-t-elle ?

En ce qui concerne les établissements/groupes qui ne font pas l’objet d’une surveillance directe, l’ALBC pourra notamment :

L’ALBC détiendra-t-elle un pouvoir normatif ?

 L’ALBC aura pour mission d’élaborer :

Quels seront les moyens financiers et humains de l’ALBC pour mener à bien ses missions ?

 L’ALBC disposera d’un budget annuel constitué :

L’ALBC disposera de son personnel propre qui sera doté, pour partie, du statut de fonctionnaire européen. Elle pourra également faire appel à des experts nationaux détachés ou à d’autres agents qui ne feront pas partie de son personnel, y compris des délégués de CRF.

En dehors des autorités de surveillance et de supervision du secteur financier, avec quelles autres autorités l’ALBC devra-t-elle coopérer ?

Pour l’exercice de ses pouvoirs et de ses missions, l’ALBC va établir, et devoir maintenir, une coopération étroite avec les autorités européennes de supervision (ESMA, EBA et EIOPA). Celle-ci sera, en particulier, nécessaire lors de l’exercice par l’ALBC de son pouvoir normatif.


[1] Ce nombre d’établissements/groupes peut être limité par l’ALBC, en consultation avec les autorités de surveillance nationales, à 40. La première sélection de ces établissements débutera au plus tard le 1er juillet 2027 et s’achèvera d’ici la fin de l’année 2027. La sélection sera ensuite renouvelée tous les 3 ans.