La Cour de cassation a fait évoluer sa jurisprudence sur le formalisme du testament olographe par un arrêt rendu le 23 mai 2024. Désormais, les juges de droit reconnaissent sa validité même partiellement écrit de la main d’un tiers.
En l’espèce, le défunt avait laissé un testament olographe dans lequel une partie de la date avait été rédigée par un tiers. Effectivement, le « 9 » du 26 mars 2009 n’aurait pas été rédigé par le disposant. Le fils du défunt conteste la validité formelle du testament qui instituait un tiers légataire d’un ensemble immobilier.
Rappel : le formalisme applicable au testament olographe
Le testament est un acte unilatéral de disposition à titre gratuit et à cause de mort.
Le testament olographe doit respecter un strict formalisme : selon l’article 970 du code civil, il doit être intégralement écrit, daté et signé de la main du testateur, afin de confirmer avec certitude son identité. Il s’agit d’un formalisme exigé ad validitatem. L’absence d’une des trois conditions exigées par l’article 970 du code civil entrainant la nullité du testament (article 1001 du code civil).
Ainsi, le testament est nul lorsqu’il a été écrit par un tiers, intégralement ou partiellement. Toutefois, la seule présence d’une écriture étrangère sur le testament n’est pas toujours cause de nullité.
Néanmoins, nonobstant ce socle de règles, les juges sont régulièrement réticents à prononcer la nullité d’un testament olographe, représentative des dernières volontés de son auteur, en sauvant des testaments ne respectant pas les conditions posées par le code civil.
Effectivement, un testament dont la date est erronée, incomplète ou absente, ne sera pas nécessairement annulé s’il existe dans l’acte des éléments intrinsèques, éventuellement corroborés par des éléments extrinsèques, permettant de dater le testament (Cour de cassation, chambre des requêtes, 19 février 1818) ou de déterminer une période au cours de laquelle il aurait été rédigé.
La Cour de cassation a longtemps prononcé la nullité du testament olographe en l’absence de date complète. Assouplissant sa jurisprudence, elle a opéré un revirement rendant le formalisme moins strict lorsque les intérêts du testateur ne sont pas en cause (Arrêt Payan, Cour de cassation, 1re chambre civile, 9 mars 1983 ; et Arrêt Garon, Cour de cassation, 1re chambre civile, 10 mai 2007).
Dès lors, l’absence de date précise n’entraine plus la nullité systématique du testament.
L’originalité d’une décision portant sur une date complète mais partiellement rédigée par un tiers
Dans cette affaire, le « 9 » ayant été rédigé par un tiers, la Cour d’appel avait conclu que le testament n’avait pas été entièrement écrit de la main de la testatrice. Elle avait, alors, prononcé la nullité du testament litigieux. Ce vice formel suffisait donc à emporter la nullité du testament.
La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel : « en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si en dépit de cette irrégularité, des éléments intrinsèques à l’acte, dont faisait partie la mention « 26 mars 200 » écrite de la main de la testatrice, éventuellement corroborés par des éléments extrinsèques, ne permettaient pas d’établir que le testament avait été rédigé au cours d’une période déterminée, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ».
Cet arrêt s’inscrit dans la continuité de la jurisprudence sur la question de la date du testament olographe, la recherche des éléments intrinsèques éventuellement corroborés par des éléments extrinsèques servant à déterminer une période au cours de laquelle il aurait été rédigé.
En revanche, de manière singulière, et contrairement aux jurisprudences sur le sujet, la date était ici présente, mais seulement partiellement rédigée par un tiers. Les juges de cassation semblent, ainsi, ici étendre leur jurisprudence à une cas différent d’une simple absence de date du testament.