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Projet de loi portant création d’une taxe sur les services numériques et modification de la trajectoire de la baisse de l’IS

Le projet de loi portant création d’une taxe sur les services numériques (et modification de la trajectoire de la baisse de l’impôt sur les sociétés) a été présenté en Conseil des ministres le 6 mars dernier.

Avec ce projet de loi, la France fait cavalier seul, tandis que les discussions autour d’une taxe européenne n’ont pas abouti, et que les travaux de l’OCDE sur ce thème commencent réellement.

Cette taxe serait applicable dès 2019, et un acompte devrait être acquitté dès le mois d’octobre, sur la base des revenus de 2018.

Elle présenterait toutefois un caractère provisoire, puisqu’elle ne s’appliquerait que de manière transitoire, jusqu’à ce qu’une solution soit trouvée à l’échelle de l’OCDE (même si le texte lui-même ne comprend aucune indication formelle en ce sens).

Le texte, eu égard à sa grande complexité, mérite une analyse approfondie et l’on peut souhaiter que des éclaircissements soient apportés au cours des travaux parlementaires.

Nous exposons ici l’économie générale et les grandes lignes de la taxe proposée.

Champ d’application

Le projet de loi définit la nature des services tombant dans le champ d’application de la taxe, le critère de rattachement territorial (ne seraient imposables que les services réputés fournis en France), et les redevables de la taxe.

Nature des services taxables :

Les services d’intermédiation

C’est-à-dire la mise à disposition, par voie de communications électroniques, d’une interface numérique qui permet aux utilisateurs d’entrer en contact avec d’autres utilisateurs et d’interagir avec eux, notamment en vue de la livraison de biens ou de la fourniture de services directement entre ces utilisateurs.

Le ciblage publicitaire et la revente de données personnelles à des fins publicitaires

C’est-à-dire les services commercialisés auprès des annonceurs ou de leur mandataire, leur permettant d’acheter des espaces publicitaires situés sur une interface numérique accessible par voie de communications électroniques pour y placer des publicités ciblées en fonction de données des utilisateurs qui consultent cette interface (notamment, les services d’achat, de stockage et de diffusion de publicité, de contrôle publicitaire et de mesures de performance ainsi que les services de gestion et de transmission de données relatives aux utilisateurs).

Activités exclues :

Territorialité (notion de services « fournis en France »)

Seuls seraient taxables les services réputés fournis en France. Pour l’essentiel, un service serait réputé fourni en France dès lors que l’un des utilisateurs est localisé en France (c’est-à-dire qu’il consulte une interface au moyen d’un terminal situé en France).

Seraient réputés fournis en France :

Les entreprises concernées :

Seraient redevables de la taxe les entreprises, établies en France ou à l’étranger, dont le montant annuel des sommes encaissées en contrepartie des services taxables lors de l’année civile précédente excède cumulativement

Pour les entreprises liées – directement ou non – sous contrôle exclusif (au sens du II de l’article L. 233-16 du Code de commerce), ces seuils s’apprécient au niveau du groupe.

Assiette de la taxe

L’assiette serait déterminée de manière forfaitaire (coefficient de présence numérique en France), par application d’un « pourcentage représentatif » de la part des produits rattachable à la France par rapport à la totalité des encaissements de l’entreprise au titre de ces services. Ce pourcentage serait déterminé, pour chaque catégorie de services taxables selon une règle propre, qui fait essentiellement référence à la proportion d’utilisateurs localisés en France.

Taux

Le taux de la taxe serait de 3 %.

Exigibilité, déclaration et paiement

La taxe serait due par la personne qui encaisse les sommes en contrepartie des services taxables

Recouvrement et contrôle

Mêmes procédures et mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges que pour les taxes sur le chiffres d’affaires.