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Conditions de déductions des intérêts financiers : synthèse des fiches pratiques publiées par la DGFiP

Le 27 janvier 2011, la DGFiP a rendu publiques les conditions dans lesquelles l’Administration compte mettre en œuvre les dispositions de l’article 212, I, a du CGI pour autoriser la déduction des intérêts financiers intragroupe conformes au taux du marché. Les fiches pratiques publiées devraient marquer une étape positive d’une saga de plusieurs années dont l’année 2020 aura été déterminante.

Dans le contexte de la publication par l’OCDE d’un Chapitre X des Principes de l’OCDE en matière de prix de transfert portant sur les transactions financières (OCDE (2020), Instructions sur les prix de transfert relatives aux transactions financières : Cadre inclusif sur le BEPS) ainsi que d’une succession d’arrêts du Conseil d’Etat, la DGFiP a publié ses fiches pratiques, à l’issue d’un travail de longue haleine débuté dès 2019, en concertation active avec les opérateurs économiques réunis par le MEDEF.

La version finale se compose d’une fiche introductive suivie de huit fiches qui viennent compléter l’instruction administrative (BOI-IS-BASE-35-20, 31 juill. 2019). Elles constituent des bonnes pratiques qui devront désormais être admises par les services de contrôle lorsqu’elles sont mises en œuvre par les entreprises.

Que contiennent les fiches ?

Ces fiches techniques et pratiques apportent en deux temps un certain nombre de réponses aux principaux points de blocage auxquels les entreprises et les services de contrôle étaient confrontés jusqu’à présent. Ces précisions constituent désormais le cadre à retenir.

Dans un premier temps, la DGFiP présente les différents moyens de preuve à la disposition du contribuable afin de justifier que le taux d’intérêt retenu est bien conforme au marché (fiches n° 1 et n° 2) ;

Dans un second temps, elle précise son interprétation des critères de comparabilité à analyser pour une transaction donnée (fiche n°3 à fiche n°8).

Pour justifier du taux du marché, l’idéal serait la présentation d’une offre de prêt ferme, très difficile voire impossible à obtenir par le contribuable. Aussi, la production d’une étude permettra-t-elle désormais de nourrir les échanges avec le service vérificateur en vue de justifier du taux retenu par le groupe. Cette étude devra remplir certaines conditions :

Ces fiches ne règlent certes pas l’intégralité des points en débat lors des contrôles. Reste que la voie de l’échange technique sur le prix de marché, sur la base des éléments apportés par les groupes, est désormais ouverte.

Fiches n°1 & 2

La fiche introductive ainsi que la fiche n°1 Dialectique de la preuve servent de cadre général aux sept autres fiches. L’Administration présente l’articulation légale des dispositions de l’article 212-I a du CGI dans lequel elles s’inscrivent. Cette fiche détaille les principes de mise en œuvre de ces dispositions du CGI qui ne devraient plus soulever de difficulté pour les services de contrôle et les entreprises.

L’exemple présenté dans cette fiche permet de distinguer différentes situations de mise en œuvre des dispositions de l’article 212-I a du CGI :

A défaut d’avoir réalisé cette démonstration :

La fiche n°2 Modalités de preuve rappelle, par ailleurs, que bien qu’il soit admis qu’une étude puisse être produite a posteriori, il est préférable que les entreprises réunissent l’ensemble des éléments de preuve lors de la mise en place du prêt intragroupe.

Fiches n°3 à 8

La fiche n°3 Comparabilité – publications méthodologiques d’agences de notation et risque de crédit pose de nouveau la question de la prise en compte du soutien implicite du groupe. Alors qu’il était admis que l’appartenance d’un emprunteur à un groupe ne devait pas être prise en compte dans l’appréciation de son risque de défaut, l’Administration demande désormais qu’une analyse soit réalisée, afin d’évaluer la présence ou non d’un soutien implicite du groupe. Cette nouvelle exigence semble contradictoire avec les décisions ayant déjà tranché ce sujet (CE, 18 mars 2019, n° 411189, SNC Siblu). Cette fiche n’aborde pourtant pas la principale difficulté d’application du soutien implicite : l’appréciation de son impact.

La fiche n°4 Comparabilité – cas d’un ajustement améliorant la fiabilité d’un comparable indique les conditions dans lesquelles un ajustement peut être apporté afin d’améliorer la comparabilité d’une transaction comparable. L’Administration rappelle qu’une transaction peut être considérée comme comparable dès lors, qu’elle réunit les deux conditions suivantes :

L’Administration semble par ailleurs reconnaitre qu’une transaction ne doit pas nécessairement être exclue, même si elle n’est pas parfaitement comparable, en reconnaissant la possibilité d’apprécier les différents critères avec souplesse et accepte ensuite que des ajustements soient apportés afin de corriger les éventuelles différences apparues entre les comparable et la transaction vérifiée. La fiche n’apporte cependant aucune précision sur la manière dont ces ajustements doivent être calculés, à l’exception de la mention de taux swap.

La fiche n°5 Comparabilité – présence de différences multiples et substantielles retient une comparaison avec un prêt bancaire dont les caractéristiques ne sont pas toutes comparables au prêt vérifié. L’Administration admet la possibilité de cumuler plusieurs ajustements tout en soulignant que ces ajustements, s’ils sont complexes, peuvent conduire à des résultats insuffisamment fiables. Selon l’administration fiscale, pour qu’un ajustement soit admis, il doit être caractérisé et quantifié.

La fiche n°6 Comparabilité – contrat de prêt bancaire à emprunteurs multiples rappelle qu’une transaction potentiellement comparable ne peut être rejetée dès lors qu’elle a été conclue concomitamment avec un tiers et si elle reflète la situation propre de l’entreprise, ainsi que les caractéristiques du prêt dans des conditions de pleine concurrence. Les dispositions de financement (en l’occurrence la mise en place d’un contrat commun à plusieurs sociétés) ne sont donc pas suffisantes pour rejeter une transaction.

La fiche n°7 Comparabilité – prêts « miroirs » rappelle les critères de comparabilité de ces prêts « miroirs ».

La fiche n°8 Comparabilité – marché financier obligataire reconnait sans ambiguïté la possibilité pour les entreprises de recourir à des emprunts obligataires s’ils constituent une alternative réaliste à un prêt et si les entreprises émettrices se trouvent dans des conditions économiques comparables. Cette fiche vient utilement clarifier trois points portant sur les conditions d’utilisation de ces comparables :